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Category:
Fandoms:
Relationships:
Characters:
Additional Tags:
Language:
Français
Series:
Part 5 of Sicktember , Part 24 of Défi d'écriture
Collections:
Sicktember 2024
Stats:
Published:
2024-09-03
Updated:
2025-08-19
Words:
23,797
Chapters:
11/30
Comments:
12
Kudos:
6
Hits:
254

Sicktember 2024

Summary:

Même le plan le plus minutieux comportait des failles. Mais ce serait quand même bien s'ils pouvaient réussir à vivre leurs vies amoureuses sans finir la tête dans la cuvette.

Chapter 1: "Je n'ai pas la gueule de bois, je suis juste malade" (ou inversement)

Notes:

Et nous revoilà à notre rendez-vous annuel~

Normalement, j'aurais préféré me concentrer sur le Sicktember 2023 avant de recommencer, mais le Tumblr nous a récemment annoncé que l'équipe actuelle s'arrêtait cette année (les soumissions sont jusqu'à début octobre). Tout ce qu'on sait, pour le moment, c'est que le Tumblr ne sera pas supprimée, mais nous ignorons encore si quelqu'un va reprendre le flambeau ou non. On croise les doigts !

Si vous me suivez sur les RS, vous n'êtes pas surpris, j'avais annoncé que je m'y retentais, tout en vous donnant la possibilité de me proposer une idée. Bon, finalement, j'ai décidé de continuer sur Zelda (vu que c'est ma mono obsession actuelle) et comme je ne parvenais pas à me décider sur quel couple, je les ai tous mis ensemble, na.

Disclaimer : La légende de Zelda appartient à Nintendo.

Bonne lecture !

Chapter Text

La soirée avait plutôt bien commencé, dans l'ensemble.

Ils s'étaient retrouvés dans un petit bar qu'ils ne connaissaient pas et avaient eu la bonne surprise d'y découvrir une ambiance chaleureuse grâce à laquelle ils avaient pu se détendre rapidement et éviter ces moments gênants typiques des premiers rendez-vous.

— Tu es déjà venu ici ?

— Non non, je te l'avais dit, c'est la première fois. C'est une amie qui m'en a parlé, elle s'y produit de temps à autre.

— Ah. Musicienne ?

— Oui, et parfois elle donne de la voix. Elle a monté un petit groupe avec deux autres filles, elles s'amusent bien et ont leur petit succès.

— C'est cool. Elle joue de quoi ?

— De la harpe.

Un petit silence gêné prit place alors que tous les deux tentaient de trouver un moyen de relancer la conversation. Heureusement, leur commande arriva à ce moment-là, leur permettant de se plonger dans leurs boissons respectives avant de se râcler mutuellement la gorge puis de croiser le regard de l'autre et de partir en fou rire.

— Je vois que je ne suis pas le seul à me sentir gêné !

— Tu veux rire ? Je suis tellement stressé que je ne suis même pas sûr de pouvoir finir ma bière !

Leurs rires s'élevèrent à nouveau et ils décidèrent de trinquer. À rien de particulier, juste le plaisir de la compagnie de l'autre.

La conversation finit par reprendre, plus naturellement, alors qu'ils racontaient leurs vies tout en restant en surface.

— Et donc, ça fait longtemps que t'es sur l'appli ?

— Euh… T'as déjà eu une vraie réponse ?

— Franchement ? Non, généralement de l'hypocrisie ou un bon contournement de sujet. Comme ça, par exemple.

— Oups, je suis grillé !

Prenant un faux air innocent absolument pas crédible, il tourna la tête et reprit une gorgée de sa bière.

— Et plus sincèrement ?

— Plus sincèrement, y'a pas de bonne réponse. De toute façon, c'est écrit dans nos profils. Je m'y suis inscrit il y a des années, et je l'active et le désactive en fonction de ma vie amoureuse.

— Donc, célibataire ?

— Pas cette fois. Juste moins dans le placard.

La grimace suspicieuse froissa le visage de son interlocuteur mais lui-même n'en prit pas garde.

— C'est littéralement écrit sur mon profil, là aussi. Ou je dois croire que tu étais un peu trop concentré sur autre chose ?

Cette fois, il agita ses sourcils d'un air entendu, alors que son vis-à-vis piquait un léger fard et détournait le regard à son tour. Les photos disponibles avaient troublé plus d'un membre, tout en restant parfaitement dans le cadre de la charte de l'application de rencontre.

Satisfait de son effet, il se redressa, arborant cet affreux sourire en coin qui tapait sur les nerfs d'absolument tout le monde.

— Je suis actuellement dans un polycule avec un gars et une fille, mais aucun de nous trois sommes fermés à de nouvelles rencontres. Donc, non seulement ils savent où je suis, pourquoi, et avec qui, mais j'ai quasiment leurs bénédictions.

— C'est… particulier.

— Moins dans le placard, répéta-t-il en haussant les épaules.

Ils se turent l'espace de quelques secondes, pensifs.

— Mais, ça te gène ? Que je ne sois pas, techniquement, célibataire ?

Un peu surpris par la question, l'interpellé sursauta légèrement, avant de triturer la paille de son cocktail, nerveusement.

— Je crois que cette question-là, aussi, est difficile à répondre. Je crois que non ? Tu me plais.

La fin avait été marmonnée alors que son rougissement s'étalait jusqu'au bout de ses oreilles.

— Tu me plais aussi. Sinon, je n'aurais pas accepté le rendez-vous, emo-prince.

Entendre son pseudo sur l'appli le fit grimacer de nouveau, à son amusement.

— Ce n'est pas toi qui l'as choisi, je me trompe ?

— Ma pote musicienne, grommela-t-il. Je ne trouvais pas d'idée alors je l'ai laissé faire. Et j'ai toujours aucune idée de rechange alors je le garde.

— Du coup, je continue de me foutre de toi ou vais-je avoir la permission d'utiliser ton prénom ?

— Pourquoi tu le voudrais ?

Il arborait une expression grincheuse, mais il en fallait plus pour faire reculer son rencard qui se pencha par-dessus la table pour lui souffler quelques mots dans l'oreille avant de se reculer et de l'observer devenir plus rouge que jamais, jurant avec ses cheveux roux.

— Tu n'as pas envie de m'entendre le crier ?

Vidant le fond de sa choppe, il attira l'attention du serveur pour passer une nouvelle commande avant de se recentrer sur « emo-prince » qui avait décidé de l'imiter et de finir son cocktail ridicule.

C'était quoi son nom, déjà ? « La cerise enchantée », non ?

— Tu… tu es toujours comme ça ? Ou c'est une tradition de premier rendez-vous ?

— Tout dépend de ce dont tu parles.

— Ton côté… rentre-dedans ?

Accueillant sa nouvelle choppe, il se contenta d'un sourire énigmatique, se tournant légèrement sur le côté afin de croiser les jambes plus confortablement, l'amusement scintillant dans ses yeux bleu bondi.

— Ça te met mal à l'aise ?

— Un peu, oui.

— Tu veux que j'arrête ?

Il allait répondre oui. Puis non. Et, enfin, il se rendait compte qu'il n'en avait pas la moindre idée alors que la sensation fantôme du souffle chaud contre son oreille se rejouait dans son esprit et qu'il s'agita sur sa chaise, tentant de s'asseoir plus confortablement.

— Je prends ce silence pour un « non ». Mais ce ne sera pas toujours le cas.

Il souligna sa dernière phrase d'un clin d'œil appuyé qui ne l'aida pas à se ressaisir.

— Et, eum, et toi ? IamALegend ?

— C'est un pseudo que j'utilise depuis des années. Je l'avais pris lors de mon inscription, la première fois, je n'ai pas vu l'intérêt d'en changer, maintenant. Et, disons que certains ex ne l'ont pas trouvé démérité.

Ayant subitement terriblement chaud, « emo-prince » tira un peu sur le col alors que son esprit semblait avoir deviné le sous-entendu sans trop d'effort.

Il était loin d'être prude et ce n'était pas comme si « IamALegend » se comportait différemment de lors échanges. C'est juste qu'en l'ayant, physiquement, devant soi… Il se félicitait pour avoir changé d'avis lorsque sa photo était apparue dans le carrousel de profils, l'ayant pris pour un de ces minets efféminés ou tout simplement une femme, les deux n'étant pas trop dans ses goûts.

— Mais, si c'était la question que tu voulais me poser, je m'appelle Link. Pas très original, mais il faut bien avoir un prénom, non ?

— Ralph. Mon prénom.

— Enchanté. Ralph.

Le ton caressant que Link avait adopté ne lui échappa pas et, une nouvelle fois, son sang retourna irriguer son visage.

— Tu sais, je crois que tu t'y prends mal, osa-t-il formuler.

— Oh, vraiment ? Ai-je fait une erreur ? Je suis allé trop loin ? s'inquiéta-t-il, tout masque abandonné.

Prenant son courage à deux mains, Ralph reposa son verre long drink et le poussa un peu sur le côté pour éviter de le renverser.

— Tu n'envoies pas mon sang dans la bonne direction, déclara-t-il enfin. Enfin, si j'ai bien interprété tes signaux.

Déstabilisé par la réponse – Link ne s'attendait pas à ça, craignant clairement avoir trop poussé ses taquineries – il lui fallut quelques instants pour se ressaisir, un sourire joyeux froissant son expression craintive.

— Oh, tu veux jouer à ça ?

Plantant un coude sur la table, il appuya son menton dans la paume de sa main, jouant avec sa choppe de l'autre.

— Sais-tu dans quoi tu t'embarques ?

— Je pense en avoir une petite idée, oui.

Il imita sa posture et leurs visages n'étaient séparés que de quelques ridicules centimètres, leurs souffles caressant la peau de l'autre, alors qu'ils se dévoraient mutuellement du regard.

Lequel des deux fit le premier geste ? Peut-être l'un. Peut-être l'autre. Peut-être les deux. Quelle importance ?

Ils n'avaient pas beaucoup de marge de manœuvres, avec leurs verres respectifs, mais ils s'y accommodèrent, saisissant un col, une poignée de cheveux, le coude de l'autre, une épaule…

Quand ils finirent par se séparer, il n'était pas très utile de jeter un œil autour d'eux pour savoir qu'il valait mieux pour eux de lever le camp. Pas qu'ils se trouvaient dans un bar homophobe, mais simplement qu'il y avait eu là plus qu'un simple baiser. Et ils n'avaient pas été les seuls à s'en être rendu compte, quelques sourires amusés ou des joues rouges parmi leur voisinage proche le confirmant, ajoutés à ceux qui n'osaient plus les regarder.

Finissant leurs verres, ils allèrent les rapporter au bar où Link paya leurs consommations avant d'attraper Ralph par le poignet et les guider vers l'extérieur d'un pas suffisamment marqué pour que les volants de sa jupe ne frappe ses cuisses en rythme.

L'air frais à l'extérieur les frappa, mais pas de manière inconfortable, leur permettant de se rendre compte à quel point ils avaient eu chaud à l'intérieur, mais déjà se retrouvaient-ils pour un nouveau baiser, sans prendre le temps de commenter quoi que ce soit.

Ce fut un, puis deux, trois…

— On devrait aller dans un endroit plus adéquat, non ? Pas que l'exhibitionnisme me dérange en soi, mais il y a plus confortable…

Ils avaient fini par s'appuyer contre un réverbère et les formes du métal froid n'avaient rien d'agréables contre sa colonne vertébrale.

— J'habite pas loin, proposa Ralph.

— Bonne idée, on va peut-être éviter les présentations tout de suite…

La référence à ses deux autres partenaires le surprit alors qu'il écarquillait les yeux en réaction, avant de se reprendre, haussant mentalement des épaules.

Vérité ou mensonge, il décidé de lui faire confiance à ce sujet.

Heureusement, son appartement était vraiment proche – l'une des raisons pour lesquelles Nayru avait choisi ce bar pour jouer, pouvant s'arrêter chez lui au besoin – et ils tâtonnèrent rapidement dans le couloir obscur pour ouvrir la porte et s'y précipiter, soupirant en chœur alors que les chaussures volaient déjà, les vestes jetées au sol, et qu'ils se rapprochaient de nouveau.

Ils s'écroulèrent dans le canapé, projetant les coussins n'importe où, trop occupés pour s'en soucier, leurs lèvres soudées à celles de l'autres, les mains rencontrant de moins en moins d'obstacles…


— Oh, regardez qui voilà ! Ce visage me dit quelque chose !

— Serait-ce notre cher héros, rentrant péniblement après une longue nuit occupée à se battre contre le mal ?

— Notre splendide prince sur son cheval blanc ?

Grognon, Link prit appui contre le mur, de son épaule, alors que Lavio et Marine le charriaient tour à tour sur son arrivée pas très matinale. Ce n'était pas comme s'ils n'étaient pas au courant de son rendez-vous la veille et ce n'était pas non plus comme s'il ne les avait pas prévenu qu'il passerait la nuit chez ledit rendez-vous (avec géolocalisation, on n'était jamais trop prudent).

— Non, nous faisons fausse route, belle dame. Je ne vois qu'un poivrot cuvant sa dernière cuite, regretta dramatiquement Lavio.

— Pauvre de nous ! renchérit Marine.

— Le poivrot vous déteste et retourne se coucher, marmonna celui-ci.

Il traça sa route en s'accrochant à tout ce qu'il pouvait : murs, meubles, encadrements de porte…

Son équilibre était mis à mal, à l'évidence, mais ce n'était pas ses deux bières qui devraient autant faire effet !

Mais il était bien trop épuisé pour réfléchir à ce sujet, ce sera pour le Link du réveil !


— Hé, t'es bien rentré ?

Maintenant qu'ils s'étaient vus en face à face (et un peu plus que ça), ils avaient échangé leurs numéros, d'où l'appel de Ralph.

Une quinte de toux et une respiration sifflante encombra la ligne quelques minutes, avant que le tout ne se calme enfin.

— Donne-moi ça, Link, tu es ridicule, entendit-il en fond.

Une autre voix se fit entendre à travers le portable alors que des plaintes provinrent d'un peu plus loin.

— Salut, tu dois être Ralph ? Je suis Lavio, Link nous a prévenu qu'il t'avait parlé de nous, donc je n'ai pas besoin de te dire qui je suis, non ?

La phrase avait été articulée dans un seul souffle, additionnée à la voix inconnue à laquelle il ne s'attendait pas, Ralph ne put marmonner qu'une suite inintelligible de syllabes, ce qui ne parut pas surprendre ou vexer son nouvel interlocuteur, celui-ci reprenant rapidement la parole.

— De ce qu'il nous a raconté, vous avez passé un bon moment ensemble ! Par contre, il n'est pas en état de te répondre, pas en appel en tout cas. Quoi que, vu son état de confusion, il vaudrait mieux qu'on le lui confisque entièrement… Qu'en penses-tu, Belle Marianne ?

Une autre voix en fond lui répondit sans que Ralph ne parvienne à saisir ses propos.

— Link a un souci ?

— Mmh ? Oui, il est malade. On a pensé d'abord que c'était sa consommation d'alcool, mais même ses retours de festival ne sont pas aussi… Tu as déjà vu l'Exorciste ? Bah, il nous fait pratiquement un remake. Sans la scène avec le crucifix, bien sûr.

Un rire explosa quelque part derrière lui, suivi par de bruyants cris, sûrement Link tentant de récupérer sa dignité ruinée.

— Ah ? émit-il faiblement.

— Mais ne t'inquiète pas, il devrait être rapidement sur pieds, c'est un battant ! C'est pour ça qu'on se bat pour qu'il se repose un peu, d'ailleurs. Enfin, bref, merci d'avoir appelé, faut que je retourne calmer le dragon, au plaisir de se rencontrer un jour !

Et avant que Ralph n'ait pu ajouter quoi que ce soit, il raccrocha, l'abandonnant avec une infinité de questions.

— Il veut qu'on se rencontre ? pépia-t-il d'une voix particulièrement aigue.

Chapter 2: Excès de bonne chose/excès de gourmandise

Notes:

Fait amusant, quand je dois écrire Ralph et Lavio dans la même phrase, j'écris souvent "Ravio" (de son nom anglais et japonais) par erreur.

Voilà.

L'émétophilie est une paraphilie dans laquelle un individu est sexuellement excité par la pratique ou la vue du vomi.

Voilà.

Bonne lecture !

Chapter Text

Link avait organisé un nouveau rencard avec Ralph. Ce n'était pas une vilaine grippe qui allait le ralentir !

Tout avait été préparé minutieusement, et ce, même s'il savait parfaitement que les meilleurs plans avaient des failles.

Par contre, il ne s'était pas attendu à ce qu'il tombe à l'eau avant même qu'il puisse quitter son foyer.


— Salut, Ralph ? Je suis désolé, on va devoir remettre ça un autre jour.

— Un problème ?

La main gauche occupée à tenir son portable, Link dardait un œil attentif sur son petit ami, retenant ses cheveux de sa main droite.

— On peut dire ça. Lavio a passé la matinée à se goinfrer de rubis, et on va dire qu'il est passé à la caisse.

Un long gémissement plaintif monta du malade, en réaction. Sûrement une énième lamentation sur son humour désastreux.

Mais il n'y fit pas attention, soucieux du soudain silence au téléphone.

— Ralph ? T'es toujours là ?

— … Ton… petit ami ? a mangé des rubis ?

Ce fut au tour de Link de marquer un temps d'arrêt, cillant avant de coincer le mobile avec son épaule pour rassembler la chevelure noire dans ses deux mains, l'éloignant du visage du malade.

— Ce n'est pas ce que tu crois, il n'a pas un Pica ou un truc du style ! Non, bien au contraire.

Un rire tremblant le parcourut, manquant de faire tomber le smartphone au sol.

— Alors, c'est quoi ?

— C'est une spécialité Lorulienne. Des bonbons en gélatine, en forme de rubis. Et Lavio en raffole, comme tu l'auras sans doute deviné.

Le bruit distinct d'un haut-le-cœur ne put être censuré alors que le concerné se pencha plus encore, purgeant son estomac d'une partie des friandises.

Appliqué, Link tira la langue alors qu'il repositionnait son téléphone d'un mouvement d'épaule, entortillant la poignée de cheveux d'une seule main pendant que l'autre frottait le dos de Lavio d'un geste tendre.

— Et Marine n'est pas là, tu t'en doutes, donc je ne peux pas le laisser tout seul. Donc, on peut remettre ça une autre fois ?

— Euh oui, je peux, pas de problème.

— Merci, vraiment désolé…

Ils se turent un instant, l'un occupé à surveiller son petit ami, l'autre triturant une mèche de ses cheveux, pensif.

— Est-ce que… est-ce que tu as besoin d'aide ?

Ne s'attendant pas à cette proposition, Link manqua de nouveau de lâcher le portable. À la place, il le changea d'épaule, soulageant ses cervicales.

— Tu es sûr de toi ? On est loin de la situation rêvée…

Son cerveau fut traversé par une pensée parasite, le faisant froncer le nez.

— Attends, ne me dis pas que tu es émétophile ? Pas que je juge ou quoi, mais…

Bon, okay, il jugeait complètement. Mais c'était purement par méconnaissance et il en avait conscience, ne se permettant d'aller plus loin dans sa réflexion.

— Je ne sais même pas ce que c'est. Et, à la réflexion, je doute d'en avoir envie. C'est juste que… Oublie, tu es sûrement trop occupé pour avoir en plus à me gérer.

— Non, je serais content de te voir, tu penses bien ! Mais je vais demander à Lavio, c'est lui qui a le plus à perdre.

Link s'agenouilla, récupérant son téléphone et plaquant une main contre l'écran pour filtrer leurs propos, recoiffant quelques mèches éparses de sa main libre.

— Hé, chéri, comment tu te sens ?

Pour toute réponse, il lui offrit un regard épuisé et un peu vitreux, affalé contre le mur de la pièce, un bras au travers du siège des toilettes.

— Ouais, question con, pardon.

Il frôla son front du bout des doigts, soucieux.

— Ralph propose de passer à la maison. Tu es d'accord ou tu préfères pas ?

— Il peut venir… souffla-t-il.

L'odeur de bile dans son haleine lui fit froncer le nez par réflexe, mais il se contenta de continuer à lui caresser la tête.

— Je ne veux pas que tu te forces pour me faire plaisir ou je ne sais quoi. Tu es malade.

— Par ma faute.

— Tu es malade, répéta Link. Et tu es ma priorité. Si ça te gène d'être vu par quelqu'un d'autre ou que tu n'as pas l'énergie de faires des ronds de jambe, tu as parfaitement le droit de refuser, personne te le reprochera.

Le regard vert coulissa jusqu'au portable oublié dans sa main gauche.

— Lavio, je ne te mens pas. Si une personne qui me plaît ne peut pas comprendre ça, alors je ne vais pas m'encombrer avec elle.

Rapidement, il colla son oreille au téléphone.

— Ne le prends pas personnellement, y dit-il, très vite.

— Y'a pas de mal. Si t'es comme ça avec toutes les personnes auxquelles tu tiens quand elles sont malades, je risque de vouloir la même chose.

— Attends ton tour, dans ce cas, s'il te plaît, le créneau est déjà pris, rit-il.

Il se calma alors que Lavio se blottissait contre lui et lui tapotait sur la main, lui signant que c'était bon.

— Ça m'a l'air validé. Je t'envoies l'adresse par message et tu fais ce que tu veux ? Faut vraiment que je raccroche, cette fois.

— Pas de souci, à tout de suite !

Et, en effet, à peine eut-il le temps de verrouiller le smartphone que Lavio était secoué de soubresauts, ne présageant rien de bon.

Le décollant rapidement de lui, Link le manœuvra de manière à ce qu'il puisse à nouveau dominer les toilettes, sa bouche s'ouvrant la seconde suivante.

L'appuyant contre lui, il saisit les mèches noires, appuyant un baiser contre la nuque accessible, le laissant poursuivre ses offices pendant qu'il tapait l'adresse promise à Ralph avant de rempocher son portable.


Quand Ralph se présenta à l'adresse donnée, il ne savait pas trop à quoi s'attendre.

Il avait eu un peu de route à faire, mais rien d'insurmontable, juste de quoi quitter le centre-ville où il vivait, au profit des faubourgs un peu à l'écart.

De l'extérieur, la maison ne paraissait pas très grande, mais si elle était construite comme ses voisines, alors elle s'étirait dans la longueur, cachant son jeu à quiconque lui ferait face. Elle était sobre, avec des fleurs à chaque fenêtre et une petite cour de gravier jusqu'au portail où il sonna, curieux.

Les noms écrits à la boîte aux lettres ne l'avancèrent pas plus, ignorant lequel correspondait à qui. Bien que la différence entre le premier écrit depuis suffisamment longtemps pour être légèrement effacé, et les deux autres, suggérait être celui du véritable propriétaire. Ou du locataire le plus ancien.

Serait-ce celui de Link ?

La porte s'ouvrant le surprit, l'arrachant de ses pensées et lui permettant de faire face à Link, justement, qui paraissait assez fatigué, bien loin de la personnalité lumineuse et arrogante qu'il lui avait montré lors de leur première rencontre.

Mais vu les circonstances, c'était loin de le choquer.

C'était plus de la surprise, mais ça le conforta d'autant plus dans la raison de sa présence. C'était l'occasion de le voir chez lui, sur son territoire, sans artifice ou masque avec un peu de chance.

Et, il fallait l'avouer, il était très curieux au sujet du fameux Lavio. Et peut-être un peu jaloux.

— Tu as pu facilement trouver ? lança Link en préambule.

— J'ai un bon GPS. Je peux entrer, du coup ?

Le portail fut ouvert et il ne rata pas l'œil attentif, typique des gardiens d'animaux, craignant la fuite de ceux-ci, mais il n'y avait qu'eux d'eux, pour l'instant.

Quel genre d'animal élèverait ces trois-là ? Il était curieux de le savoir.

Au lieu de lui poser la question, il tendit le sac en plastique qu'il tenait.

— Je suis allé faire quelques courses sur le chemin, des fois que ça puisse servir.

Surpris, il s'en empara, l'ouvrant pour jeter un œil à son contenu.

— Yaourts à l'aloe vera, jus d'aloe vera, compote… Eh bah ! Fais gaffe, je crois que tu t'es trompé de cible, mon pote ! C'est avec Lavio que tu vas finir, en fin de compte !

Ne lui donnant pas de pause pour qu'il enregistre ses propos, Link ouvrit la voie, montant les quelques marches menant à la porte qu'il ouvrit en invitation et referma derrière lui.

— Lavio aime l'aloe vera ?

— Il en raffole ! Et je ne te raconte pas sa réaction lorsque, pour son anniversaire, Marine lui a fait la surprise d'en ajouter des pots à sa collection de plantes ! Je crois qu'il aurait pu la demander en mariage dans la seconde !

Son rire était plus sec mais il l'accompagna malgré tout, amusé à l'anecdote.

C'était sans doute du fait de Marine, les jardinières débordant de couleurs aux fenêtres !

Link les conduisit rapidement à la cuisine après lui avoir tendu des chaussons pour remplacer ses bottines, lui présentant sommairement les pièces qu'ils traversaient.

Une bouilloire chauffait tranquillement sur le feu de la cuisinière alors qu'une forte odeur de menthe frappait son nez, dont la source était sans doute la grosse théière sur la table.

Devant l'une des tasses remplies se trouvait un hylien d'environ leur âge, aux cheveux noirs et aux yeux verts bordés de cernes. Clairement, il n'avait pas l'air en forme.

— Lavio, j'imagine ? Moi c'est Ralph, se présenta-t-il.

Un sourire sincère parut métamorphoser les traits fatigués alors qu'il l'accueillit.

— Oh ! C'est gentil d'être venu ! Tu as fait bonne route ? Assis-toi !

Obéissant, Ralph prit place sur sa droite alors que Link farfouillait dans les placards, ayant posé le sac sur le plan de travail, Lavio lui servant une tasse d'infusion, lui permettant de confirmer sa supposition de tantôt, la forte odeur de menthe s'en dégageant.

— Merci, et pardon pour le dérangement.

— Chacun son tour, balaya Lavio d'un geste de la main. La fois précédente où on a parlé, c'était Link qui vomissait ses tripes.

Le susnommé les rejoignit à ce moment-là, un froncement de sourcils froissant son visage.

— De quoi tu parles ?

Lavio et Ralph le fixèrent, un sourcil arqué.

— Ne me dis pas que tu as oublié ?

— Oublié quoi ?

— Je t'ai appelé, le lendemain de notre rendez-vous, commença Ralph.

Mais il n'y avait toujours pas de lueur de reconnaissance dans le bleu de ses yeux.

À la place, il poussa un verre qu'il avait rempli du fameux jus d'aloe vera, ainsi qu'un yaourt et une cuillère vers son voisin qui s'en empara avec hâte, se léchant les lèvres par anticipation.

— Je t'avais dit qu'il était complètement cuit, commenta celui-ci entre deux bouchées.

— Mais de quoi vous parlez ?

— Laisse tomber, répondirent-ils en chœur.

Chapter 3: Campus/Con crud

Notes:

Entièrement inspirée de la Y/Con, sans jamais y être allée

Warning: surnoms pourris !

"Campus/Con Crud", ce serait cette maladie que vous développez après une période intense, comme à la fin d'une convention ou d'un année d'internat, quand vous levez le pied, vous voyez ? Oui, le terme paraît purement américain.

Bonne lecture !

(See the end of the chapter for more notes.)

Chapter Text

— 'tain, je vous déteste.

Chargé comme une mule, Link traînait la patte, tentant de se faire un chemin au travers des allées bondées et des stands temporaires, bousculant les éventuels cosplayers et les autres mules.

— Mais oui, mais oui, balaya Marine.

Pour l'occasion, elle avait décidé de revêtir une longue robe bleue et d'accrocher un hibiscus à son oreille, cosplayant ainsi son personnage préféré, à son tour, ce qui lui permettait d'être la moins encombrée de leur petit groupe.

Grâce à Link, aussi, qui s'était retrouvé porteur officiel.

Et il pouvait râler autant de fois qu'il le voulait, même Ralph avait fini par comprendre qu'il n'en pensait pas la moitié, après avoir assisté à une bataille de regards entre Link et Marine quand celle-ci avait refusé de lui laisser son sac après qu'elle ait claqué une certaine somme pour la collection complète d'un obscur manga. Il refusait que quiconque subisse l'inconfort du port de quoi que ce soit.

Et, comme il l'avait répété à plusieurs reprises, à quoi bon avoir des muscles s'il ne pouvait pas s'en servir ?

Et quels muscles…

En tentant d'être le plus discret possible, Ralph ralentit un peu sa foulée et se permit une œillade en coin, cachant en partie son visage avec l'éventail gracieusement offert par Lavio.

Vêtu uniquement d'une toge blanche drapée sur son épaule gauche, il portait une coiffe en forme de tête de serpent violet, avec plusieurs serpents en partant. Une corde du même violet enserrait sa taille et évitait les accidents malheureux communs à ce genre d'habits. Des bracelets aux poignets et des sandales terminait la tenue, parachevée avec une paire de lentilles rouges aux iris fendus.

Bref, l'ensemble le flattait surprenamment, ne cachant en rien la finesse de sa taille ni ses muscles secs, ses cheveux blonds détachés pour l'occasion frôlant ses traits mis en valeur par du maquillage appliqué par petites touches.

Bref, un vrai régal pour les yeux.

Et il était loin de passer inaperçu. Lavio lui avait même murmuré penser qu'au moins deux exposants l'avaient pris comme modèle, de loin. Et c'était sans parler des photos régulièrement réclamées !

Mais Link était loin d'être le seul, de leur petit groupe, à recevoir des demandes.

Lavio lui-même n'était pas en reste avec sa propre panoplie. Il l'avait tiré d'un jeu, s'il avait bien compris, et était constituée d'un pantalon rouge et d'un genre de toge qui dénudait la moitié de son torse, agrémentée de divers crânes aux genoux, sur l'épaule gauche et à la taille. Des rubans rouges s'entrecroisaient sur ses poignets et ses bras, une couronne de laurier rouge et jaune ceignant son crâne et des jambières en faux métal protégeaient ses jambes jusqu'aux genoux. Il avait finalisé avec une lentille rouge sur l'œil droit qui le gênait de temps à autre.

Par contre, la grande épée était restée à la maison.

Ils étaient clairement, tous les trois dans leur élément et n'hésitaient pas à lui expliquer ou à le guider parmi le labyrinthe de la convention, lui évitant de se faire arnaquer par des contrefaçons. Lavio avait un œil affreusement aiguisé pour repérer la moindre malfaçon, n'hésitant pas à marchander au besoin.

Link n'était pas en reste, mais bien souvent un simple regard noir lui permettait de rebouter les inconvenants.

Quand à Marine, elle était clairement une reine, une déesse, qui savait manipuler les gens sans qu'ils s'en rendent compte, lui étant même redevable pour ses paroles et la remerciant.

Non, sérieusement, quand il les voyait évoluer ici, comme s'ils étaient chez eux, il ne pouvait que se féliciter d'avoir changé d'avis et d'être venus sans son cosplay. Sa tentative de Ralph la casse aurait fait beaucoup trop private joke et il aurait fait tâche au sein de leur dynamique avec sa fausse silhouette de gros balourd. Et puis, pas sûr qu'il ait envie de finir coincé par des fans de bara

— Non, mais allez plus vite, vous avez raison ! râla de nouveau Link.

Le prenant au mot, Marine et Lavio se mirent à courir, tenant leurs costumes en gloussant, se faufilant entre les gens, sous les fausses invectives de leur compagnon resté en arrière.

Arrivant au niveau de Ralph, il changea ses sacs de mains et l'attrapa par le coude, l'attirant dans la fausse poursuite alors que le comique de la situation les gagnait.

Comme tant d'autres participants, ils s'attablèrent à la table minuscule d'un café bondé aux prix exorbitants pour souffler un petit peu et faire le point.

Chacun sortit son téléphone, une note… et lista ce qui restait, ou non, à faire sur ce qu'ils avaient prévu.

— Moi, c'est tout bon ! chantonna Marine. C'est dommage qu'il y ait si peu de contenu Yuri…

Link tendit le bras à l'aveuglette, lui saisissant l'épaule par compassion.

— Tant que le public masculin sera la cible principale du Yuri, rien ne changera, soupira Lavio. On commence à voir un changement du côté des Yaoi, mais ça reste une goutte d'eau dans l'océan.

Il avait retiré l'espèce de toge et sa couronne de lauriers, massant ses articulations qui appréciaient peu l'exercice.

— Vous venez souvent ? les interrogea subitement Ralph.

Le trio échangea un regard avant de revenir vers lui, l'air embarrassé.

— Ah, on a oublié de te le dire ?

— C'est ma sœur et la cousine de Lavio qui l'ont créé. Comme bien souvent, c'était un tout petit évènement, puis on en est arrivé à… ça.

Le « ça » en question se trouvait être un immense bâtiment construit sur deux étages, entièrement dévolu à la romance « homo-fictive », remplie à en craquer de shops, expositions temporaires, stands d'artistes ou d'artisans, présentoirs de maisons d'éditions et de fans. De fans partout, cosplayés pour l'occasion ou non, échangeant virulemment sur leur couple vedette.

— Bah, elles ont de quoi être fière, commenta platement Ralph en revenant de sa surprise.

— Ne leur fais jamais ce plaisir, ricana Link, elles risquent de t'adorer.

— Et c'est une mauvaise chose ?

Pour toute réponse, ils haussèrent tous les trois les épaules, occupés à soulager leurs pieds et à s'hydrater.

Perdu, Ralph décida de ne pas creuser plus la question et les imita.

Lui et Link avaient eu d'autres rencards en tête à tête, mais depuis qu'il était venu chez eux et avait passé l'après-midi avec un Lavio mal en point, il arrivait qu'il soit invité de temps à autres à leurs sorties. Ce fut lors de l'une d'entre elles qu'il avait ainsi pu faire la rencontre de Marine, qui lui avait fait forte impression, elle aussi.

Et pourtant, les filles n'avaient jamais été trop à son goût ! Mais Marine avait un il-ne-savait-quoi d'attirant. Peut-être était-ce une simple attraction romantique ou amicale, en tout cas, c'était loin de lui déplaire, après avoir réfléchi à la question à tête reposée.

— Mais, donc, vous êtes des habitués, reprit-il.

— Oui ! s'exclama la jeune fille. C'est d'ailleurs ici que j'ai fait la rencontre de Link !

Elle s'empara de la main du susnommé et en appuya le dos contre sa joue, en un geste affectueux, le faisant doucement sourire.

— Le plus beau jour de ma vie, lui susurra-t-il.

Lavio toussota.

— Nan, toi, t'es une erreur.

Ladite erreur prit un air choqué tellement surjoué que c'en était comique.

— Je prends le canapé, l'armure et je veux la garde de Shiro !

— Tu peux te le garder, ton oiseau bizarre, grommela-t-il.

— Shiro n'est pas un oiseau bizarre ! C'est notre fils !

Il se leva, repoussant sa chaise, et continua sa diatribe, jouant les effondrés et les maris trompés, provoquant le rire de tous ceux à proximité, comprenant rapidement que tout ça n'était que du théâtre, bien aidé par les volées lyriques de l'une et l'autre parties.

Marine rit doucement à cette scène avant d'adresser un clin d'œil à Ralph qui était visiblement un peu perdu, regardant l'un puis l'autre, comme à un match de tennis.

— On ne s'ennuie jamais avec nous, commenta-t-elle. Surtout avec des deux tragédiennes !

Rassuré, il retourna à sa boisson, profitant du spectacle au même titre que n'importe qui autour d'eux.

Heureusement, ils arrêtèrent leurs fantaisies avant d'aller trop loin et de fatiguer leurs spectateurs, reprenant leurs dégustation avec un silence et un calme effrayant. Enfin, ça l'était de par la différence avec les minutes précédentes. Comme si on avait activé un interrupteur ou qu'il ne s'était rien passé.

— Donc, Marine c'est bon, Lavio, tu as encore des choses de prévu ?

— J'avais l'intention de faire un petit tour vers l'une des tables rondes, mais j'ai déjà tout vu, soupira-t-il. Je passe mon tour. Et toi, Ralph ?

— Oh, euh, moi ? Non non, ça va. C'est la première fois que je viens ici, donc je n'avais rien prévu. Donc, c'est bon pour moi.

De nouveau, l'attention revint sur lui, la surprise se lisant sur chaque visage.

— Tu n'étais encore jamais venu ?

— Non non.

— Mais, genre, jamais ? C'est littéralement dans la ville !

— Hé, l'attaquez pas, les tempéra Lavio. Vous allez lui faire peur, là.

Les deux eurent le bon goût d'être gênés.

— Je sais que ça peut paraître bizarre, mais je n'ai jamais été vraiment attiré par tout ça, alors je n'ai jamais pensé à tenter l'expérience.

Ralph jouait avec son verre, mais n'hésitait pas à croiser leurs regards.

— Et ça s'est jamais fait, voilà tout.

— Mais, du coup, tu ne t'es pas ennuyé ? s'inquiéta aussitôt Marine.

— Non non, c'était plutôt cool, en fait ! Je regrette de ne pas être venu plus tôt et d'avoir eu autant d'a priori, c'était idiot de ma part. Merci de m'y avoir poussé !

Il leur offrit le sourire le plus sincère qui soit, réellement heureux de la journée qu'il avait passé ici. Bien sûr, il avait eu chaud, soif, mal aux pieds et attendus longtemps, mais c'était mineur, comparé aux fous rires qu'ils avaient partagé, la bonne ambiance générale, la légèreté qui régnait malgré les images un peu partout représentant des personnages à différents niveau d'habillage (ou de déshabillage ?) ou dans des positions suggestives.

Il n'y avait rien d'oppressant, rien de malsain et il n'avait vu personne manifester la moindre LGBTphobie, que ce soit à l'extérieur ou à l'intérieur du bâtiment. À y réfléchir, il se sentait un peu bête, maintenant, d'avoir eu de tels a priori. Mais même sans, il ne serait sans doute jamais venu pour autant. Pas tout seul en tout cas. C'était clairement une expérience plus vivante en étant accompagné !

— Donc, t'as quand même passé une bonne journée ? Tu vas pas subitement bloquer Link et faire le mort ?

— Lavio, franchement… râla le concerné.

— Quoi ? Je ne fais que mettre des mots sur tes pensées, mon chéri !

Profitant qu'ils se levaient et ramassaient leur affaires, Lavio se laissa tomber en arrière, dramatiquement, atterrissant pile poil dans les bras tendus de Link.

Il était évident qu'il n'était pas à sa première tentative étant donné l'absence de surprise ou tout simplement leurs sourires entendus à tous les trois.

— Relève-toi crétin, et rhabille-toi si tu ne veux pas finir au pôle sécurité.

— Je te ferais savoir, très cher, que je suis bien plus habillé que toi. Et qu'il y a des cosplays bien plus tendancieux que moi !

On ne pouvait que le lui concéder. Rien que là, à moins de cinq mètres d'eux se trouvaient l'un des multiples cosplays de ce personnage ne portant qu'un large chapeau orange et un bermuda noir. Si Ralph s'en souvenait bien, il venait du même manga que celui de Marine. Ne représentait-elle pas sa mère, d'ailleurs ? Il n'avait pas bien suivi.

Ce fut donc dans cette atmosphère chaleureuse qu'ils quittèrent la convention, tentant de retirer des sacs de la poigne solide de Link et échouant dramatiquement.


S'étant retrouvés sur le parking, les aux-revoir se firent au même endroit, sous les sifflets et taquineries bon enfant de Lavio et Marine pendant que Link embrassait Ralph tout en leur adressant un doigt d'honneur fièrement dressé.

— Tu m'envoies un message quand t'es arrivé ? souffla-t-il contre ses lèvres.

— Je suis à moins de dix minutes de mon appartement, s'amusa Ralph.

— J'insiste.

Pour toute réponse, il l'embrassa de nouveau, profitant qu'il ne soit vêtu que d'une toge pour glisser ses mains un peu partout, se moquant bien des commentaires qui étaient gloussés un peu partout.

— À très vite, finit-il par souffler à son tour.

Le temps de monter dans la voiture et de faire sa manœuvre et ils disparurent tous les trois, le laissant seul.

Glissant les mains dans ses poches, Ralph prit le chemin jusqu'à chez lui, un sourire aux lèvres.


— Hey, bien rentré, alors ?

— Je t'ai envoyé le message, comme promis ! s'insurgea Ralph.

— Oui, je l'ai vu, merci de l'avoir fait.

Ils étaient au téléphone, et pourtant Ralph n'avait aucun mal à imaginer le sourire doux qu'il devait avoir.

Il en aura vu, des facettes de Link ! Derrière une attitude provocante et aguicheuse, derrière des sourcils froncés et une expression froide, derrière des airs méprisants et hautains, il avait découvert un cœur en or et une propension à s'inquiéter pour ceux qu'il aimait.

Il n'aurait pas la prétention de faire partie de ces gens ou, en tout cas, pas au même niveau que Lavio et Marine, ils n'étaient encore qu'au tout début, s'amusant à flirter.

Ils n'avaient même pas couchés ensemble ! Ils avaient passé la première nuit à simplement s'embrasser. Même si, vu leur intensité, il n'y avait rien eu de « simple » dans ces baisers.

— Ça ne m'a pas coûté trop cher, rit-il. Et vous ? La route s'est bien passée ?

— Oui, heureusement qu'on n'habite pas loin, nous non plus, parce que ça a ronflé sec !

— J'ai entendu ça ! rugit au fond une voix qu'il put assigner à Marine.

— Mon cacao, je t'adore, mais je suis au téléphone, là.

— C'est Ralph ? Passe-le-moi !

S'ensuivit les sons d'une légère empoignade avant que le portable ne change de main et que la voix enrouée de la jeune fille ne retentisse.

— Hé, Ralph ! Tu vas bien ?

— Salut Marine, j'ai encore mal aux pieds, et toi ? Tu as pris froid ?

— Pff, détail ! C'est un Con crud, le genre de maladies stupides que tu peux développer après un événement de forte intensité.

— Merci, Wikipédia.

— Va mettre tes doigts dans la prise, amour, lança-t-elle en réponse.

Leur petit échange le fit sourire alors qu'il attendait patiemment qu'on reprenne son appel.

— Bref ! On est assigné à résidence tous les trois, c'est la cour des miracles depuis ce matin !

Son rire se brisa en quinte de toux et il semblerait que Link en profite pour récupérer son portable.

— Allez, retourne dans la cuisine, je sens d'ici le thé de Lavio, soupira-t-il avant de retourner à Ralph. Bon, je crois qu'elle t'a tout dit. Mais t'en fais pas, c'est plutôt fréquent pour nous. Et c'est d'ailleurs pour ça que je t'appelais. Tout va bien de ton côté ?

— Euh, maintenant que tu le dis…

Un puissant éternuement le coupa et il s'empressa d'attraper sa boîte de mouchoir.

— Bienvenue au club, mon pote, déclara solennellement l'hylien à son oreille. Te voilà un pur Conventioner.

— Je suis prêt à parier que ce mot n'existe pas, articula-t-il entre deux mouchages.

— Il n'est jamais bon de parier contre moi, je croyais que tu l'avais compris.

— Oh, tais-toi…

Ce fut au tour de Link de s'étouffer dans son rire, toussant longuement.

Notes:

Marine en cosplay Rouge D. Portgas - Link en Toge d'invicibilité - Lavio en Zagreus

Chapter 4: "Super. J'ai un rhume pour mon anniversaire"

Notes:

Chaque polycule a son fonctionnement. Pour celui-ci, Link est un peu l'élément central. Il est le partenaire de Marine, de Lavio et, peut-être, de Ralph. Marine et Lavio, eux, ont une relation amicale poussée, ils sont un peu comme frère et sœurs et sont très affectueux l'un envers l'autre.

Ralph est un peu en période d'essai, mais ça ne dérange aucunement les trois premiers qu'il les rejoigne ni qu'ils se le partagent.

Un moment que j'adore autant que je redoute, c'est quand je me retrouve à créer du lore, hé hé Et ça commence justement ici ! Plus de détails dans les chapitres à venir ;)

Sinon, avec l'Inktober qui a commencé aujourd'hui, il est possible que mon rythme subisse des retards. Pour changer, oui ^^'

Bonne lecture !

Chapter Text

L'un dans les bras de l'autre, Link et Ralph savouraient le petit bain de soleil auxquels ils avaient droit, les yeux fermés et un petit sourire aux lèvres.

Le banc qu'ils occupaient était dans un coin reculé du parc, des rires d'enfants les atteignant selon le sens du vent et les promeneurs parvenaient rarement jusqu'à eux. C'était très paisible et ils en profitaient, murmurant entre eux quand le besoin se faisait sentir.

— C'est l'anniversaire de Marine, ce week-end, déclara Link. Tu es le bienvenue, si tu le souhaites.

— Oh, quel âge va-t-elle avoir ? Enfin, si tu as le droit de me le dire, bien sûr.

— Officiellement, elle a vingt-neuf ans.

— Et officieusement ?

— Ce n'est pas à moi de te le dire, désolé.

Un nuage passa, les faisant frissonner alors qu'ils rouvraient les yeux, modifiant légèrement leurs positions, puis refermaient de nouveau les paupières.

— Vous allez faire une petite fête, pour l'occasion ?

— Non, ce sera juste nous trois. Ou quatre, si tu te joins à nous. Elle préfère le fêter en petit comité.

— Si ça ne vous dérange pas, oui, pourquoi pas ? Par contre, je n'ai pas d'idée de cadeaux…

— T'inquiète pas, elle les refuse la plupart du temps. Lavio fait un gâteau pour l'occasion et c'est bien la seule chose qu'elle accepte. Au pire, prend une plante, n'importe laquelle. Qu'elle soit en pot ou en forme de graines, ça la comblera plus que tout.

— Mmh. Okay. Tu m'envoies le récap par message ?

— Toujours.

Ils se turent, savourant ces quelques minutes arrachées au temps.


Lorsque Marine ouvrit les yeux, ce dimanche, elle se sentait épuisée.

Elle avait pourtant bien dormi ces derniers jours, avait eu son quota d'heure, n'avait rien fait de particulier, mais rien à faire, elle était épuisée.

Décidant que ce n'était pas grave, elle se leva et suivit sa routine quotidienne, faisant le tour de chaque plante pour en vérifier l'état et le niveau d'arrosage.

Sur son chemin, elle croisa Link avant son premier café, puis Lavio, occupé à nettoyer la niche de son petit oiseau blanc, celui-ci installé dans ses cheveux, poussant de petits sons heureux comme s'il répondait au monologue de son maître.

Si elle s'était contentée d'un salut de la main pour le premier, le second eut droit à une bise et Shiro à une caresse.

Certains étaient plus du matin que d'autres…

Satisfaite de son petit tour, elle alla se préparer puis rejoignit tout le monde à la table du petit-déjeuner. Enfin caféiné, Link l'attrapa par la taille et enfouit sa tête dans sa chevelure détaché, mâchonnant une salutation et menaçant de se rendormir dans la foulée.

Amusés par ses allures de gros nounours, Lavio et elle le manœuvrèrent jusqu'à sa chaise. Un nouveau mug de café lui fut collé dans la main et chacun put s'atteler au premier repas de la journée.

La conversation était légère, plutôt centrée sur ce qu'ils allaient faire aujourd'hui.

Préoccupée par un mal de tête naissant, elle ne releva pas les regards échangés entre les deux autres alors qu'ils donnaient un planning assez flou pour la journée.

Son état, par contre, ne leur échappa pas.

— Ça ne va pas ? Tu as les traits tirés, observa Link.

— Rien de grave, ça va passer.

— Mmh. L'armoire à pharmacie t'es ouverte, n'oublie pas.

— Oh, mais c'est pratiquement une demande en mariage, ça !

Elle renforça la taquinerie en lui pinçant la joue, ce qu'il avait en horreur, épaulée par Lavio qui roucoula sur le fait que leur petit ami était enfin devenu un grand garçon.

Malgré l'amusement, elle dut quitter rapidement leur compagnie, préférant s'allonger quelques minutes. Ça devrait passer, non ?


Quand elle s'était installée chez Link, elle avait été surprise de l'espace disponible dans cette antique longère. Il avait marmonné quelque chose au sujet d'une famille nombreuse mais avait coupé court à ses éventuelles questions en lui présentant ce qui allait devenir sa future serre.

Le petit sacripant avait parfaitement compris comment elle fonctionnait et elle s'était retrouvée très rapidement submergée de matériel, de graines ou de boutures avant même que l'idée ne germe dans son esprit.

La conversation que Link tentait de repousser de toutes ses forces finit quand même par survenir et il se calma enfin sur ses frénésies, la laissant chouchouter ses bébés plantes à son rythme.

Encore maintenant, ils se retrouvaient parfois pour en parler, lui ayant repris le verger familial, et échangeaient des astuces ou les dernières prévisions météorologiques, emmitouflés dans des plaids et sirotant une boisson chaude, ou étalés sur la pelouse extérieure, observant les étoiles s'illuminant une à une.

Ça lui manquait, parfois, leur vie d'avant. Avant que Lavio ne surgisse dans la vie de Link, puis dans la sienne. Avant qu'il ne s'installe avec eux.

Elle ne le regrettait pas, elle adorait Lavio et avait même été celle qui avait proposé la première qu'il les rejoigne.

Mais la vie était toujours différente quand on était deux, de quand on était trois. Et peut-être bientôt quatre ?

Penser à Ralph la fit sourire. Elle aurait bien ri, si elle l'avait pu, mais sa gorge la tiraillait, maintenant que le mal de tête était parti, alors elle préféra éviter.

Ils s'étaient peu rencontrés, mais elle avait été aussi conquise que l'avaient été les deux autres. Une fois, pour plaisanter, elle avait même dit qu'il devait être l'enfant que Lavio et elle n'auraient jamais, tellement il lui faisait penser à eux deux. Bien sûr, les réactions avaient été diverses, bien aidé par l'alcool consommé lors de cette soirée, mais elle n'avait pas pour autant renié l'idée, bien que Lavio était le seul dans la confidence, ricanant à chaque fois qu'ils en reparlaient.

Distraitement, elle passa la main sur son ventre alors que, de l'autre, elle arrosait un plant de Dahlia, lui souriant rêveusement.


— Ah, ça doit être Ralph.

Ignorant les singeries de Lavio dans son dos – bien que les bruits de baisers, eux, étaient parfaitement audibles – Link quitta rapidement la cuisine pour la cour avant, ouvrant le portillon avec attention afin de lui permettre de le passer, puis accueillit correctement Ralph, l'enlaçant et l'embrassant correctement.

— Je ne suis pas en retard ?

— Techniquement, il n'y a pas d'heure, donc tu es parfait. Marine ne se doute de rien, en plus. Rentrons.

Ils se firent discrets sur le chemin jusqu'à la cuisine où l'odeur inimitable du sucre chaud donnait un côté chaleureux, impression renforcée par l'accueil que donna Lavio à Ralph, lui sautant pratiquement au cou. Heureusement, Link veillait au grain, le rattrapant par les bretelles de son tablier.

— Pff, jaloux ! J'en étais tellement sûr ! Attends de voir le gain que je vais récolter auprès de Marine ! le menaça-t-il faussement.

— Tu es recouvert de chaque ingrédient que tu as utilisé pour le gâteau. Ce n'est pas de la jalousie, j'essaye juste de sauver la tenue de Ralph. Tout le monde n'apprécie pas de se faire recouvrir de farine.

C'était comique à voir. Link était légèrement plus petit qu'eux tous – particulièrement lorsque Marine et Ralph portaient des talons – et pourtant, il parvenait, d'une seule main, à soulever Lavio du sol, même si ce n'était que de quelques centimètres.

Si la bouffée de chaleur qui envahit Ralph à cette constatation fut ignorée par Link, ce n'était pas le cas de Lavio qui afficha ce fameux sourire de « celui qui sait » alors qu'il était reposé à terre, changeant aussitôt d'attitude.

— Oh, mon héros, toujours prêt à sauver la veuve et l'orphelin ! minauda-t-il.

— Seulement le pressing.

Il invita Ralph à s'asseoir avec eux pendant que Lavio continuait ses bêtises, répondant à chacune d'entre elles.

La rapidité avec laquelle il avait été accepté, que ce soit par Marine ou Lavio l'avait surpris. Ils l'avaient fait avec un naturel qui en paraissait suspect, mais il se contentait de l'apprécier, heureux de pouvoir partager ces moments du quotidien.

— Tu as rapporté quelque chose ? finit-il par lui demander.

Pour toute réponse, il attrapa le sac qu'il avait posé au sol un peu plus tôt, leur présentant la plante promise.

— Un oiseau du paradis ? Eh bien, tu ne fais pas les choses à moitié ! Siffla Link d'admiration.

Rougissant au compliment, Ralph joua avec les lanières du sac. Heureusement, il fut sauvé par l'intervention de Lavio.

— C'est un très beau cadeau que tu vas lui faire, elle va l'adorer !

La minuterie du four se fit entendre à ce moment-là, le signal qu'il fallait tout mettre en place, et vite !

Imitant Link à défaut d'avoir pris suffisamment ses marques pour prendre une initiative, il l'aida à mettre la table, dans la salle à manger pour l'occasion, accrochant quelque guirlandes festives, pendant que Lavio sortait le gâteau du four, attendant qu'il refroidisse suffisamment pour le couvrir du glaçage prévu et, enfin, de placer les décorations avec le « bon anniversaire » de circonstance.

Link fut envoyé chercher la demoiselle fêtée pendant que les deux autres rangèrent le bazar de la cuisine, lançant le lave-vaisselle avec les dernières preuves du méfait, avant de reprendre leurs places précédentes, chuchotant pour ne pas rater la descente du couple qui papotait sur un ton tranquille.

Évidemment, une fois arrivée dans la salle à manger, il n'y avait plus rien de secret, les décorations d'anniversaire existant dans cette maison bien avant la naissance de son actuel propriétaire, ressortie à chaque occasion.

Ralph et Lavio surgirent de la cuisine pour l'accueillir sur un strident « joyeux anniversaire » suffisamment dissonant pour en faire grincer les dents de Link qui les fusilla du regard pour l'occasion.

Bien tenté, mais ils le connaissaient tous assez pour reconnaitre la tendresse dans ses yeux alors qu'il se penchant pour embrasser la joue de Marine, une main reposant contre sa hanche.

— C'est vraiment mon anniversaire ? souffla celle-ci, les mains pressées contre sa bouche.

— Jour pour jour, Belle Marianne ! s'exclama Lavio. Et tu peux me faire confiance, les calculs, ça me connaît !

Il bomba le torse sous la vantardise mais s'arrêta bien vite alors qu'il dut réceptionner la demoiselle, celle-ci ayant décidé d'enlacer tout le monde, excitée par la surprise.

Elle sautillait pratiquement sur place quand le gâteau fut apporté, sous le regard attendri de Link qui le camoufla bien vite derrière un de ses airs renfrognés habituels, après que Lavio lui ait collé un coup de coude dans les flancs, amusé.

Pas qu'il n'appréciait pas de contempler les traits adoucis par les vraies humeurs au lieu de son éternel masque, mais il savait que Link se sentait plus que nu quand il s'en rendait compte, et ils aimaient tous bien trop Marine pour gâcher sa fête d'anniversaire avec une des crises de colère de leur compagnon.

— Oh, vous avez fait des folies, sanglota-t-elle devant les cadeaux et le gâteau.

Quand il s'agissait de cuisine, Lavio avait de l'or dans les mains. Ce n'était pas surprenant qu'il soit celui désigné pour les nourrir.

— Allez, souffle ! s'exclama-t-il, ravi.

Link rangea le briquet après avoir allumé une à une les vingt-neuf bougies, puis s'écarta, laissant la piste à la birthday girl.

Émue aux larmes, celle-ci prit plusieurs profondes inspirations pour se calmer avant de l'ultime, se penchant sur le gâteau…

Et éternua. Plusieurs fois.

Poussé par ses réflexes, Link l'attrapa par les épaules afin de l'éloigner des flammes, Lavio les attendait déjà avec des mouchoirs qu'il lui tendit et Ralph se mordit les doigts, tentant de repousser le fou rire qui menaçait de jaillir.

— Si on partait plutôt sur une compote d'anniversaire ? proposa le cuisinier par défaut, d'un ton faussement innocent.

Eh bien, c'était quand même pas mal festif, même sans les bougies.

Chapter 5: Organes détraqués (amygdales, rate, appendice, vésicule biliaire, etc)

Notes:

Alors, ça y est, on entre un peu dans le lore !

Je précise que malgré mes recherches, j'ai dû pas mal inventer, j'espère que ça reste cohérent malgré tout…

Ne leur en voulez pas non plus, ce sera expliqué plus tard ;)

Bonne lecture !

Chapter Text

La douleur s'était déclenchée sans prévenir, paraissant ravager tout sur son passage.

Link n'était pas étranger à la souffrance. Elle était une amie fidèle depuis bien des années, l'accompagnant jusqu'aux confins des chemins sombres de sa vie.

Mais chaque nouvelle douleur amenait avec elle tout son cortège et il fallait s'y habituer avant de pouvoir la traiter comme n'importe quelle autre. Il fallait la rencontrer, la comprendre, puis la traiter et apprendre à passer outre.

C'était ainsi que Link les gérait, les alignant une par une, comme une collection sur une étagère, frottant les tâches et époussetant l'éventuelle poussière qui s'y déposait, les passant en revue chaque matin.

Mais celle-là était nouvelle. Inconnue. Soudaine.

Son corps s'arque-bouta dans ses draps, s'y entortillant, jetant la literie au sol alors qu'un de ses nombreux combats débutait. Le genre dont personne ne pouvait en deviner l'issue.

Sa gorge fut rapidement à vif sous les cris qu'elle poussait mais il était incapable de s'entendre, comme si ses oreilles étaient bouchées.

— Je prends ses jambes !

— Link, chéri, tu vas te faire mal…

— Attrape ses bras !

— Je fais ce que je peux ! Même les anguilles sont moins fuyantes ! C'est bon, je les ai.

— On tente de le réveiller ?

— Ça n'a pas très bien marché, la dernière fois…

— T'as raison.

Aveuglé par le sommeil, Link continuait de se débattre, cherchant à se libérer, ne comprenant pas ce qui lui arrivait.

Heureusement pour Lavio et Marine, ce n'était pas leur premier rodéo et ils parvinrent à appeler les urgences malgré tout.


Ils n'avaient pas beaucoup dormi cette nuit, et c'était deux zombies qui avaient échoué dans la cuisine, luttant pour garder les paupières ouvertes. L'idée de retourner se coucher ne les effleura même pas alors que chacun fixait son portable déposé sur la table, anxieux à la moindre notification.

Mais, contre toute attente, ce fut celui de Link qui s'illumina le premier, les faisant sursauter.

Marine fut la plus rapide, décrochant au vol.

— Allô ? Ici le portable de Link Lon, il n'est pas disponible actuellement, débita-t-elle à tout vitesse.

— Marine ?

— Ah, salut Ralph ! Désolée, Link n'a pas son portable avec lui.

— Tout va bien ? Ta voix est bizarre.

— La nuit a été dure, on ne va pas te mentir.

Ils s'entre gardèrent à ces mots, clairement épuisés. Mais ils devaient tenir. De toute façon, l'angoisse les empêchait de se reposer correctement.

— … J'arrive.

Elle n'eut pas le temps de l'en empêcher alors qu'il raccrochait et il ne répondit pas à ses tentatives de le rappeler.

Ils n'eurent qu'à attendre la sonnette, et cette fois ce fut Lavio qui réagit le premier, allant ouvrir. Il revint avec Ralph, donc, qui alla s'asseoir sur la chaise habituelle de Link.

Il les observa, l'un après l'autre, les sourcils froncés.

— Que s'est-il passé ?

— Tout va bien, Ralph. Tu n'étais pas obligé de faire la route jusqu'ici. Tu as déjà mangé ?

Marine quitta la table à son tour, s'apprêtant à fouiller dans les placards, quand Ralph l'attrapa au vol, se relevant finalement.

— Je sais que je ne peux rien réclamer de vous, je ne suis pas à votre niveau, et tout ça. Mais j'ai aussi le droit d'être tenu au courant si Link a un problème. Et vu vos tronches de déterrés et son absence, c'est clairement le cas. Que s'est-il passé ?

Ils restèrent dans le silence, debout dans la cuisine, Lavio et Marine refusant de croiser le regard de qui que ce soit.

— Link, finit par lâcher Lavio, a fait une crise de douleur cette nuit. Il est actuellement à l'hôpital. Nous ignorons ce qu'il a, exactement, car il n'a pas repris conscience tout du long.

Il s'agrippa au dossier de sa chaise, comme d'une béquille, pour s'empêcher de s'écrouler.

— Nous sommes rentrés, il y a quoi ? Deux heures ?

Marine hocha timidement la tête, acquiesçant.

— Une crise de douleur ? répéta Ralph. Vous dîtes ça comme si ce n'était pas la première fois.

— Parce que c'est le cas.

Marine s'affaissa dans sa chaise plus qu'elle ne s'y assit, défaite.

— Il a des douleurs chroniques et beaucoup de problèmes de santé. Il n'aime pas en parler, c'est lié à un passé douloureux et pas mal de traumatismes. Donc non seulement une poignée d'élus est au courant, incluant ses différents médecins, mais surtout, nous en parlons très peu.

— Même nous, nous ne savons pas grand-chose, avoua Lavio. Marine et moi n'aimons pas trop en parler, surtout dans son dos. On se contente de le ramasser quand c'est nécessaire. Comme cette nuit.

Ses oreilles lui parurent bourdonner alors que Ralph traitait ce qui venait d'être dit.

— Et… qu'est-ce que vous avez l'intention de faire ?

— Rien. On attend.

Sonné, il les observa alors qu'ils reprenaient place autour de la table, aussi défaits qu'à son arrivée.

Ils n'avaient plus qu'à attendre.


C'était Ralph qui conduisait, cette fois.

Des trois, il était celui avec le plus d'heures de sommeil à son actif donc il ne les avait pas laissé refuser. Bien sûr, il devait être guidé, ne connaissant pas très bien le coin.

— L'hôpital militaire ? Mais pourquoi l'hôpital militaire ?

La ville où ils se trouvaient était d'une taille modeste et assez bien desservie. Mais, surtout, elle possédait deux hôpitaux, le civil et le militaire.

— Parce que Link est un ancien militaire. Ils ont tout son dossier et, surtout, ils savent exactement ce qu'il a traversé et les risques inhérents.

Marine froissait le tissu de sa jupe entre ses doigts nerveux, les yeux rivés sur l'horizon. Sa voix était morne, prenant à peine conscience de ce qu'elle racontait.

Derrière, Lavio était à peine mieux, renforçant la conviction de leur chauffeur.

Ils avaient eu un appel un peu plus tôt, les informant que « le maître Lon » avait repris connaissance et qu'ils avaient besoin de leur accord pour l'opération.

Respectant au mieux la limitation de vitesse, Ralph avait un milliard de questions se bousculant dans la cavité de son crâne mais il ne parvenait pas à choisir par laquelle commencer.

Alors, il se contenta de suivre les indications puis de se garer et enfin, de les suivre à travers les couloirs.

Bien qu'ils avaient demandé à l'accueil la direction à prendre, ils avaient l'air de savoir exactement où se rendre, comme s'ils s'étaient renseignés uniquement par politesse, marchant à grands pas au travers des couloirs.

— Madame Lon ?

— Elle-même.

Censurant un mouvement de surprise, Ralph décida de rester spectateur, observant le médecin s'entretenir avec Marine. Dans l'ensemble, il lui expliqua l'état de Link, la raison de sa crise, l'opération nécessaire et lui demandait de signer les papiers inhérents.

— Représentante légale ? Comment ça ? chuchota-t-il finalement à Lavio.

— Mmh ? Marine et Link sont mariés, devant la loi, lui expliqua-t-il. De fait, elle peut prendre les décisions quand il en est incapable.

La révélation le figea sur place, lui volant le souffle de ses poumons et les mots qu'il aurait bien voulu prononcer.

Marine et Link sont mariés.

Mais, alors, qu'étaient Lavio et lui ? Les acteurs d'une vilaine farce ?

Les poings serrés dans les poches, il les suivit alors qu'ils allaient s'échouer dans l'une de ces salles d'attente impersonnelles, les chaises grinçant sous leurs poids soudains.

— Alors ? lança Lavio, en direction de Marine.

— Techniquement, rien de grave, soupira-t-elle. Il a fait une appendicite. Mais c'est tellement le merdier avec toutes les cicatrices et ses traitements, qu'ils doivent être extrêmement prudents.

Elle leur tendit les formulaires qu'elle avait dû compléter.

— Une appendicite ? répéta son voisin. Eh bah, compte sur moi, je ne vais pas le lâcher à ce sujet.

— Vous m'épuisez déjà tous les deux, et Link n'a même pas encore été opéré…

Les laissant se chamailler, Ralph fixait ses chaussures, traitant encore les informations qu'il venait de recevoir.

Il se rendait compte à quel point il les connaissait si peu, finalement. Et, paradoxalement, Link moins qu'eux deux.

Est-ce que ça valait le coup de continuer ce qu'ils avaient ou valait-il mieux tout arrêter tant que rien de concret n'avait été réalisé ?

Il ne sortit de ses pensées que pour deux raisons. Marine s'était accroupie et appuyée sur ses genoux, la mettant en plein dans son champ de vision, et Lavio avait placé une main sur les siennes, lui permettant de se rendre compte qu'il avait repris ce vieux tic d'attaquer la peau de ses ongle, jusqu'au sang.

— Pardon, j'avais la tête ailleurs, vous disiez quelque chose ?

— L'opération est sensée être courte, mais comme Link va être dans le gaz un moment, on proposait d'aller à la cafétaria. Elle est très bonne.

Le sourire de Lavio était sûrement pour lui donner l'impression que tout allait bien, mais il eut l'effet contraire.

— Tu peux nous croire, personne n'a envie de le croiser à la sortie d'une anesthésie générale ! Il vaut mieux lui laisser le temps d'émerger complètement, rit-il.

Mais Ralph n'avait pas envie de rire. Il se leva, oui, les suivit à travers les couloirs, en effet, mais il n'ouvrit pas la bouche, les sourcils froncés. Il accepta le gobelet de café mais refusa les douceurs proposées, jouant avec sa boisson une fois assis.

— Alors… toi et Link… vous êtes mariés, finit-il par dire.

Coupés dans leur badinage, Marine et Lavio se tournèrent vers lui, d'abord surpris puis un peu coupable.

Évidemment, ce fut la concernée qui prit la parole, reposant son muffin sans y avoir touché.

— Exact. Aux yeux de la loi, nous sommes mariés.

— Lavio a dit la même chose. « Devant la loi ». Que faut-il comprendre ?

Ralph n'était même pas énervé ou en colère. Il était soudainement épuisé et il n'était pas sûr, finalement, de savoir pourquoi il s'acharnait à ce point sur ce détail. Ils étaient mariés, et alors ? Ni la loi ni la société n'allaient l'empêcher de continuer de voir Link, et encore moins avec la bénédiction de son épouse ou de son autre petit ami !

— Exactement ce que ça veut dire. Je porte son nom, nous avons un compte commun, un contrat de mariage et un testament chacun. Mais il n'y a pas d'amour derrière.

— Mais… tu l'aimes !

— Totalement, sourit-elle. Mais, tu as dû le comprendre, il y a des zones d'ombres dans nos passés.

Appuyant son coude sur la table, Lavio se tourna vers Ralph puis prit la parole :

— Elle l'a épousé pour le droit de résidence.

Bien que ses yeux brillaient d'amusement, il était clairement sérieux, ce n'était pas une blague. D'ailleurs, Marine leva les yeux au ciel mais hocha la tête.

— C'est assez cru et très résumé, mais c'est à peu près ça. Je n'ai pas envie d'expliquer les circonstances, et Lavio ne les connaît pas, mais en gros, je ne suis pas née ici. De fait, je n'avais pas droit de résider au-delà d'un certain temps. Link a proposé ce moyen, parmi d'autres. De plus, ça l'arrangeait. Tu t'en ais sans doute rendu compte, mais il est orphelin. Enfin, il a encore une sœur, mais ils ne sont pas très proches. Alors, quand des circonstances, comme celles d'aujourd'hui, réclame une deuxième personne en capacité de prendre toutes sortes de décisions… Et tu l'as sans doute aussi constaté, il n'a pas vraiment foi en grand-monde.

À ses côtés, Lavio compta exagérément sur ses doigts, dans le but évident de le faire rire. Au mieux, il lui arrache un micro sourire.

— Même le véto, il ne lui fait pas confiance, conclut-il en reprenant sa tasse de thé.

— Le véto ? Pour Shiro ?

Ralph se moquait un peu de la réponse, mais dans l'immédiat, il avait besoin de laisser tranquille ses neurones, le temps de traiter les informations.

— Shiro, c'est mon affaire. Non, c'est pour les animaux de la ferme en général ou pour notre couple de lapins. Qui ne sont pas destinés à finir dans nos assiettes ! le menaça-t-il faussement.

— … Attendez, la ferme ? Des lapins ?

Il prenait conscience qu'il n'avait pas tant vu de la maison que ça. Bien sûr, il le savait, mais à ce point… quoi d'autre ignorait-il à leur sujet ? Lavio était le héros déchu d'un royaume voisin ?

— Oui, ces deux crétins ont adopté un couple de lapins qui se trouvent être en fait deux pur mâles. Lavio en a ricané pendant des jours. Heureusement, Link l'a empêché de les nommer.

— Hé ! J'avais de très bonnes idées de prénoms, je te ferais savoir !

Marine le fixa jusqu'à ce qu'il abandonne et hausse les épaules, marmonnant dans sa barbe.

— Et, pour finir, la maison est une ancienne ferme. Link en a hérité quand il était plus jeune mais il l'a totalement investi en quittant la marine. Nous avons surtout des cocottes, des ruches et deux vaches. Rien de très grand, juste ce qu'il faut pour remplir la cuisine. Mais son activité est surtout centrée sur le verger.

Malgré lui, son expression trahie ne fut ratée par aucun d'eux et ils poussèrent un nouveau soupir.

— Ce n'est pas un manque de confiance en toi, Ralph. Si Link n'était pas sérieux à propos de vous deux, il ne t'aurait jamais parlé de nous. Ni même permis que nous nous rencontrions ou que nous passions du temps ensemble. Tu peux nous croire. Ou te faire ton propre avis.

Avisant l'heure, elle prévint que, normalement, ils devraient retrouver leur tête de pioche préférée dans sa chambre attitrée. Et se moquer de son état vaseux dû aux antidouleurs et l'anesthésie générale.

Lorsqu'ils y parvinrent, Ralph les laissa passer devant, s'engouffrer par la porte ouverte et se presser autour du lit du patient.

C'est en le voyant ainsi, allongé, vêtu de la blouse obligatoire, le visage lisse de ses rides d'expressions habituelles et la fatigue dans ses yeux si doux, subitement bien plus jeune que ce qu'il avait pu voir jusque-là, que Ralph se rendit compte de la violence de ses propres sentiments à son encontre.

Il n'avait même pas esquissé un geste pour effleurer ses larmes soudaines que Link tourna légèrement la tête en sa direction, agitant faiblement la main pour l'inciter à les rejoindre, sa bouche esquissant un faible sourire.

Il ne se fit pas prier et se précipita pour la saisir, cette main dénudée de tous bijoux, si petite dans la sienne, couverte de cicatrices diverses et un peu caleuse.

Le cœur serré, il la pressa contre ses lèvres, l'embrassant de toute la force de l'amour qu'il ressentait pour lui.

— Bonjour, Link, le salua-t-il, la gorge serrée.

Chapter 6: Étourdissements/Vertiges

Notes:

Les noms des lapins sont une référence à Sraksha (Tumblr).

Le saviez-vous ? "Lapin" a peu de synonyme ಥ_ಥ

Bonne lecture !

Chapter Text

— C'était juste une appendicite, grogna Link.

— Et c'est juste une canne. Ta canne, d'ailleurs, imbécile d'âne bâté.

Le concerné se contenta de grogner mais il en fallait plus pour faire plier Lavio, continuant de la lui forcer dans la main.

Ils avaient quitté l'hôpital le lendemain, une fois les derniers contrôles passés. Comme l'avait dit l'ancien militaire, ce n'était qu'une appendicite, mais son dossier médical était loin d'être lisse et le nombre de complications possible était élevé. Par excès de prudence, ils avaient préféré le garder au moins une nuit de plus en observation.

Une semaine plus tard, Link n'avait toujours retrouvé ni le sourire ni la bonne humeur, râlant jusqu'à plus soif.

Marine et Lavio étaient loin d'être stupides, ils le connaissaient depuis un moment, maintenant, leur crétin rien qu'à eux, et avaient compris que la raison réelle derrière cette façade était autant les mauvais souvenirs que le monde médical lui rappelait automatiquement que la réaction de Ralph après l'opération.

Aucun d'eux trois ne l'avait revu depuis ce moment, ni contacté. Ils avaient tous conscients – bien qu'à différents niveaux – que le jeune adulte avait reçu beaucoup d'informations ce jour-là et qu'il avait sûrement besoin de temps pour digérer tout cela et, sans doute, de décider quoi faire ensuite.

Évidemment, c'était loin de rendre leur vétéran moins irascible, mais personne, lui encore moins, n'avait l'intention de brusquer le roux.

À la place, Link tempêtait, râlait et se plaignait.

Bien sûr, ce n'était pas du matin au soir non plus, et c'était aussi loin d'être infondé, mais ça restait un bruit de fond. Au moins, ça leur permettait de savoir où se trouvait leur entêté chéri.

Actuellement, celui-ci était à moitié affalé sur Lavio, comme drapé autour de lui, alors que celui-ci tentait de glisser sa bonne vieille canne dans la main, luttant contre chaque doigt pour les décrocher et les refermer sur la poignée abimée.

— Alleeez !

— Noooon !

Mais peine perdue, Lavio était plus fourbe et retors que lui et Link dut poursuivre avec la canne accrochée à la main.

— J'te déteste.

— Mais oui, mais oui, balaya-t-il de la main. J'allais rendre visite à Pompon et Fluffle, tu m'accompagnes ?

— Pour la centième fois, nos lapins ne s'appellent pas Pompon et Fluffle ! C'est Sage et Ernak ! corrigea Link avec véhémence.

— Pompon et Fluffle, donc, qui vont se faire un petit plaisir d'aller s'égarer dans les marguerites… poursuivit-il comme s'il n'avait pas été interrompu.

— Tondu la semaine dernière, y'en a plus, objecta le convalescent.

— Grignoter des pommes…

— Ramassées et trop tôt dans la saison.

— Te grignoter les pieds jusqu'à la mort, menaça-t-il faussement, les mains sur les hanches.

— Ça, c'est possible, par contre.

Ils échangèrent un sourire amusé puis reprirent leur chemin, bras dessous, bras dessus, au rythme de la canne.

Comme l'avait expliqué Marine et Lavio à Ralph, lors de leur visite, l'ancienne ferme avait encore quelques bêtes. Le verger était accessible aux cocottes et les ruches se trouvaient au fond, permettant d'éviter aux vaches une rencontre malheureuse.

En général, la paire de lapins se mêlait aux volatiles ou profitait du soleil non loin de leurs abreuvoirs, se faufilant parfois dans le potager pour grignoter les légumes quand leurs gardiens ne les surveillaient pas d'assez près.

De vrais sales gosses.

— Pompon ! Fluffle ! les appela Lavio.

Grommelant, Link lui donna un léger coup de canne à l'arrière des mollets, n'aimant définitivement pas les surnoms pourris que son petit ami s'entêtait à leur donner.

Les lapins gambadèrent jusqu'à eux, curieux de ce que ces deux bipèdes avaient pu leur apporter, mais s'en désintéressèrent bien vite quand ils comprirent qu'ils ne possédaient aucune nourriture.

— Boules de poils ingrates, les gronda-t-il faussement.

Il s'était avancé de quelques pas pour les accueillir et dut donc se retourner pour faire face à son compagnon et le prendre pour témoin.

— Je n'arrive pas à croire que nos enfants nous snobent ainsi ! Nous les avons aimé, nourri, logé…

— Lavio, ils ne sont pas nos enfants. Ce sont des lapins.

L'air horrifié, il se précipita auprès des deux animaux, agissant comme s'il tentait de leur boucher les oreilles, fixant Link avec une grimace bien trop dramatique pour être prise au sérieux.

— Comment oses-tu ! Fluffle et Pompon sont les enfants issus de notre amour !

— Ce sont des lapins.

— Tu es bien un butor ! Oh, mes pauvres petits, papa est là, il ne laissera pas cet affreux personnage vous faire du mal…

Link se passa une main sur le visage alors que Lavio parlait aux deux lapins avec une voix douce, comme s'ils étaient vraiment des enfants issus de l'un de leurs peuples.

Bien sûr, son partenaire était absolument adorable et jamais il ne lui viendrait à l'esprit de le lui reprocher, traitant chaque animal sur ses terres avec bien plus de délicatesse qu'avec les crétins peuplant la planète. Mais son obsession pour les lapins était parfois… difficile à juguler.

Ils les avaient trouvé à la SPA de la ville, un petit couple dans un état dramatique, craintif et malade. Lavio avait démarré les démarches pour les accueillir, sans même y réfléchir à deux fois, et ça avait été à lui, Link, de gérer l'aspect pratique comme le logement, la nourriture ou tout simplement un vétérinaire pouvant prodiguer les soins nécessaires, soit pour les guérir, soit pour alléger leurs douleurs.

Heureusement, ils avaient rapidement pris du poil de la bête et s'étaient tellement plu dans leur nouveau territoire qu'ils agissaient comme pratiquement tout le petit monde animal de l'ancienne ferme. Comme des foutus princes privilégiés qui décidaient quand ils pouvaient leur donner l'insigne honneur de les caresser.

Foutues bestioles trop adorables.

Son équilibre devenant légèrement instable, Link décida de s'asseoir à son tour dans l'herbe, allongeant la canne dans l'herbe. Ses articulations douloureuses lui firent lâcher un grognement et un soupir, juste assez pour alerter Lavio mais pas assez pour lui faire lâcher Sage, celui-ci très occupé à mâchonner la rondelle de banane donnée un peu plus tôt.

Par petits sauts prudents, Ernak vint le renifler, à la recherche de friandises, lui aussi.

Prévoyants – et totalement à la merci de leur affection – les deux amants avaient préparé le nécessaire et il ne fallut pas longtemps à Link pour s'emparer d'une tige de céleri qui fut accueilli par le grincement caractéristique de ses petites dents avant qu'elles ne s'enfoncent dans la plante.

Ils passèrent plusieurs minutes à gâter les deux lapins, partageant les légumes et les fruits sélectionnés spécialement pour eux avant de les quitter, reprenant leur tour, à pas lents.

C'était plus une excuse pour prendre l'air que pour vraiment vérifier les installations, ils le savaient tous les deux (même Marine le savait), mais aucun des deux ne prit la peine de le faire remarquer, allant saluer chaque vie animale qu'il croisait, rajustant l'eau et la nourriture si besoin.

— Dis, tu as déjà pensé à agrandir ?

Allongés sur la pente douce menant au verger, ils profitaient des rayons chauds du soleil, Link appuyant l'arrière de son crâne contre ses bras croisés, Lavio étalé en mode étoile de mer. C'était ce dernier qui avait posé la question, sans bouger d'un poil.

Link, lui, rouvrit les yeux pour le fixer le temps de sa réflexion, avant de plisser le nez et de clore à nouveau les paupières.

— Quand j'étais tout petit, sans doute. Mes grands-parents avaient dû réduire l'activité dû à leur âge, et le départ des chevaux et des cochons avait été un bouleversement. J'en avais fait des cauchemars pendant des nuits, persuadé que je serais le prochain.

La confession avait été énoncé sans émotion mais Lavio était loin d'être dupe, aussi il attrapa son coude à l'aveuglette, le serrant pour lui témoigner son soutien sans bouger d'un poil.

— Puis, ça a été la vente des terres, pour les même raisons, mais aussi pour payer les factures, les médicaments, mes études…

Son ton était toujours aussi plat, aussi vide. Link avait appris à réduire à néant ses émotions pour être plus efficace et réagir rapidement, tel un robot.

Au contact de Marine, puis de Lavio, mais surtout suite à son retour à la vie civile, il avait lentement réalisé le chemin inverse, accueillant chacune d'elle avec curiosité et crainte, tel un enfant en bas-âge.

C'était douloureux de voir ce trentenaire si fragile face à des choses aussi évidentes et élémentaires.

— Et maintenant ? le relança-t-il.

— Non. Peut-être un nouveau terrain pour permettre à Adélaïde et Aglaé d'avoir plus d'espace, mais rien de sûr. De toute façon, les promoteurs se sont jetés dessus il y a bien longtemps, les prix doivent être astronomiques.

— Pas si sûr, on reste loin de la ville et son centre, malgré le voisinage il y a toujours un côté « campagne » qui fait fuir les citadins les plus endurcis. Et il est interdit de construire sur des terrains agricoles, en principe.

— Comme si ç'avait suffi à faire peur à ces connards…

Disparu le ton vide pour une étincelle de rage mordante alors que Link se remémorait les courtiers se succédant, à l'époque, pour pousser ses grands-parents – sa seule famille, avec sa sœur – à brader l'héritage familial, qu'ils parvenaient à revendre pour le double du prix, ou plus encore, parvenant par un tour de passe-passe à en modifier la dénomination.

Identifiant la colère commençant doucement à bouillir à ces souvenirs, Lavio décida qu'il était temps de rentrer. Il se releva doucement, époussetant sa tenue au passage, imité par Link. Celui-ci allait se pencher de nouveau pour récupérer sa canne, mais il avait été trop rapide et le vertige ne prit pas le temps de s'annoncer, le brimbalant de la tête aux pieds avec une telle force qu'il ne parvint pas à assurer son assiette à temps, l'envoyant rouler au bas de la pente.

Tout avait été si rapide que Lavio ne put lui venir en aide et se contenta d'observer sa chute avant de seulement comprendre ce qu'il se passait et de lui venir en aide, se précipitant à ses côtés.

— Link ! Qu'est-ce qu'il vient de se passer ? As-tu besoin de soin ?

Paniqué, il finit par trébucher à son tour et rouler dans l'herbe, manquant de peu de lui tomber dessus.

Endolori et la vision un peu floue, le lolien prit tout juste le temps de vérifier qu'il allait bien, avant de marcher à quatre pattes auprès de son compagnon, tentant de vérifier son état.

— Link ? Link ? Réponds-moi !

— Secoue-moi encore une fois et je te dégueule dessus… gronda le concerné.

Sagement, Lavio se recula pendant que Link se redressait péniblement, hoquetant à plusieurs reprises avant de réussir à se stabiliser, la tête baissée alors qu'il appuyait la paume de ses mains contre ses yeux comme s'il voulait les enfoncer dans son cerveau. Ce n'était pas la meilleure méthode pour soulager la nausée mais face à la douleur irradiant dans son crâne, ça lui en donnait l'illusion.

— Que s'est-il passé ? C'est ton genou ?

— Non, c'est pas mon connard de genou, c'est moi, qui me suis levé trop vite comme un crétin pour finir par me viander comme un abruti et maintenant j'ai la gerbe et un mal de crâne comme si j'avais utilisé ma putain de tête pour emboutir une foutue porte.

— Bon, au moins, tu es capable de te souvenir de ce qui s'est passé et de parler, énuméra Lavio, levant deux doigts avant d'agiter son autre main devant ses yeux. Combien j'ai de doigts ?

— Zéro si tu continues.

Loin de s'en offusquer, Lavio le fixa, l'air suffisamment sérieux pour obtenir une réponse du bout des lèvres, le satisfaisant.

Aussitôt, il se releva sur les genoux et entreprit d'aller dans son dos, écartant les mèches blondes et roses.

— Je peux savoir ce que tu fous ?

— Je vérifie ta couleur, voyons ! répliqua-t-il, sarcastique. Mais non, je m'assure que tu n'ais pas été blessé. Mais tu peux aussi refaire ta couleur, ça lui fera du bien. Allez, debout !

Ils prirent mutuellement appui l'un sur l'autre, en plus de la canne, époussetant leurs tenues, puis rentrèrent d'un pas lent.

— C'est toi qui l'annonces à Marine, chantonna Lavio.

— Des clous ! C'est ton tour !

— Tut tut ! C'était moi la semaine dernière, c'est ton tour !

Finalement, ce n'était plus à pas lents mais en courant qu'ils rentrèrent dans l'ancien bâtiment, Link poursuivant Lavio en agitant la canne en le menaçant, pendant que son compagnon avait bien du mal à garder de la distance, plié de rire.

Chapter 7: Hoodie emprunté

Notes:

J'ai récemment rejoint un serveur d'écriture, grâce à l'invitation d'Asrial, et j'ai obtenu dessus une formule magique qui m'a débloqué sur plusieurs fics, donc, non, vous ne rêvez pas, les mises à jour reviennent !

J'ai juste un peu peur de recommencer à faire du hors-sujet ^^'

Chapter Text

Le petit polycule ne faisait pas vraiment partie des gens capables de se fondre dans la masse, que ce soit de par leurs caractères haut en couleur ou leurs tenues, toutes aussi hautes en couleur.

Marine aimait agrémenter ses beaux cheveux ondulés de fleurs qu'elle cueillait parmi ses bébés plantes, les accordant à ses tenues rappelant les peuples vivant de la mer. Elle avait des tenues plus classiques, du genre qu'on pouvait voir sur le dos de n'importe qui en ville, mais elle confectionnait elle-même les pièces qui lui manquaient, associant toujours plus de couleurs vives, sans qu'aucune ne jure avec les autres. Le tout allait à la perfection avec sa peau hâlée et sa chevelure rousse.

Link, lui, n'avait rien de lui qui hurlait « militaire » dans son apparence. Bien sûr, les cicatrices des blessures qu'il avait récolté durant sa carrière pouvaient être visibles selon son look du jour, mais c'était rare que les civils l'associent à un fait d'armes dû à sa silhouette. Link faisait penser à un cyprès. Pas très grand pour son âge, mince presque maigre, avec des articulations aussi noueuses qu'un tronc, mais avec cette raideur dans les épaules et dans le dos qui trahissaient les heures à se tenir au garde-à-vous. Mais les gens s'arrêtaient plutôt aux mèches roses agrémentant la chevelure blonde, les éventuels piercings dont il se parait parfois, les autres bijoux qu'il multipliait aux bras, au cou, aux doigts… Lui aussi affichait des couleurs vives et flashy, portant aussi bien la jupe que Marine et ne prêtant que peu d'attention aux codes de genre.

Et, enfin, Lavio qui, en comparaison, paraissait presque sage. Presque. Sa garde-robe possédait toutes les palettes de violet, lilas, parme, mauve… Les références aux lapins allaient des plus évidentes (oreilles, dents, broderies, dessins…) aux plus imperceptibles (un pompon discret à l'arrière d'un sweat, des petites silhouettes cachées derrière d'autres motifs…). Bien sûr, il avait d'autres couleurs ou d'autres thèmes, mais la majorité tombait dans cette catégorie. Il aimait se perdre dans des tailles plus larges que la sienne, exagérant sa silhouette assez frêle au milieu de tous ces tissus épais.

Ils avaient chacun leur style, et pourtant, il n'était pas rare de trouver un sweat violet dans le placard de Marine. Un châle multicolore sur les épaules de Link. Des bijoux cabalistiques parant Lavio.

C'était quelque chose qui s'est faite très naturellement. Un emprunt avec permission. Une erreur de tri de linges propres. Un emprunt sans permission puis oublié. Un oubli dans une pièce. Un travail de raccommodage ou de personnalisation.

Ils avaient chacun leurs chambres, leurs espaces à eux.

Et c'était pour ça qu'ils étaient tous les trois dans le salon, devant la télé allumée, emmitouflés chacun dans sa propre couverture.

Le mauvais temps des derniers jours avait eu raison de chacun d'entre eux. Link avait dû limiter ses mouvements suite aux douleurs ravivées par l'humidité et ses articulations gonflées. Marine dormait mal, de mauvais souvenirs lui remontant en mémoire troublant son sommeil et la laissait tremblante au réveil. Lavio, lui, n'avait que ses cheveux frisottant à se plaindre, mais c'était surtout l'humeur de Shiro qui le contaminait, celui-ci n'aimant pas lutter contre les éléments et détestant encore plus rester confiné à l'intérieur, malgré tout le luxe et le confort que le lolien lui avait mis à disposition.

La pièce était parfumée du célèbre thé à la menthe de Lavio (recette secrète qu'il refusait de partager), alors qu'ils étaient plongés dans leur marathon de films-stupides-spécial-jour-de-pluie, commentant parfois à voix haute.

Ce fut lors du changement de DVD que Link réunit assez de courage pour prendre la parole. Marine revenait des toilettes et Lavio apportait le popcorn (Link devait réaliser le moins de déplacements possible dans son état).

Les mains enroulées autour de son mug quasiment vide d'un thé devenu tiède, perdu dans un sweat oversize à la capuche rabattue sur ses cheveux blonds, les fausses oreilles pendouillant tristement de part et d'autre de son visage, les jambes pliées sous lui couvertes d'une des nombreuses couvertures réalisées par Marine, Link faisait peine à voir. Enfin, il était aussi terriblement mignon et hors de son personnage.

— Dîtes… commença-t-il.

Sa voix avait été à peine un murmure mais il avait suffi à attirer leur attention, ce qui était autant le but recherché que détesté.

Soupirant, Link se pencha, posant le mug sur la table basse et gesticulant pour être plus à l'aise.

— Je crois qu'on a besoin de… parler. Des derniers jours. De… de Ralph.

Il garda le regard fixé sur ses mains alors qu'il jouait avec ses doigts, ceux-ci débarrassés de tout bijou dans le but d'éviter de répéter des situations précédentes liées à ses articulations gonflées.

Marine et Lavio se dépêchèrent de reprendre leurs places précédentes, fébriles.

Des potins ? C'était l'heure des potins ? Des potins, ouais !

Régnant sur leurs nerfs de leur mieux pour ne rien paraître, ils se tournèrent vers leur petit-ami, tout ouïe.

À des lieues de leur enthousiasme, Link eut ce tressautement d'oreilles qu'il avait à chaque fois qu'il se sentait nerveux, raison pour laquelle il avait été vite surnommé « p'tit lapin » par ses frères d'armes. Eux le trouvaient affreusement adorable. C'était aussi la preuve d'à quel point Link était vulnérable en cet instant, se permettant cette fragilité apparente parce qu'il leur faisait confiance plus qu'en n'importe qui d'autre, mais aussi parce qu'il se savait en sécurité entre ces murs familiers.

— Donc, Ralph… reprit-il après s'être raclé la gorge. Nous en avons déjà parlé au tout début, quand nous ne nous parlions qu'à travers l'appli, puis avant notre premier rendez-vous. Mais, nous n'en avons pas vraiment reparlé, depuis. Et, eum, et…

— Tu veux parler de l'autre fois, à l'hôpital ? devina Lavio.

Marine le fusilla du regard, craignant que son intervention ne renferme aussitôt Link, mais il n'en fut rien et il le remercia plutôt d'un sourire.

— Oui, entre autre… Disons que c'est ce qui m'a décidé à y réfléchir à nouveau.

— Tu veux rompre ?

Lavio lui jeta un regard en coin alors qu'il portait son mug à ses lèvres, curieux de la réponse.

— Non ! Enfin, ce n'est pas une décision que je peux prendre tout seul, mais… Je sais que je le montre rarement, et je le dis encore moins mais, vous savez que je vous aime les gars ?

L'oreille pelucheuse était devenue la cible de ses mains qui la tordait anxieusement. Son réel propriétaire mordit une grimace, autant touché par l'apparence mignonne de la scène que par la possibilité que son vieux sweat se retrouve privé d'une oreille.

— Ah, Link, soupira bruyamment Marine.

S'extirpant de son cocon personnel, elle s'assit à ses côtés, l'attirant d'autorité tout contre elle pendant qu'elle réarrangeait les couvertures pour éviter de prendre froid. Lavio l'imita avec un train de retard, ayant pratiquement fait un nœud avec les siennes, se pressant contre le flanc vide, sans poser son mug un seul instant.

— Nous aussi on t'aime, grand crétin, rit-il en retirant la pauvre oreille hors de sa portée. Un peu moins quand tu tentes de décapiter mes fringues, mais bon, il faut bien te trouver des défauts, avec ce corps d'Apollon !

Lavio ne fut sauvé que par la présence de son fameux thé, faisant changer d'avis Link sur la riposte à suivre. Il se contenta de lui tirer vaguement la pointe de l'oreille, l'air blasé de sa comédie.

— Pour en revenir, à Ralph, nous te l'avons déjà dit. Nous l'aimons bien, il a l'air de nous apprécier. Certes, peut-être que son avis a évolué depuis ton opération, car il s'est un peu fait rouler dessus par un camion de nouvelles informations assez importantes, tel notre union à toi et moi, mais c'est un garçon solide.

— Il ne m'a pas recontacté depuis, murmura l'ancien militaire. Rien. Pas un SMS, pas un appel.

— Et toi ? Tu l'as appelé ? Tu lui as envoyé un message ?

— Oui ! se défendit-il.

— Risque-t-il de porter plainte pour harcèlement ? s'enquit Lavio.

— Quoi ? Non ! Et c'est arrivé une seule fois ! Et on avait dit qu'on n'en parlerait plus !

Mais qu'il regarde sur sa gauche ou sur sa droite, aussi bien Marine que Lavio le fixait avec la même expression. Un regard blasé et un sourcil légèrement arqué.

— J'vous déteste, marmonna-t-il en s'enfouissant un peu plus sous sa couverture.

— Mais oui, mais oui.

Marine lui tapota le crâne en souriant.

— Pour en revenir à Ralph, recentra Lavio, tu devrais peut-être lui laisser le temps.

— Ça fait deux semaines.

— Tout le monde ne digère pas de la même manière. Soit il reviendra une fois que ça ira mieux…

— Soit il ne reviendra pas du tout. J'avais compris, merci.

Son ton amer fit échanger à ses compagnons une grimace avant qu'ils ne l'enlacent de plus près, croisant leurs bras dans son dos.

— Ne soit pas aussi dramatique, chéri, souffla la jeune femme. Il y a une chance, elle existe, alors saisis-la et crois en ta bonne étoile, d'accord ?

Elle pressa un baiser contre sa joue, caressant les mèches folâtres hors de son visage.

En temps normal, il lui aurait balancé une réplique sur un ton acerbe, mais à la place, il s'appuya un peu plus contre elle, le regard perdu dans le menu du lecteur DVD, ratant le regard préoccupé qu'ils échangèrent.

Peu importait ce qu'avait prévu Ralph, ils allaient devoir organiser une petite visite pour clarifier la situation. Et, si nécessaire, protéger Link des conséquences d'une rupture.

Cette potentialité les fit se presser un peu plus les uns contre les autres, à la recherche inconsciente d'un peu de réconfort.

Finalement, personne ne quitta le canapé, le DVD restant abandonné sur la table basse avec la théière refroidissant lentement, le seul son audible étant celui de leurs respirations.

Puis, l'espace d'une poignée de secondes, des reniflements. Et, enfin, des pleurs. Des sanglots lourds, une respiration hachée confinant à la crise d'angoisse et des hoquets.

Et, tellement, tellement, tellement de regrets…

Chapter 8: "Le docteur le plus proche est probablement à des heures d'ici !"

Notes:

Arrivé à plus de 1660 mots. « L'intrigue ! Il faut mettre en place l'intrigue ! »

En me relisant, je me suis rendue compte qu'entre les chapitres 3 et 4, j'ai changé l'origin story de Marine… Bordel. La joie du direct !

Finalement, même si l'utilisation de 4thewords (le site dont je parlais la dernière fois) est très pratique pour me débloquer, je ne vais plus l'utiliser pour cette fic car j'ai tendance à perdre un peu pied, et je risque de briser la continuité, ce qui n'est pas un problème pour Sicktember 2023 ou Year of the OTP, qui sont plus indépendants.

Et si je vous en parle, c'est parce que ça aura une conséquence sur les sorties. Il se peut que je prenne du retard, toutes mes excuses !

Bonne lecture !

Chapter Text

Plusieurs semaines après la fameuse appendicite, Link et Ralph avaient repris contact et tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Tout allait tellement pour le mieux dans le meilleur des mondes au point que nos deux tourtereaux avaient décidé de s'offrir un peu de temps, rien que tous les deux.

Et pour se faire, ils avaient opté pour une petite randonnée avec camping à la clé. Non seulement ils pourront se détendre, loin de l'oppression de la ville, mais en plus ils ne seront que tous les deux, sans avoir à craindre d'être espionné – même amicalement – par Lavio et Marine.

Link pourra aussi être un peu plus lui-même, même s'ile ne l'avouerait jamais.

Ralph, comme lui, n'était pas ignorant des excursions en pleine nature et n'avait donc eu besoin que de peu de conseils pour préparer ses affaires. Ils avaient tout de même passé tout en revue, car il valait mieux être sûr que désolé.

Bien sûr, Link avait eu droit à sa part de taquineries de la part de ses deux partenaires qui appréciaient le charrier sur leur escapade en amoureux, en retrait de la civilisation. Lavio leur avait d'ailleurs hurlé de faire plein de bébés, tant qu'ils y étaient, alors qu'ils chargeaient la voiture. Et, évidemment, il avait bien choisi son moment, nombre de passants et de voisins tournant leurs têtes curieuses en direction des deux concernés.

L'ancien militaire avait eu besoin d'une bonne partie de trajet pour que ses oreilles reprennent leurs couleurs normales, râlant dans son souffle sur ce qu'il comptait faire à son petit ami à son retour, à l'amusement de Ralph.

Lui-même ne s'était pas senti extrêmement à l'aise après le claironnement de Lavio, mais ce n'était pas comme s'il connaissait tous ces gens, il n'avait pas (encore) à vivre avec eux, donc son embarras fut plus rapide à se disperser. Et Link pestant comme un chat en colère était si amusant !

Même s'il ignorait où se trouvait exactement là où Link avait choisi qu'ils allaient passer leur week-end, c'était Ralph qui était au volant, suivant les directions qu'il lui donnait. C'était sa voiture, après tout, Link ayant préféré laisser la sienne sur place, au cas où Marine ou Lavio en aient besoin, bien que ce dernier ait déjà la sienne. La route se fit dans une ambiance détendue, la radio mise en sourdine, alors qu'ils échangeaient des plaisanteries ou des anecdotes.

Ils se garèrent quelques heures plus tard au parking de la réserve naturelle, allant saluer les gardes forestiers et remplir les formulaires nécessaires à leur séjour sur place, puis ils étaient partis, leurs sacs sur le dos.

Le premier objectif était de rejoindre une aire prévue pour le campement et de s'y installer.

Il n'était pas très tard et le soleil ne se couchera pas avant plusieurs heures, mais il valait mieux s'y atteler au plus tôt, il sera ainsi plus simple de s'organiser ensuite !

Ils furent ravis de s'apercevoir que l'autre était capable de tenir le rythme de marche et l'ambiance détendue se poursuivit pour le reste de la journée.

Link comme Ralph étaient des adultes qui savaient ce qu'ils voulaient et qui savaient quand dire stop. Ni l'un ni l'autre n'avait l'intention de jour les damoiseaux en détresse pour provoquer un rapprochement ou un truc débile dans le genre. Attraper la main libre devant lui ne demandait qu'un mouvement de bras et apportait systématiquement un sourire heureux.

Après s'être décidé sur le terrain exact où ils voulaient monter la tente, il n'y eut plus qu'à la monter, sous les directions de Link à qui elle appartenait. Évidemment, ce ne fut pas sans anicroche, mais qui pouvait se targuer d'en être capable sans le moindre remous ?

— Elle est grande ! siffla Ralph, une fois leur tâche achevée.

— Elle est pour quatre personnes, expliqua son propriétaire. Et attends de voir comment Lavio dort, tu seras moins surpris.

Sans élaborer plus, il avança dans leur abri, après avoir retiré ses chaussures, et installa son sac de couchage, rangeant tout ce qui pourrait lui être inutile pour les heures restantes.

Ralph l'imita une fois sa contemplation achevée.

C'était un peu ridicule, tous les deux avec autant d'espace, mais ils n'allaient pas s'en plaindre !

Un peu hésitant, il allongea son sac de couchage auprès de celui de Link mais ce dernier ne dit rien alors il estima que ça devrait être bon. Au pire, ils verront à l'heure du coucher.

— Tu viens souvent ici ? lui demanda Ralph.

Ils remettaient leurs chaussures, maintenant soulagés de leurs lourds sacs à dos, s'apprêtant à explorer les environs.

— Souvent, pas vraiment. Mais j'y venais avec ma famille, plus jeune. Et on y a effectué des exercices, avant.

Maintenant qu'il était au courant, Link hésitait moins à aborder son passé, bien qu'il évitait autant que possible de nommer correctement sa carrière. Mais « avant », c'était déjà un énorme pas en avant.

— Me voilà bien plus rassuré ! soupira-t-il bruyamment. Je n'ai jamais mis les pieds ici, pour ma part, donc je me repose complètement sur toi !

— Si c'est un message pour cette nuit, je te préviens, je te fous par terre ! le menaça-t-il.

— Non, t'inquiète pas pour ça, ce n'est pas dans mes habitudes de sommeil !

Et c'est riant qu'il lui emboîta le pas.

Ils n'étaient pas là pour une compétition et le rythme fut moins soutenu. À la demande de Ralph, Link lui indiqua l'essence de certains arbres ou les animaux qu'il était capable de repérer. Ce n'était pas qu'il avait un intérêt réel pour la chose, mais bien plus pour sa voix et son ton paisible et concentré. La main dans la sienne qui se resserrait à chaque animal vu, tel un sursaut de sa part.

Bien sûr, ils croisèrent d'autres promeneurs, d'autres campeurs, se saluant d'un geste de la main ou d'un sourire. Les vraies randonnées seront pour demain, à la recherche d'endroits plus isolés, avec de vraies épreuves !

Lorsqu'ils revinrent à la tente, des feux avaient déjà été allumés et l'odeur de cuisine volait un peu partout, offrant un mélange… assez surprenant.

De leur côté, ils n'avaient pas cherché à être de grands gourmets, choisissant des mets plutôt basiques. Lavio avait préparé le nécessaire pour le diner, ayant un peu pitié de Link et ses capacités culinaires… limitées. Et plus encore de Ralph qui n'avait pas mérité une telle expérience. Pour ce soir, ce sera dont le plat qu'il leur avait préparé, mais après ce sera à eux de se débrouiller avec leurs ingrédients. Et rien ne leur empêchait de faire quelques entorses au menu prévu, l'égayant de quelques friandises.

Hé ! Les chamallow grillés au feu de bois, c'était presque une tradition de camping !

L'ambiance chaleureuse incita les campeurs à s'interpeler, comme s'ils se connaissaient tous et ils finirent par se rejoindre autour des feux qui n'étaient pas les leur, discutant avec une familiarité qu'ils ne montreraient sûrement jamais en-dehors de ce moment. C'était ça, la vraie expérience du camping.

Lorsque le couple décida d'aller se coucher, il eut à saluer tout le monde, enfin, tous ceux encore debout, avant de pouvoir tirer la fermeture éclair derrière lui.

— Okay, la tente pour quatre, c'était une idée de génie, bailla Ralph.

Il tâtonnait à la recherche de ses affaires, l'esprit brumeux.

La fatigue pesait sur lui mais il lui restait encore assez d'énergies pour se changer.

— De génie, peut-être pas, mais j'ai suffisamment dû partager la mienne avec trop de gars pour apprécier un peu d'espace, ricana Link de son coin.

La lampe torche qu'ils avaient posé sur le tapis de sol pour avoir un peu de lumière éclairait un peu l'obscurité dans laquelle ils étaient plongés. Le plus difficile était d'éviter les ombres chinoises qui pourraient être un peu trop suggestives pour leur éventuel public à l'extérieur. Pas qu'ils avaient particulièrement l'intention d'être trop sage ou, au contrairement très débridé, une fois éteinte, mais ce n'était pas pour autant qu'ils souhaitaient le partager avec qui que ce soit d'autre qu'eux deux.

Ralph se permit un regard par en-dessous alors que Link se penchait sur son sac, lui offrant un vision de son dos nu.

Ils n'avaient rien fait de très osé depuis leur premier rendez-vous, même si c'était loin d'être la première fois où ils allaient dormir ensemble, Link étant resté quelques nuits dans son appartement, mais ce n'était pas pareil.

Il y avait comme une intimité différente, à être tous les deux sous la toile de la tente, éclairés par une torche un peu faible, encerclés par la nature – et d'autres gens, à ne pas oublier.

Troublé malgré lui, il observa la peau offerte, ses yeux glissant le long des cicatrices plus ou moins effacées, les tatouages, les taches de son recouvrant les épaules, d'autres marques diverses…

Lorsque le T-shirt qu'enfila Link les recouvrit, il fut comme arraché de ses pensées et se rendit compte de ce qu'il venait faire. Un peu honteux, il se dépêcha de terminer de se préparer puis de glisser dans son couchage, fébrile.

Le retour soudain de l'obscurité arriva et Link s'allongea à son tour.

Au début, ils ne dirent rien, chacun fixant la toile au-dessus d'eux, dans un silence légèrement tendu.

Puis, une des personnes dehors avait dû sortir une guitare ou n'importe quel autre instrument, car quelques notes s'élevèrent et, comme par enchantement, ils se détendirent.

Ralph roula sur le côté, faisant face à Link qui l'imita avec un petit train de retard.

— Tu es bien installé ? chuchota-t-il.

— Oui ! Enfin, je crois. C'est pas vraiment une première, murmura Ralph, mais ça remonte à un moment. Tu me réveilles si un grizzly nous rend visite ?

— Rigole pas avec ça, va…

Il tendit le bras et ébouriffa rapidement les mèches rousses, tirant une plainte de leur propriétaire.

— Hé ! Touche à tes cheveux à toi !

À l'aveuglette, il tenta de rendre la politesse à Link, mais soit celui-ci était vraiment plus petit que lui, soit il avait été capable de voir le coup à l'avance et de l'esquiver.

Mouais, sûrement la deuxième solution.

Ils se battirent comme deux enfants pendant quelques minutes, avant de s'enlacer à bout de souffles et ricanant de leurs bêtises, s'endormant ainsi, le sourire aux lèvres.


Le réveil avait pratiquement été à l'aube, ce qui avait été un peu difficile pour Ralph qui n'avait jamais vraiment été très ami avec le concept de se lever tôt.

Heureusement, ce n'était pas le cas de Link qui s'y attendait et géra un peu tout, attendant que son petit ami parvienne à complètement mettre en marche ses neurones.

Lorsque la nature lui présenta de nouvelles couleurs, ça lui mit un peu de baume au cœur. Après tout, tant que ses muscles étaient d'attaque, ce n'était pas bien grave s'il n'avait pas encore totalement les yeux en face des trous, non ?

Link ouvrait la voie, vérifiant régulièrement que Ralph le suivait, l'aidant dans les parties difficiles.

Ce n'était pas comme hier, ils le sentaient clairement, l'heure étant plus à l'effort. Ils pourront deviser tranquillement un peu plus tard, une fois le plus gros de la montée derrière eux, quand le soleil aura lui-même fini sa grasse matinée.

La prudence de l'ancien militaire était un peu excessive, mais son ami ne voyait pas trop l'intérêt de la lui reprocher. Il avait sûrement ses raisons et dans ce genre d'expéditions, on ne pouvait pas vraiment l'en blâmer. La plupart des blessures ou accidents survenant dans ce genre de situation provenait d'actes bêtes ou d'étourderies. Bien sûr, il y avait aussi un pourcentage provenant de la zone ou de la faune !

Vers dix heures, il firent une pause à l'ombre, s'abreuvant.

— De retour parmi nous ? le taquina Link.

— Oh, ça va, GI Joe, râla-t-il. Je suis sûr qu'à toi aussi il t'arrive d'avoir des réveils difficiles ! Et tu verras, je saurai me venger !

Ils rirent à cette promesse absurde puis consultèrent la carte, vérifiant qu'ils étaient toujours sur le bon chemin.

— Non mais, c'est pas possible, c'est pas l'armée qui t'a appris tout ça, t'étais scout quand t'étais petit ! souffla Ralph, alors qu'il lui expliquait comment repérer le nord avec sa montre à aiguilles.

Mais, au lieu de recevoir une pique comme à son habitude, ou n'importe quoi dans le genre, son interlocuteur détourna le regard, l'air embarrassé.

— Non, sérieusement ?

— Oui, bon, c'est vieux.

— J'exige des photos de toi dans l'uniforme !

— C'est prétentieux de ta part de penser qu'il reste la moindre preuve de cette horreur.

Peut-être n'auraient-ils pas dû être aussi folâtres, peut-être Ralph n'était pas encore complètement réveillé malgré ce qu'il pensait, peut-être était-ce inévitable, toujours est-il qu'il s'écroula sur le sol avant de le comprendre. Mais lorsque la douleur éclata, il ne put l'ignorer, pas plus que quiconque à porté d'oreille.

Link était à ses côtés en un éclair, le visage fermé, l'air concentré. Il avait déposé son sac à terre et commença à écarter les différents obstacles sur le chemin. Lorsque Ralph tenta de se redresser, il l'en empêcha, d'un simple appui sur le haut de son torse.

— Bouge le moins possible, souffla-t-il.

Forcé de rester allonger, il contempla le ciel, serrant les dents à chaque éclair de douleur le parcourant. Il ne put s'en empêcher, s'asseyant pratiquement alors que la sensation paraissait exploser de nouveau.

À ses pieds, Link lui rendit son regard, s'étant figé à son mouvement.

— On est obligé d'en passer par là, je dois retirer ta chaussure et ta chaussette. C'est peut-être une entorse, c'est peut-être autre chose. Prêt ?

— Donne-moi un instant, haleta-t-il.

Jetant un coup d'œil autour de lui, il attrapa une pierre assez grosse, la serrant de ses deux mains avant de lui donner la permission. Il se rallongea et pressa les mains du plus fort qu'il pouvait, tentant de convertir la douleur en force, n'importe quoi pour ne pas hurler et bouger le moins possible.

— J'espère que tu n'as pas l'intention de me la balancer dans la tronche, sourit Link en revenant à sa hauteur.

— Me tente pas.

Ni l'un ni l'autre n'avait particulièrement envie de rire. Ralph avait surtout envie de pester. Ils se retrouvaient enfin, après des semaines à s'éviter, ils n'étaient que tous les deux, et lui, et lui…

— Entorse, alors ?

— Ça n'a pas l'air cassé, en tout cas, mais on ne peut pas l'exclure.

— Du coup, on fait quoi ?

— Toi, rien. Tu fais ta plus belle imitation de statue. J'ai bandé ta cheville pour qu'elle bouge le moins possible. On n'a pas de glace ni de neige, et il vaut mieux économiser notre eau. Quand on sera au campement, le mieux serait que tu la plonges dans la rivière.

— Le campement ? Mais Link, on est à plus de trois heures du campement !

— Je sais, se contenta-t-il de dire.

Sous le regard perdu de Ralph, il rangea ce qu'il avait sorti et ferma son sac avant de l'enfiler par-devant, sur son torse.

— Mais qu'est-ce que tu f…

Mais au lieu de lui répondre, il s'accroupit à côté de lui, lui montrant son dos, les bras le long du corps, les mains tendues en arrière, l'invitant muettement à grimper sur son dos.

—Link… Est-ce que tu es en train de faire ce que je pense que tu fais ?

— Parle pas, on doit refroidir ta cheville avant qu'elle ne gonfle.

C'était complètement démentiel. Ralph fit comme demandé, ayant l'impression d'halluciner. Link devait se tromper, dans trois pas il allait s'arrêter, le faire descendre et avouer que c'était une idée stupide, n'est-ce pas ? Ou, lui, il allait se réveiller ? Il devait être sous la tente, à rêver ?

Mais non. Non seulement ce n'était pas un rêve, mais en plus Link dévala effectivement ce qu'ils avaient péniblement monté, sans une plainte. Il réalisa quelques pauses, bien sûr, mais plus à sa demande à lui.

— Ah, on y est presque ! annonça Ralph. Je peux voir les tentes d'ici !

À ces mots, Link n'accéléra ni ne décéléra, son pas restant égal. Il était resté le même, depuis la seconde où il s'était relevé avec lui sur le dos.

— Où tu vas ?

— La rivière, il faut réduire le gonflement de ta cheville.

C'était bête, mais il avait un peu oublié. Il faut dire qu'il avait eu de quoi s'occuper l'esprit !

La douleur, déjà, malgré l'analgésique que transportait Link dans sa trousse de premiers secours, mais bien vite son esprit avait vagabondé sur leur proximité, les muscles qu'il pouvait sentir sous et contre sa peau, les cicatrices qu'il avait vu hier, aussi. Et, il fallait le dire.

Le fait que cette foutue tête de mule était parvenue à le porter tout du long !

Certes, ça lui avait pris moins de temps de descendre que pour monter, mais c'était un rien vexant de le voir le transporter comme s'il pesait dix grammes !

Mais comme il n'avait pas trop envie de rentrer à cloche-pied, il avait sagement fermé le bec et avait profité de la balade, serrant les dents à chaque fois que sa cheville se déplaçait malgré eux.

Son petit ami l'avait laissé là, une fois après l'avoir assis sur la rive et avoir retiré le bandage, lui permettant enfin de voir l'étendu de l'ecchymose et l'état général de sa cheville.

— Je serai à porté d'oreille, cris si tu as besoin de quelque chose, je vais faire vite.

Il l'embrassa sur le front et disparut dans son angle mort, embarquant avec lui leurs deux sacs à dos.

Il n'y avait pas grand-chose à faire, alors Ralph fixa son attention sur ce que l'eau fraîche lui dévoilait de ses fonds, scrutant les petits cailloux, ses coudes plantés dans ses cuisses et son menton appuyé dans ses mains ouvertes.

Il se morigéna encore pour avoir foutu en l'air ce qui promettait d'être un super moment, enfouissant son visage contre les paumes de ses mains, ses doigts tirant sur ses cheveux. Il n'eut pas le temps de se rendre chauve, Link revenant vers lui, leurs sacs toujours dans les mains. Par contre, ils paraissaient bien plus chargés qu'à son départ…

— Okay, stop Superman. Va falloir que tu me partages ton super plan, tu commences à me faire peur, là. Tu comptes me traîner dans un coin isolé et me découper en morceau, c'est ça ?

L'air à peine plus déphasé qu'à l'ordinaire, il haussa simplement un sourcil, lui tendant son bagage.

— À deux mètres du camp ? Avec un formulaire signés de nos deux noms, auprès des gardes forestiers ? Si ç'avait été mon plan, il serait bien naze. J'aurais eu tout intérêt de le faire quand nous étions là-haut. Allez, sors ton pied, au lieu de dire des bêtises.

S'agenouillant à côté de lui, il plongea dans l'eau ce qui ressemblait à un T-shirt, puis l'essora, avant de recommencer.

— Tu fais la lessive ?

— On n'a toujours pas de glace ou de neige, un tissu mouillé pourra faire l'effort. Avec un peu de chance, les gardes forestiers auront de quoi faire. Par contre, je vais devoir conduire ta voiture.

— Attends, attends, ralentis, supplia Ralph, les yeux ronds. Tu veux bien me refaire tout le speech ? Tu vas de nouveau me porter jusqu'à l'entrée de la réserve, en laissant nos affaires ici ?

— Non, c'est bon, j'ai replié la tente et fais les sacs. J'ai fait au mieux, mais je te laisse revérifier que je n'ai rien oublié.

Il avait indiqué à Ralph son sac à dos rendu plus tôt, s'appliquant à bander sa cheville avec son vêtement.

Un peu robotique, le blessé se tourna vers le bagage et l'ouvrit, fouillant dedans. Mais il devait accepter la réalité : Link avait exactement fait ce qu'il avait dit.

— À première vue, tout à l'air d'être là.

— Super. On leur dira quand même de nous appeler s'ils trouvent quelque chose, les départs précipités ont tendance à multiplier les oublis.

Enfilant de nouveau son sac sur son torse, il imita la pause d'il y a quelques heures. Ralph enfila rapidement son sac sur son dos et reprit sa position, l'enlaçant au niveau des épaules, son menton contre sa nuque.

Ils croisèrent des promeneurs, des gens avec qui ils avaient campé la veille. Ils firent sensation, mais la plupart s'inquiéta en apercevant le bandage de fortune. Ce fut à Ralph de les rassurer et de s'excuser car ils ne pouvaient pas s'attarder.

L'accès à la réserve fut visible rapidement et plus encore la cabane où les gardes forestiers le prirent en charge. Ils trouvèrent des poches de glaces et proposèrent d'appeler les urgences.

— Non, ce sera plus rapide d'aller directement à l'hôpital par nos propres moyens, refusa Link.

Quand ils furent dans la voiture, leurs places inversées comparé à l'aller, Ralph avait la tête qui tournait. Il s'était passé des heures depuis qu'il avait fini par terre, mais il avait l'impression de ne pas avoir posé le pied (ha ha) à terre depuis des jours.

— Rassure-moi. T'as fait semblant ?

— Mmh ? Quand ça ?

La route jusqu'à l'hôpital n'était pas très longue, même si ce n'était pas celui de leur ville.

— Quand tu m'as porté sur le dos. T'as voulu faire ton super héros, mais je parie que tu vas aussi finir sur le brancard, quand on sera aux urgences.

Arrachant ses yeux de la route, Link l'observa, le regard plat, un sourcil légèrement arqué.

— Non ? Mais comment tu as fait ?!

— Ralph, t'es moins lourd que mon sac.

— Attends… Tu veux dire que tu aurais pu me trimballer pendant des heures encore ?

— Peut-être pas jusqu'à la maison, mais ouais.

Il haussa les épaules et revint sur la route, estimant la conversation finie, comme s'il lui avait simplement donné la couleur de ses chaussettes.

Son passager, au contraire, eut besoin d'un peu de temps pour traiter la révélation qu'il venait d'avoir.

Ce n'était pas tous les jours que vous découvrez que votre petit ami était capable de vous soulever et de transporter sans effort apparent !

Chapter 9: Patient/gardien surdramatique

Notes:

Bon, aujourd'hui, on va parler menstruation ! Les délicats, passez votre chemin.

Ça fait partie de la vie, ça fait donc aussi partie de leur vie de couple et polycule. Bien sûr, vous, vous faîtes comme vous le sentez ;)

Bonne lecture !

Chapter Text

— Tu es bien installée ? Tu veux un autre coussin ? Une couverture ? Une nouvelle bouillotte ?

— Chéri, tu devrais vraiment t'asseoir et respirer, conseilla Marine de sa voix la plus douce.

Mais c'était hors de question. Aujourd'hui, Link était une véritable pile électrique, ne tenant plus en place, au grand amusement de Lavio et au désespoir teinté de sympathie de la jeune femme.

— Link, je suis d'accord avec elle, assis-toi et souffle, tu vas finir par nous faire une crise cardiaque. Et je crois que nous n'avons plus de coussins, ils sont tous sous notre Belle Marianne !

En réponse, ladite Belle Marianne en saisit un et le lui jeta au visage, sans cacher son sourire pour autant.

— Oh, et elle est partageuse ! Que de qualités ! s'extasia-t-il. Par contre, je le garde, donner, c'est donner !

Ils se tirèrent mutuellement la langue sous le froncement de sourcils de leur compagnon.

— J'en fais… trop ? demanda-t-il enfin.

— N'écoute pas cet imbécile, le rassura Marine. Tu es adorable et je n'aurais jamais pu mieux tomber, mais je ne veux pas que tu te surmènes, d'accord ? Allez, viens t'asseoir avec moi, ou l'autre idiot, mais lève le pied.

Malgré son envie de se joindre à elle, l'ancien militaire dut se résoudre à prendre place avec Lavio qui rangea ses jambes sous lui. Le canapé qu'occupait son épouse était submergé par la quasi totalité des coussins de la maison, et c'était sans évoquer les couvertures dont il l'avait couverte un peu plus tôt. Il ne restait plus grand chose de visible d'elle, d'ailleurs. Juste ses mains tenant sa tasse d'infusion et une partie de son visage.

S'en rendant compte, Link piqua un fard, enfouissant le sien de visage dans ses mains. Mais ses deux partenaires purent admirer ses longues oreilles pointues se parer lentement de rouge, le trahissant. Ils échangèrent un sourire conspirateur qui disparut aussi vite que possible. Il valait mieux éviter d'éveiller le moindre soupçon !

— Désolé, je déteste me sentir aussi démuni quand vous n'allez pas bien, soupira-t-il en se redressant.

S'appuyant enfin contre le dossier du canapé, il se décala contre son petit ami, posant sa tête contre la sienne alors que leurs mains entrelaçaient leurs doigts.

Le tableau était adorable et fit sourire une fois de plus Marine qui se sentait bien seule sur son propre canapé, mais une nouvelle crampe la fit aussitôt grimacer. Malheureusement pour l'atmosphère douce et intime qui était lentement en train de s'installer, cette brève expression fut captée par les supers pouvoirs du casse-pieds en chef et il sauta aussitôt sur ses jambes et l'aurait sans doute rejoint si Lavio ne l'avait pas saisi par l'ourlet de sa jupe, le renvoyant aussi sec sur son assise.

— Calmos, Roméo, elle n'est pas en train de mourir. Juste de souffrir.

Il ne cilla pas sous le regard noir que sa déclaration lui rapporta, sirotant sa tasse de thé sans faiblir.

De son côté, Marine soupira et se tortilla, s'installant plus confortablement.

— Il a raison, trésor, c'est loin d'être amusant, bien sûr, mais c'est ma malédiction.

— C'est pas une malédiction, grommela-t-il. C'est juste un monde de cons qui préfèrent fermer les yeux sur presque deux milliards de personnes possédant un utérus depuis des millénaires.

— Doucement, descend de ton cheval blanc, monsieur le héros, l'apaisa Lavio.

Il avait passé un bras autour de ses épaules et lui tapotait le cuir chevelu, l'embrassant sur la joue, alors que Link fulminait toujours, les bras croisés.

— Personne ici ne dit le contraire, poursuivit-il. Et ne crois pas que Marine s'est résignée à son sort ou que je suis ravi de la voir se plier de douleurs ! Mais ce n'est pas en l'étouffant de coussins que tu vas faire changer les choses, c'est tout ce qu'on veut dire. Tu as déjà fait tout ce qui est possible, de ta petite place, le reste est entre ses mains.

— Entre mes hanches, tu veux dire, grommela l'intéressée.

Aussi souriante et aimable soit-elle, elle restait humaine et son humeur avait tendance à accuser le coup sous la douleur.

Mais personne ne pouvait de plus mauvais poil et vulgaire que leur Link en situation de faiblesse. Personne.

Ils se turent, sirotant leurs boissons chaudes, pensifs.


Ce n'était pas la première fois que Marine avait à subir les affres de son utérus. Elle avait été surprise de l'accueil de Link à ce sujet.

Elle ne se rappelait plus trop ce qu'elle avait eu à vivre jusque-là, que ce soit ses cycles précédents ou sa propre relation avec la globalité. Était-elle ouverte à ce sujet ? Humiliée ? Préférait-elle serrer les dents jusqu'à ce que la crise passe ou sautait-elle sur ses analgésiques à la première crampe ?

Devoir réapprendre ce qui faisait partie d'elle depuis sans doute des années avait été angoissant et stressant, et ça n'avait été qu'une goutte d'eau dans le grand vase de sa vie.

Mais là encore, elle avait pu compter sur celui qui avait été son sauveur à l'époque, et son mari actuellement. Il l'avait accompagné aux rendez-vous médicaux, avait chargé de lui-même tous ces praticiens qui osaient la juger sur son amnésie ou voulait minimiser ses ressentis. Si elle n'avait pas déjà été amoureuse de lui à l'époque, sans doute l'aurait-elle été à ce moment-là.

Il avait appris auprès de sa sœur des bases et l'avait elle aussi soutenu au travers des années, bien que leurs carrières différentes ne leur permit plus cette solidarité. Il avait donc très naturellement repris ce rôle auprès d'elle, presque plus au taquet qu'elle.

C'était amusant, mignon, et très très envahissant, comme actuellement.

Link avait une relation d'amour/haine avec la douleur. Il pouvait supporter la sienne, taire chacune de ses blessures et serrer les dents à les briser le temps qu'elle passe, par contre il leur tombait dessus à la moindre égratignure, traitant le plus petit maux comme la fin du monde.

Enfin, ils exagéraient, mais la pharmacie, les urgences et le cabinet d'infirmier les plus proches avaient eu droit à de telles scènes de sa part qu'ils les reconnaissaient de visu et papotaient tranquillement, par-dessus la barrière habituelle de stricte politesse.

D'ailleurs, maintenant qu'elle y pensait, Marine devait appeler Monique pour prendre des nouvelles de sa souris… Elle devait avoir mis bas, hier, de souvenir…

Se sentant fatiguée, elle avait annoncé qu'elle retournait dans sa chambre s'allonger, ce qu'elle avait fait sous les saluts des deux garçons. Link s'était plongé dans sa lecture actuelle et Lavio chouchoutait son oiseau, celui-ci appréciant ses attentions au vu de l'espèce de roucoulement qui s'échappait de son bec.

Enfin seule, la porte fermée, elle soupira, soudainement plus épuisée que tantôt. Elle ne voulait qu'une seule chose : dormir. Dormir pendant des heures, des jours, des semaines entières, peu importe, mais elle voulait retrouver l'énergie qui l'animait en temps général et non plus être cet espèce de loque humaine qui se traînait pitoyablement de pièce en pièce…

Alors qu'elle s'installait au lit, un souvenir provenant de l'époque des premiers temps de leur cohabitation lui revint en tête, la faisant sourire.

Elle avait été tellement épuisée, à ce moment aussi, tellement… Mais elle avait encore peur de dormir, de l'inconscience qui l'arrachait de la réalité, les cauchemars qui la réveillaient, en larmes et en sueur.

Ses nerfs avaient fini par lâcher alors qu'elle était submergée, et elle s'était mise à pleurer hystériquement, incapable de se calmer, frôlant la crise d'angoisse. Son corps voulait un repos que son esprit le lui refusait, c'était à devenir fou !

Link était alors rentré de l'extérieur sur ses entre-faits et avait perdu tous ses moyens en la découvrant plus proche de la flaque que de l'humaine. Quand elle était parvenue à articuler une phrase un tant soit peu sensée, il l'avait prise dans ses bras et l'avait porté jusqu'à la pièce qu'elle avait revendiqué comme sa chambre. Mais il ne s'était pas contenté de la mettre au lit comme une enfant pas sage. Non.

Tout du long du trajet, il l'avait bercé, chantonnant tout bas. Il fit quelques allers-retours dans la chambre avant de les installer tous deux sur le lit, la bordant avec soin, puis était resté à ses côtés en lui caressant les cheveux et lui tenant la main, sans se plaindre un instant ni ne s'arrêter.

Elle s'était sentie protégée, en sécurité, et malgré ses réticences, il était parvenu à la rassurer suffisamment pour qu'elle sombre enfin.

À son réveil, Marine s'était attendue à se retrouver seule, mais non, il était là, veillant sur son sommeil, dans la même position que quelques heures plus tôt, une main dans sa chevelure et l'autre accrochée à la sienne. De nouvelles larmes avaient jailli, mais de soulagement, de reconnaissance, et de tant d'amour, cette fois…

Affolé, il l'avait redressé et étreint, craignant que sa réaction soit dû aux réminiscences d'un cauchemar ou autre, mais il n'en était rien.

Et là, au milieu des draps défaits, le nez enfouis dans les plis de son T-shirt sentant la sueur et le foin, la jeune fille s'était fait la promesse de ne jamais abandonner une personne aussi précieuse. Peu importait si leur histoire ne fonctionnait pas, si histoire il y avait, Link était un ami sur lequel on pouvait compter.

Mais pas uniquement pour ses intentions et ses tendances à vous surprotéger, mais bien parce qu'à force de trop donner de sa personne, on finissait par ne plus exister.

Et il était hors de question que ça lui arrive…

Maintenant, dans le présent actuel, Marine observait la discrète alliance ornant son doigt, nichée dans ses couvertures. C'était un anneau d'or tout simple, sans décoration ni inscription, un simple trait d'or patiné par le temps et le port.

À leur majorité, les jumeaux avaient aussi bien récupéré les alliances de feus leurs parents que feus leurs grands-parents. Ils se les étaient partagés et, si sa mémoire était bonne, Marine portait actuellement celle de leur grand-mère, une hylienne humble qui était née dans une ferme à moins d'une heure d'ici et qui avait vécu toute sa vie entourée de bétails et de paysages simples. Elle s'était mariée au sanctuaire tout près et était retournée traire les vaches ensuite. Elle avait eu deux beaux fils, et même s'ils étaient tous deux morts avant leurs parents, elle n'avait jamais perdu son sourire et avait accueilli ses petits-enfants qu'elle avait élevé avec la même bienveillance.

Dans un geste mille fois effectué, Marine porta sa main gauche à ses lèvres, embrassant le reliquat de la première femme que son mari avait admiré, honorée de pouvoir le porter aussi simplement.

Par contre, si elle avait une solution, même temporaire, pour apaiser son utérus en pleine rébellion, elle était prête à faire couler le sang…

Chapter 10: Les reniflements ™

Notes:

Référence au chapitre 6 Étourdissements

Funfact : j'éternue donc comme des lapins

Je ne suis pas à l'aise avec les vaches. Mon chien tente de leur imposer sa loi. Il fait 4 kg, tout mouillé

Quand tu confonds reniflements et éternuements o/

Eeet, c'est aussi mon dernier chapitre de l'année et le dernier d'écrit, youhou ! Faut vraiment que je m'y remette ^^'

Bonne lecture !

Chapter Text

Le souci de vivre à la campagne ou, en tout cas, d'habiter dans une ancienne ferme avec ses animaux et ses champs, ou plutôt son potager, c'est qu'on était dans la bonne vieille nature, bien que la pollution soit partout.

Malgré toutes les plantes de Marine peuplant la maison ou juste sa serre, malgré le bourdonnement quasi incessant des essaims d'abeilles habitant le verger, malgré toutes leurs protections, il leur était impossible de gagner tous les combats.

Et le printemps était l'un d'entre eux. Ou était-ce l'été ? Peut-être l'automne… Mais certainement pas l'hiver ! … N'est-ce pas ?

— C'était quoi ce bruit ? sursauta Ralph.

Il avait été invité pour un après-midi jeux de société et perdait depuis quasiment le début. Heureusement, il avait très tôt appris à être bon perdant au contact de son amie d'enfance, et ne le prenait pas mal, s'amusant plutôt à contempler les stratégies mises en place par le trio.

— Ça, mon cher, c'est notre pauvre Pompon, déclara dramatiquement Lavio.

— Ernak, trancha Link en renvoyant son cheval à l'écurie.

— Nous en avons déjà parlé, Link, nos enfants s'appellent Fluffle et Pompon !

— Sage et Ernak ne sont pas nos enfants, pour la millième fois, ce sont des lapins.

— Et tu es un monstre sans cœur ! Et arrête de me renvoyer à l'écurie !

— Bah, joue mieux, qu'est-ce que tu veux que je dise ?

Ignorés, Marine souriait dans son thé, les observant se disputer, pendant que Ralph les regardait comme un match de tennis, passant de l'un à l'autre.

— Il se passe quoi, exactement ? lui murmura-t-il.

— Pompon/Ernak est un de nos lapins. Lavio essaye de les faire reconnaître comme leurs enfants à Link et lui. C'est un débat sans fin, n'essaye même pas d'intervenir, tu vas pleurer.

— … okay. Je vais essayer de garder ce conseil à l'esprit.

La partie de petits chevaux se poursuivait, ponctuée de ce qui ressemblait clairement à des bruits de canard.

— Non, sérieusement, c'est quoi ? s'inquiéta Ralph. Vous élevez des canards en intérieur ?

— C'est Pompon, il a attrapé le Coryza, développa le lolien. Donc on doit le séparer de Fluffle pour éviter la contagion. En plus, il a des soins, donc c'est plus simple qu'il soit dans la maison.

— Et c'est votre lapin qui fait des bruits de canard ?

— Affirmatif. C'est normal comme son, même si surprenant.

— Ah bah, pour être surprenant…

Maintenant qu'il était informé, la soudaineté de l'onomatopée était moins effrayante, bien qu'il ne pouvait s'empêcher de tressaillir à chaque fois, encore peu habitué.

X

Vers le cœur de l'après-midi, ils décidèrent de sortir un peu s'aérer, et ainsi présenter à Ralph leur petit monde. Pour le moment, il les avait déjà vu de loin, ou on lui en avait parlé, mais ce n'était pas pareil de s'imaginer une vache que de se trouver à moins d'un mètre d'elle.

Bien malgré lui, il s'accrocha au bras de Link, effrayé par la carrure de l'animal qui l'observait de son regard doux.

— Faut pas avoir peur ! Aglaé est une vraie crème ! assura Lavio.

Et pour prouver son point de vue, il se pencha sur elle et l'enlaça en souriant.

— Tu vois ?

Ça, pour voir, il voyait. Mais il aurait tout aussi bien pu lui grimper sur le dos que lui serait resté bien sagement à plusieurs kilomètres. Mais voilà, soit Aglaé était une télépathe sadique, soit elle aimait renifler sa peur, toujours est-il qu'elle s'approcha de lui, levant la tête comme pour l'inviter à lui flatter l'encolure.

— Ne le fais pas si tu n'en as pas envie, lui souffla Link.

Et il tendit le bras pour caresser son cou, ce qui parut lui plaire, car elle pivota la tête, semblant l'appuyer contre son bras. Elle le fixait de ses grands yeux doux, comme le ferait un chien quémandant de l'affection.

C'était autant dérangeant qu'attendrissant.

— Comment je dois le faire ? demanda-t-il finalement.

Sa voix était un peu étranglée, mais il puisa jusqu'à la dernière goutte de courage dans son organisme.

— Un peu comme un chien, laisse-la te renifler avant de bouger. C'est à elle de te donner son consentement. Et quand elle t'aura validé, tu n'auras qu'à faire comme moi.

Obéissant, il tendit la main, paume ouverte et vers le haut, laissant l'animal le respirer aussi longtemps que nécessaire, si tendu qu'il en vibrait presque.

Un peu plus loin, il vit Marine l'encourager, levant ses deux pouces en l'air et lui souriant avec enthousiasme.

Lavio, lui, était resté à câliner la vache, bien qu'il avait rouvert les yeux, sans doute prêt à réagir si nécessaire.

— C'est bon, elle est d'accord. Bouge doucement et sans à-coup, comme ça.

Docilement, Ralph l'imita, gardant tous ses sens en alerte, prêt à s'éloigner à la seconde où il apercevrait un signe qu'il y avait un problème.

Mais tous les spider-sens du monde n'auraient pas pu l'informer de ce qui allait arriver. Et lorsqu'il rouvrit les yeux sur le ciel et le visage inquiet de Marine, il se demandait ce qui était arrivé entre-temps.

— Hé, ça va ? Est-ce que tu as mal à la tête ? Non, ne bouge pas ! Réponds juste à mes questions, tu as peut-être une commotion cérébrale !

Elle agitait des doigts devant ses yeux, mais trop vite pour qu'il parvienne à les voir correctement.

— Moins vite, articula-t-il.

— Marine, recule, je m'en charge.

Contrairement à ce qu'il s'attendait, c'était Lavio qui la remplaça, l'éloignant. Il s'agenouilla à côté de lui et saisit sa main, paraissant vérifier son pouls.

— C'est un sacré vol plané que tu nous as fait, commenta-t-il. Link est avec Aglaé, il est le seul capable de la calmer. Il dit que c'est parce que c'est lui qui a aidé sa mère à la mettre au monde, mais Marine et moi, on est persuadé qu'il est capable de parler avec les animaux. Tu sais, comme s'ils partageaient le même langage ?

Son babillage était plus reposant que les questions angoissées de la jeune femme, mais Ralph avait quand même mal. Il grimaça alors qu'il tentait de se déplacer.

— Pour en revenir à toi, tu t'es fait balayer par notre chère Aglaé, pas de chance. Mais rien de personnel, elle a éternué, tu étais dans le chemin, tu es plus un dommage collatéral. Et si ça peut te réconforter, Link va avoir droit à une douche.

— Une douche ? l'interrompit Marine. Même pas en rêve, il rentre dans cet état ! Ce sera le tuyau d'arrosage, et seulement après il pourra crapahuter jusqu'à la douche !

— La patronne a parlé ! se contenta-t-il de dire. Par contre, je te laisse le lui dire, pas envie d'être un dommage collatéral à mon tour.

Il n'en fallut pas plus pour qu'elle s'éloigne, allant sans doute rejoindre son mari pour le lui faire savoir.

— Pourquoi la douche ? l'interrogea Ralph.

— Toi t'as découvert l'apesanteur, lui il s'est fait recouvrir de morve. Bref, combien de doigts ?

— Trois. Et eurk.

— Je peux te dire qu'il joue moins les jolies cœurs, ricana Lavio, sans pitié. As-tu mal à la tête ou au cou ?

— Je pense que j'ai une belle bosse. Je peux me relever ?

— On va déjà t'asseoir, accroches-toi à moi.

Heureusement, il ne présentait aucun symptôme ou signe pouvant faire penser à une commotion cérébrale, mais il fut tout de même surveillé comme du lait sur le feu, à son inconfort.


— Demain c'est dimanche, est-ce que tu veux rester pour la nuit, juste au cas où ?

Marine était allée dans sa serre et Lavio préparait le dîner, permettant au petit couple d'être enfin seuls. Installés l'un dans les bras de l'autre sur l'un des canapés du salon, ils profitaient du calme relatif de la demeure, après un après-midi assez énergique.

— C'est juste une bosse.

— Ce n'est pas à cause de ça. Enfin, si, c'est en partie, corrigea Link après qu'il ait arqué un sourcil. Mais c'est aussi une proposition que je t'aurais faite, chute ou pas chute.

— Et comment on organise ça ? Je dors par terre pendant que vous ronflez sur votre immeeeense lit king size ?

L'image fit rire Link.

— Non, déjà, il n'y a pas de lit king size. Ensuite, si je t'invite à passer la nuit, c'est certainement pas pour profiter du confort du parquet ou pour t'envoyer dans la paille de l'étable.

— Monsieur est bien aimable.

Un baiser fut pressé contre le front de Ralph et ce dernier s'affala un peu plus sur le torse de son petit ami.

— Donc, je disais, non, si tu restes pour la nuit, tu auras droit à un lit. Après, à toi de voir : on a une chambre d'amis, mais tu peux aussi t'installer dans ma chambre.

— Comment ça, ta chambre ? Tu ne la partages pas avec Marine ou Lavio ?

— Parfois oui, parfois non. Nous avons chacun notre chambre, notre espace. On n'a pas toujours envie d'être avec quelqu'un, tu vois ? C'est aussi pour ça que ça fonctionne entre nous, je pense.

— Oui, je vois. Enfin, je crois ?

Il était un peu confus, mais ce n'était pas dû à sa mauvaise chute, contrairement à ce que Link avait l'air de croire. L'idée qu'un couple — que deux couples – vit chacun de son côté, nuit comprise, était surprenante, mais pas désagréable.

— Donc, comme tu vois, tu as le choix, reprit-il.

— Je vais y réfléchir, alors. Mais je n'ai pas envie de sortir, de conduire… Je pense que je vais rester, oui…

Il étouffa un bâillement, reposant la tête sur son torse.

La journée n'avait pas été particulièrement longue, mais il y avait eu pas mal d'émotions, il était fatigué. Savoir qu'il n'aura pas à se battre contre l'assoupissement pour conduire était un soulagement.

Il dut tout de même se secouer un peu pour faire honneur au dîner, complimentant Lavio pour ses plats, sans avoir à mentir une seule fois.

C'était un peu plus gênant, après, lorsqu'il se rendit pleinement compte qu'il allait dormir avec Link. Dont la chambre était face à celle de Lavio. Et à côté de celle de Marine.

Mais tout le monde paraissait assez détendu à cette information et se contenta de lui souhaiter bonne nuit et de ne pas hésiter à les réveiller s'il y avait un souci.

Une fois allongé sous la couette, il fixa longuement ce qui devait être le plafond, dans l'obscurité.

— La chambre d'amis est toujours disponible, souffla Link dans le noir.

— Désolé, c'est juste que… je me rends seulement compte d'à quel point ça fait bizarre d'être là, avec toi, mais aussi que Marine et Lavio le sont aussi, chuchota-t-il, anxieux.

— Pourquoi ? Tu avais l'intention de faire quelque chose de particulier ?

Ralph se contenta de lui donner un coup de coude vers ce qu'il pensait être ses côtes, mais échoua lamentablement. Tant pis, le geste était tout ce qui comptait !

Finalement, ils s'enlacèrent pour la nuit, se laissant lentement sombrer dans le sommeil…

— TCHA !

— Encore Pompon ? marmonna Ralph.

— Ah non, pas toi aussi ! Il s'appelle Ernak ! pleurnicha-t-il faussement.

Chapter 11: Traitement médiéval

Notes:

Si je peux donner un conseil : éviter les comprimés effervescents dans le chocolat chaud. Et attendez qu'ils aient bien fini de se dissoudre avant de les boire.

Sérieusement.

Évidemment, j'avais tout le mois d'août sans les travaux, à pouvoir finaliser ce recueil avant d'attaquer Sicktember 2025, je vous laisse deviner ce que j'ai fait ( ͡• ͜ʖ ͡• ) (même moi j'ignore ce que j'ai fichu pendant ce temps… Enfin, si, ma santé a empiré, wahoo)

C'est ainsi que je vis mes vertiges ( ゚ヮ゚)

Bonne lecture !

Chapter Text

Le monde ignorait la chance qu'il avait d'avoir du paracétamol.

Voilà à peu de chose près la pensée qui traversait l'esprit douloureux de Lavio.

Il était trois heures du matin et il était en caleçon dans la cuisine, affalé sur la table, à observer la dissolution de son comprimé dans son grand verre d'eau.

Le léger bruit s'échappant des petites bulles remontant à la surface sifflait au travers de ses oreilles comme un concert de perceuse. Ça sentait mauvais.

Mais il était encore loin du compte lorsque la lumière fut violemment allumée, lui arrachant un cri de douleur alors qu'il pressait les paumes contre ses yeux, tentant de chasser la sensation de tournevis s'y plantant.

— Oh merde, désolée !

Marine s'empressa d'éteindre, bien que le mal soit déjà fait, avant de se précipiter aux côtés du migraineux, l'invitant à retirer ses mains pour qu'elle puisse discerner quelque chose.

— Que se passe-t-il ? chuchota-t-elle.

— Maaal, grinça-t-il.

— Oh non, encore ? Mon pauvre…

Elle lui caressa les cheveux, compatissante, alors qu'il reposait le front contre la surface fraîche du meuble.

Lavio était familier des migraines. C'était un mal chronique dans sa famille, il avait alors appris à faire avec, refusant de la laisser lui bouffer la vie.

Mais il y avait des jours de crises, comme celui-là, où il n'avait qu'une envie : se faire exploser le crâne. Peu importe comment, peu importe avec quoi, juste maintenant.

— Tu n'avais pas dit qu'aucun traitement n'était efficace ? poursuivit Marine.

— C'était soit ça, soit l'arme de Link. Et comme elle est sous clé…

La tentative d'humour n'arracha qu'une grimace à la jeune femme, alors qu'elle l'observait s'emparer du verre et l'engloutir en quelques gorgées.

— Il n'avait pas fini de se dissoudre.

— Et c'est toujours aussi dégueulasse.

Le verre fut de nouveau déposé sur la table, un reste de mousse crépitant au fond, alors qu'ils se turent tous les deux, l'une pensive et l'autre suppliant pour une délivrance.

— Tu veux que je te sorte ton bonnet ?

— J'avais oublié de le mettre au froid, je dois encore attendre.

— Ah.

Elle s'était initialement tirée du lit pour une petite fringale nocturne, mais maintenant qu'elle savait la situation de Lavio, elle n'osait plus rien faire ni dire. La plupart du temps, ses symptômes restaient stables, mais il lui arrivait d'en avoir de nouveaux, ou que sa sensibilité soit plus aiguë. Pouvait-elle seulement respirer, d'ailleurs ?

Comme s'il avait entendu ses pensées, le lolien releva la tête, l'appuyant dans ses mains, avant de prendre de nouveau la parole :

— Tu sais, tu peux faire ta vie, t'occupe pas de moi, je vais gérer.

— Tu es avec moi, avec Link, avec nous, quand nous n'allons pas bien, c'est normal que je ne veuille pas te laisser seul…

— Et si c'est moi qui te le demande ?

Divisée, elle se mordit la lèvre, tentant d'apercevoir son expression malgré la semi obscurité.

— S'il te plaît… pleura-t-il pratiquement.

Le cœur déchiré, elle se leva et alla passer la porte quand elle s'interrompit pour faire volte-face et l'enlacer, dans le vain espoir d'aspirer sa douleur ou d'au moins pouvoir lui transmettre sa force. N'importe quoi qui pourrait l'aider…

À la place, il tapota doucement ses mains et elle prit l'invitation à partir, retournant à l'étage, se glissant dans le lit de son mari, transférant son étreinte sur lui, celui-ci l'enlaçant en retour, dans son sommeil.

Il y avait des combats qu'on ne devait réaliser que seul.


La raison initiale pour que chaque membre du polycule ait sa propre chambre, était qu'ils n'étaient pas en relation, à la base.

Link avait conservé sa chambre d'enfance, qui se trouvait être celle de son oncle avant lui. Ça faisait bien longtemps qu'il n'y traînait plus de peluche ou de petites voitures, y ayant grandi, mais il tenait à la garder.

La chambre d'ami actuelle, se trouvait en fait être celle de sa sœur à l'origine. Comme elle était souvent la seule à leur rendre visite, avec Hilda, la cousine de Lavio, c'était devenu assez évident.

Marine avait opté pour l'ancienne chambre de feu son beau-père, lorsqu'elle était arrivée, bien avant que le projet de mariage leur vienne en tête. La sienne, et celle de Link, se trouvait du côté avant de la maison, par où le soleil rentrait le plus, ce qui était un avantage non négligeable pour ses plantes. Elle avait peut-être perdu la mémoire de son passé, mais elle se souvenait quand même de la caresse de l'astre sur sa peau, comme si elle avait vécu dans un endroit où les jours de pluie étaient rares.

Lavio, lui, s'était approprié la chambre de l'autre côté du couloir, donnant sur le terrain, où vivaient les grands-parents de Link, jusqu'à leurs décès respectifs. Qu'ils aient poussé leurs derniers soupirs dans ladite pièce ne parut pas le refroidir. Quelque chose en rapport avec son pays natal…

Lui non plus ne s'était pas installé juste après leur mise en couple, avec Link. À l'origine, il cherchait simplement une location dans ses moyens, le temps de ses études. Il n'était pas tout de suite tombé sur cette adresse, non, il avait enchaîné les propriétaires malhonnêtes et les colocations sordides, avant de s'en plaindre enfin à sa cousine qui l'avait alors répété à sa petite amie, qui en avait touché deux mots à son frère.

Bien qu'il y ait d'autres chambres à travers la maison – la famille de Link avait été très nombreuse, à une époque – ce fut celle-là qui lui avait été proposé et pour laquelle il avait eu un coup de cœur. Le soleil ne rentrait pas directement, sans qu'il n'y fasse trop sombre, et le paysage était encore vibrant de nature, malgré les nombreuses constructions.

Mais, surtout, le summum, c'est qu'en fermant les volets, il pouvait se trouver dans le noir total. Il n'avait pas toujours besoin de son casque anti-bruit, aussi, car les environs étaient plutôt calmes. Et, en tant que migraineux chronique, ç'avait été une bénédiction.

Oui, à la réflexion, Lavio était tombé amoureux de la fermette, bien avant de Link ou de Marine.

Ils le taquinaient encore maintenant à ce sujet, même s'il le leur rendait bien, loin de l'embarras ressenti les premiers temps. Qu'y avait-il de mal à préférer sécuriser son confort à succomber aux élans de son cœur ?

Marine avait sûrement prévenu Link lorsqu'elle était retournée au lit car celui-ci ne vint pas lui rendre visite alors que l'heure de son lever était dépassé depuis longtemps.

Il y avait bien eu un léger effleurement contre le panneau de la porte, l'invitant à l'ouvrir pour découvrir un plateau sur lequel reposait une version bien médiocre de son thé à la menthe, avec son bonnet tout frais sorti du congélateur. L'intention était appréciée, même si le thé était vraiment immonde. Sûrement Link, mis au courant par Marine. Le pauvre pourrait faire tourner du lait rien qu'en le regardant. Alors, faire bouillir correctement de l'eau…

Amusé de la pensée, Lavio s'installa confortablement contre son tas de couverture et sirota le jus tiédi pendant que le froid faisait son office.


Marine avait sa serre et toutes les plantes de la maison, Link entretenait son potager et son verger, Lavio cultivait un jardin de simples. Encore un don généreux désintéressé de la part du propriétaire.

Il avait un peu tâtonné au début, ses connaissances en la matière ne dépassant pas la plante en pot (et encore, il avait découvert que celle qu'il avait arrosé des années durant était en fait en plastique) mais il avait pu compter sur ses amis pour l'aiguiller et rattraper ses bêtises au besoin.

C'était encore un petit carré de terre aux pousses timides, dont le résultat n'était visible par sa production que depuis deux années.

Link avait un peu triché, en ajoutant quelques plants au milieu des légumes du potager, dans son dos. Lorsqu'il l'avait découvert, il aurait sans doute pu l'étrangler, si le bouquet de basilic providentiel n'avait pas été si essentiel.

Il s'était contenté de lui décocher un coup de pied dans les tibias, pour la peine.

Lavio aimait bien s'installer dehors, à côté de son petit jardin médicinal, un livre dans les mains et entouré de son petit duo de lapins qu'il devait quand même surveiller du coin de l'œil, des fois qu'ils aillent se perdre dans le potager et y grignoter exactement ce qu'ils ne devaient pas grignoter.

Ils étaient forts à ce petit jeu, les sagouins.

Le soleil n'était pas trop fort et un petit vent frais remuait les feuillages des arbres.

Aujourd'hui était une journée assez simple, assez sobre, où il n'avait pas l'impression que son cerveau était en train de se tordre sur lui-même tout en se cognant contre sa boîte crânienne. C'était plutôt agréable.

Les petites boules de poil s'étaient allongés non loin de lui pour dormir, alors qu'il poursuivait sa lecture, levant de temps en temps la main pour la passer dans leurs doux pelages.

Une humidité étrange coula hors de sa narine, glissant entre ses lèvres, sans qu'il n'y prête attention.

La saison des allergies était rarement glamour, hélas.

Mais, lorsque ça toucha sa langue, il était trop tard, le sang avait déjà touché le livre, le décorant de petites taches rouges. Sauf que ce n'était pas juste une épixtasis, évidemment. C'était le début d'une nouvelle crise.

D'une minute à l'autre, cette petite parenthèse champêtre allait virer au cauchemar, à l'anti-chambre de l'enfer.

Déjà, la réalité commençait-elle à devenir floue, devant ses yeux.

Mais, si en temps normal il aurait pu se contenter de courir (?) jusqu'à sa chambre et s'y enfermer pour les heures de plaisir qui l'attendaient, ce n'était pas possible actuellement.

Il était impératif que Fluffle et Pompon soient enfermés dans leur enclos, par exemple. Qu'il puisse s'emparer de quoi soulager les symptômes à venir. Sauf qu'il était actuellement seul à la maison et avait laissé son téléphone à charger, dans sa chambre.

Il allait tellement devoir serrer les dents qu'il lui faudra prendre rendez-vous chez le dentiste, quand ça ira mieux…

Heureusement pour lui, les vertiges à proprement dit ne démarrèrent qu'une fois les lapins mis en sécurité et il ne trébucha presque pas, alors qu'il rentrait, malgré cette sensation d'avancer sur des sables mouvants, bien que gravir les escaliers fut une expérience qu'il espéra ne pas avoir à revivre de sitôt.

Il trébuchait alors que les larmes coulaient le long de ses joues, sa photophobie mise à mal alors qu'il forçait sur sa vue, autant pour ne pas se laisser emporter par cette sensation de sol se dérobant sous ses pieds que par le soleil ayant envahi la maison par toutes ses ouvertures.

Là, sa chambre. Là, son havre de paix.

Mais il n'avait pas fini, le repos n'était pas encore pour lui.

Il devait encore calfeutrer entièrement la pièce et penser à prévenir ses partenaires, tout en leur interdisant de couper court à leurs activités pour le rejoindre. Ce n'est pas comme s'ils pouvaient servir à quoi que ce soit, autre que fixer la porte close en s'arrachant les cheveux.

Marine lui envoya un gif mignon pour le consoler mais Link fut plus difficile à convaincre. Lorsque la notification d'appel s'afficha, Lavio se demanda un instant si ce n'était pas lui, finalement, son affection chronique. La migraine, à côté, c'était rien, finalement.

— Je peux être là dans dix minutes, déclara l'hylien, après qu'il eut décroché.

— Super, tu pourras tenir compagnie aux meubles, gargouilla-t-il piteusement.

— Tu as besoin que je t'apporte quelque chose ?

Mais au lieu de lui répondre, submergé par ce qui se trouvait être la première vague de douleur, Lavio raccrocha, serrant son téléphone dans son poing alors qu'il s'efforçait de respirer selon un rythme précis.

Ça ne calmait pas nécessairement la douleur, mais il avait l'impression que ça lui permettait de la juguler légèrement. Et, accessoirement, ça lui épargnait l'envie de se mettre à insulter son compagnon pour se défouler.

Quand celui-ci vint, presque timidement, toquer à la porte, Lavio était parvenu à garder son état stable, paupières closes, respiration égale et immobilité totale. Sauf que, ne s'y attendant pas et son esprit ayant dérivé vers d'autres strates, il ne parvint pas à censurer sa surprise, brisant ainsi son installation.

Un glapissement de douleur franchit ses lèvres avant même qu'il ne l'enregistre, agissant telle une invitation pour Link qui ouvrit aussitôt la porte, entrant au même titre que la lumière.

Dans une autre situation, sans doute Lavio le taquinerait sur son entrée, lui auréolé de lumière, pénétrant dans sa grotte sombre… Mais cette situation ne parviendrait jamais, vu qu'il fallait pour cela qu'il soit en pleine crise, et donc l'esprit et le corps bien assez occupés pour ne pas pouvoir se fendre d'une plaisanterie.

Maigre consolation, il chuchota, alors qu'il parvenait au lit, semblant vouloir voir à travers la pénombre pendant que lui-même se mordait la langue, ébloui par la luminosité soudaine.

— Je t'ai entendu crier, je peux faire quelque chose ?

— Aller te faire voir, principalement, parvint-il à articuler. Dégage.

Cher Link. Il était le premier à les repousser dès qu'il reniflait un peu fort mais avait du mal à comprendre quand ils avaient besoin d'espace pendant leurs maladies respectives.

— Mais…

— Chéri, si tu ne t'en vas pas maintenant, je te balance à Marine. Ferme la porte en partant.

Douché, l'ancien militaire sortit sur la pointe des pieds et alla rabattre le battant, mais pas sans lui jeter un dernier regard, revêtant sans doute l'air d'un chiot triste.

— Si tu veux tellement te rendre utile, commenta Lavio à voix haute dans la pièce vide, apporte la perceuse, j'ai besoin d'une trépanation d'urgence…

Heureusement, le concerné n'était plus à portée d'oreille. Nul doute que sa réaction aurait été plus bruyante, autrement.