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OTPtober 2023

Summary:

La difficile mise en couple entre l'ami caractériel d'une oracle et l'aventurier venu la sauver.

Notes:

Un ami – qui se reconnaîtra, avec un peu de chance – chouinait du manque de présence de ce couple, pourtant si évident. Et difficile de le contredire, même côté anglophone, c'est la disette, une honte !

Et je suis tombée sur le concept d'OTPtober (c'est comme l'Inkto, un thème chaque jour sur le thème du OTP (one true pairing), pendant le mois d'octobre). Et j'ai eu envie de concilier les deux, parce que moi aussi j'aime ce couple !

Et nous voilà donc partis pour un projet de 31 chapitres, youpi~ (vais-je retrouver la santé, un jour ? On y croit...)

Disclaimer: L'univers de Zelda appartient à Nintendo.

Bonne lecture !

Chapter 1: Soulmate AU

Chapter Text

La première fois que Link entendit cette chanson, il aurait pu poursuivre son chemin sans y faire attention. Il avait rendu service à Impa, il devait maintenant comprendre quelle était cette fameuse quête qui l'attendait !

Du moins l'aurait-il fait s'il n'avait pas fini par se rendre compte que cette chanson n'était pas dans son esprit, cette fois.

Cette réalisation fut sans doute ce qui coûta la liberté de Nayru, le rendant spectateur.

Puis tout s'enchaîna si vite…

Ralph était un bon gars mais la conversation n'était pas son fort et il l'envoya paître à plusieurs reprises, focalisé sur le sauvetage de son amie, alors il ne put pas l'interroger.

De toute façon, la chanson ne revint pas durant la quête, lui permettant de se concentrer sur ce qu'il avait à faire. C'était bien mais c'était si étrange…

Cette chanson, ces notes, cette mélodie… Elles faisaient quasiment partie intégrante de sa vie, de sa personne…

La première fois que Link l'avait entendu, il était si petit… Ça devait être aux environs du décès de ses parents, avant d'être confié à ses grands-parents puis son oncle, quand il pleurait encore la nuit, dans son lit.

Elle avait agi comme une berceuse, l'apaisant jusqu'à ce qu'il s'endorme, puis elle l'avait accompagné dans son quotidien au point qu'il finisse par l'entonner en cœur et que sa famille l'interroge dessus.

Et que le concept d'âme-sœur lui soit expliqué.

« Lorsqu'une chanson te reste en tête, c'est parce que ton âme-sœur est en train de la chanter. »

Elle revint sur des bases irrégulières, l'accompagnant au travers de sa vie.

Elle le réconforta après que son oncle mourut dans ses bras. Elle la berça lorsqu'il dut se cacher pour éviter les soldats corrompus d'Agahnim. Elle l'acclama lorsqu'il parvint à abattre Ganon et à s'établir une ère d'or, ressuscitant son oncle par la même occasion.

Elle faisait tellement partie intégrante de sa vie qu'il se sentait presque seul à ne plus l'entendre. Comme… vide.

Quand ils se réunirent à la fin, euphoriques de leur victoire, imitant la situation où tout avait commencé, Link se sentit bizarre et plus encore quand Nayru récupéra sa harpe de ses mains et en frôla les cordes, fredonnant tout bas.

Mais elle n'avait même pas commencé à jouer que, déjà, la chanson jouait dans sa tête, éclatant subitement comme de la poudre à canon enflammée.

Mais personne ne chantait…

Son sursaut avait attiré l'attention d'Impa et de quelques animaux, mais Nayru et Ralph étaient concentrés, bourdonnant tout bas les notes au rythme des cordes pincées.

Sans même y réfléchir à deux fois, Link sauta sur ses pieds, le visage pâle et rougissant à la fois, sa voix s'étranglant dans sa gorge.

— L'un de vous est mon âme-sœur, déclara-t-il tout à trac.

L'incongruité de la situation permit un silence de cathédrale, la harpe des Âges sonnant alors qu'une corde claquait sous la pression de Nayru.

Toute l'agitation était sur le jeune héros qui formulait intérieurement le vœu de disparaître de la surface de la terre, mais il carra tout de même les épaules et renforça sa position, faussement sûr de lui, le menton relevé.

— Je savais que tous ces coups sur la tête allaient lui être fatal… soupira dramatiquement Ralph.

— Toi, la ferme !

Reprenant son souffle – pourquoi était-il si court ? – Link jeta une œillade implorante auprès de l'oracle pensive.

— Qu'est-ce qui te fait penser que tu as une âme-sœur ? Finit-elle par demander. C'est un phénomène très rare…

— Votre chanson. Je la connais depuis bien avant mon arrivée à Labrynnia. Depuis… presque toujours, en fait.

— Oh, une âme-sœur par le chant ? Voyez-vous ça…

Le rire de Nayru était léger, doux. Elle savait clairement quelque chose.

— En tant qu'oracle, je ne suis pas assujettie à cette possibilité. Ne reste que…

Quand son regard croisa celui de son ami d'enfance, celui-ci piqua un fard monstrueux qui jurait avec ses cheveux.

— PAS POSSIBLE ! Réfuta-t-il en sautant sur ses pieds à son tour.

— Il n'y a qu'un moyen de le savoir…

Cette fois, ce fut lui, Link, qu'elle observa avec ce petit sourire de celle qui sait.

Elle ne dit rien mais étrangement, Link savait exactement ce qu'elle voulait qu'il fasse et entonna maladroitement une des chansons que sa grand-mère entonnait toujours à l'heure de la traite.

Il ne fallut pas longtemps à Ralph pour l'accompagner, malgré lui.

Leurs visages n'allaient pas refroidir avant un long moment alors que les deux hyliennes les taquinaient et les félicitaient pour leur future relation.

Timidement, leurs regards se croisèrent et ils furent surpris par l'étrange battement qui secoua leurs cœurs respectifs.

Ça ne faisait pas de mal d'essayer après tout, nous ?

Subitement sourd aux taquineries d'Impa et de Nayru, Link tendit le bras en direction de Ralph, comme pour l'atteindre mais en lui offrant l'opportunité de décider.

Il scruta cette main offerte, une grimace révulsé froissant ses traits alors qu'il reculait d'un pas. Il jeta un œil en direction de sa meilleure amie, l'air trahi, avant d'avoir l'air étrangement apaisé et d'extirper maladroitement une main depuis le pli de sa cape, attrapant celle que l'hylien lui présentait toujours, patient.

— On peut toujours essayer, renâcla-t-il.

Pour toute réponse, Link afficha son sourire le plus large, semblant s'illuminer de l'intérieur.

Au lieu de se jeter à son cou comme il en mourrait d'envie, il porta la main bien pâle contre la sienne brunie par les travaux agricoles au grand air contre ses lèvres, y déposant un bref baiser comme il avait pu voir des nobles et des chevaliers faire à leurs bien-aimés, ses yeux bleus rivés dans ceux verts.

Leurs rougissements conjoints s'étaient légèrement apaisés mais celui de Ralph reprit en ampleur alors qu'il détournait la tête en insultant Link sur sa niaiserie.

Mais il ne sépara pas pour autant leurs mains…

Chapter 2: Safe

Notes:

Je garde les titres en anglais parce que... flemme de les traduire, et ça me permet d'être un peu moins précise pour les significations.

Link's Awakening est arrivé avant les Oracle.

Bonne lecture !

Bonnes fêtes !

Chapter Text

Les premières nuits passées ensemble ne furent pas de tout repos. Non à cause de leurs hormones adolescentes – du moins, pas seulement – mais par la faute du passé de Link.

Ce n'était pas tous les soirs, ce n'était jamais les mêmes cauchemars, les comportements variaient, mais le résultat était là, dans les cernes semblables qu'arborait le couple.

Ralph n'avait jamais autant aimé le matin que depuis lors, car il signifiait la fin des cris et des plaintes, des gesticulations et des pleurs.

Soupirant aux premiers rayons du soleil, il se redressa contre la tête du lit et rassura sa prise sur son compagnon qui dormait dans ses bras, s'accrochant à lui comme à un rocher en pleine tempête.

Repoussant la frange humide de sueur, Ralph y pressa un baiser sur le front découvert puis son menton, fermant les yeux, lui aussi.

L'épuisement lui alourdissait les membres et remplissait son crâne de balles de coton. Tout lui paraissait une épreuve, un obstacle insurmontable, mais il ne devait pas le montrer, et surtout pas à Link. Celui-ci devait gérer avec ses propres problèmes de sommeil, mais aussi ses cauchemars, il était hors de question d'alourdir d'autant plus son fardeau avec ses peines à lui !

Ralph était un grand garçon, il pouvait gérer des nuits raccourcies, des sommeils interrompus abruptement, et les plaintes et cris déchirants qu'émettaient son compagnon, mais il est vrai que l'épuisement était là…

Il se sentait lentement sombrer mais incapable de dormir pour autant, flottant entre les deux états.

Il en fut extirpé en étant secoué énergiquement, bien qu'avec douceur, ses paupières papillonnant s'ouvrant sur le sourire enjoué de l'aventurier, mais aussi ses cernes prononcés.

— Tu t'es rendormi ? Ce n'est pas ton genre de te réveiller après moi !

De sa position agenouillée, il revint se blottir contre lui, entourant son bras gauche des siens et apposant sa tête contre son épaule.

Distraitement, Ralph remarqua qu'il n'était plus en chemise de nuit, mais surtout que la lumière du soleil était plus franche.

— Quelle heure est-il ? Marmonna-t-il en se frottant le visage de sa main libre.

Pour une raison qui lui échappait, Link semblait adorer lui saisir le bras gauche, s'y agrippant de nuit comme de jour.

Heureusement qu'il était droitier !

— Tard. J'ai déjà mangé.

— Pourquoi ne m'as-tu pas réveillé ?

Son ton était celui d'une simple curiosité. Bien qu'encore un peu endormi, il ne l'accusait en rien.

— Tu souriais.

La déclaration fut accueillie par un silence paisible, les deux amoureux savourent la présence de l'autre pressée contre lui, leurs mains se liant et leurs doigts se caressant.

— Comment a été ta nuit ? Finit-il par demander.

Ralph avait vite compris à choisir quand l'interroger à ce sujet, afin d'obtenir une vraie réponse et non un marmonnement évasif ou une réponse automatique, destinées à l'apaiser sans entrer dans les détails.

Il n'eut pas besoin de jeter un œil dans sa direction : le bruit des draps se froissant sous lui suffisait pour l'informer qu'il se tortillait, indécis.

— Correcte, dans l'ensemble. Je ne me rappelle pas de quoi j'ai rêvé, par contre.

— C'est peut-être pas plus mal, grommela-t-il malgré lui.

Cette nuit, ce n'était pas les gesticulations effrénées de Link qui l'avaient réveillé, c'étaient les hurlements de douleur, les râles d'agonie, les gémissements d'angoisse et les sanglots.

Mais le pire restait les supplications. Les marchandages mal articulés d'une voix déchirée. Les appels pressants et brouillons. Les prières.

C'était inutile de le réveiller, il était incapable de différencier ses cauchemars de la réalité, la seule chose que Ralph pouvait faire était de l'empêcher de se blesser dans ses mouvements hiératiques en le serrant dans ses bras et de le bercer, priant pour que son esprit passe à autre chose.

C'était plus rapide et, bien souvent, s'il ne se réveillait pas, Link ne s'en rappelait pas.

Lui, par contre, s'en souvenait.

Peu à peu, les cauchemars de Link devenaient les siens, bien qu'édulcorés, ses propres nuits maintenant hantées de cris plaintifs, des appels au secours, mais surtout de son impuissance à gérer les crises, son inutilité face aux tourments de son partenaire. Il se voyait tenter de le réveiller et échouer, le découvrant mort ou lui reprochant son dédain envers son mal-être.

— Tu vas te rendormir, le taquina Link.

Sa diction devenait hasardeuse, alourdie par le sommeil qui pesait soudainement sur lui.

— On va se rendormir tous les deux, corrigea-t-il.

Pour toute réponse, il n'obtint qu'un souffle de nez, le faisant sourire.

Têtu, pour changer, hein ?

Il raffermit sa prise sur leurs mains enlacées et tendit celle libre pour tendrement caresser les mèches encore légèrement humides, regrettant de ne pouvoir embrasser la peau dégagée sans le déranger.

— Je veille sur ton sommeil, souffla-t-il alors que ses paupières se refermaient.

Leurs souffles se régularisaient, prenant le même rythme, alors qu'ils se rejoignaient dans le monde des rêves, s'étreignant.

Chapter 3: Shores

Notes:

Ils sont plutôt amusants à écrire :3 (ce Link a l'avantage d'être encore innocent et ouvert, contrairement à après LA où je l'imagine renfermé, amer et cynique)

Bonne lecture !

Bonnes année !

Chapter Text

Si Nayru lui avait fait aimer les forêts, Ralph avait bien l'intention de faire aimer la mer à Link.

Au cours de leurs passages dans le temps, ils s'étaient retrouvés dedans, sauvés par un navire pirate commandé par l'amant de son ancêtre – une longue histoire qu'il doutait réussir à comprendre ou raconter un jour – mais depuis, l'aventurier semblait l'éviter comme la peste.

Ce n'était pas une question de pudeur – Hylia savait combien de fois Ralph l'avait découvert à différentes étapes d'habillage. Voire par du tout, même – et ce n'était pas par phobie de l'eau, il s'en était assuré.

La capitale possédait l'un des plus gros ports du pays et une bonne partie de la vie de ses habitants étaient tournés vers l'étendue d'eau. Tous les enfants savaient nager, parfois avant même de marcher, et nombre de leurs festivités avaient un rapport avec le monde marin.

Se baigner avec son amoureux était donc tout un symbole !

Ralph savait que s'il expliquait tout ça à Link, celui-ci s'y plierait, mais uniquement pour lui faire plaisir ou au nom de la tradition. Pas pour son plaisir à lui, sacrifiant son bien-être.

Et c'était juste hors de questions. Link avait suffisamment sacrifié pour Labrynnia ou le reste du monde, merci bien !

— Dis, ça te dirait un pique-nique, ce soir ? Lui proposa-t-il.

— On célèbre quelque chose ?

Il put voir sur son visage qu'il réfléchissait, tout juste s'il n'entendait pas les rouages de son cerveau !

Multiple vainqueur contre Ganon, et ce visage livrait le moindre de ses secrets, sans retenue.

— Pas à ma connaissance. C'est une belle journée de printemps, le temps s'est agréablement réchauffé et nous n'avons rien de prévu. Je trouvais simplement que c'était une belle occasion. Mais on peut toujours faire ça à une autre date.

— Non non, je posais juste la question, s'empressa-t-il de répondre. C'est une bonne idée.

Il l'embrassa sur la tempe alors qu'il le dépassait, ravi, et allait quitter la pièce, lorsqu'une mauvaise blague lui vint à l'esprit.

— Mais on peut toujours changer. Après tout, ça fait trois jours que tu n'as perdu aucun de tes vêtements, ça se fête tout aussi bien !

Il n'attendit pas son reste et prit la poudre d'escampette, hilare.

Alors qu'il s'éloignait du salon, il entendit distinctement le choc d'un objet contre un mur, ce qui était sans doute la réaction – tardive – de Link.

Pourtant, il ne mentait pas !


Link le rejoignit dans la cuisine alors qu'il débutait les préparatifs.

— Besoin d'aide ?

— Tu peux me regarder.

— Je ne suis pas si empoté ! Se défendit-il.

Mais au lieu de lui répondre, Ralph marqua un temps d'arrêt et se tourna vers lui, le fixant sans un mot jusqu'à ce que le jeune héros ne s'empourpre.

— C'était une fois !

— Une fois de trop.

Boudeur, Link alla s'adosser contre le mur, les bras croisés. Il se dérida à peine lorsque son partenaire vint l'embrasser sur la joue lors de ses allers et retours.

— Je veux passer une belle soirée au clair de lune avec toi. Pas toi à mon chevet pendant que je me rétablis d'une intoxication alimentaire.

— C'est arrivé une seule fois, marmonna-t-il.

Mais il avait perdu de sa verve et fit juste la moue, l'attrapant par les hanches et enfouissant son visage contre son cou, légèrement honteux de cet épisode.

— C'est toi que je veux dorloter, cette nuit, pas mon estomac. Mais tu es un merveilleux garde-malade, n'en doute pas.

Il acheva sa déclaration d'un baiser claquant sur le front et reprit ses préparatifs, embarquant Link dans son manège, celui-ci se blottissant contre son dos. Ils gardèrent le silence, à l'exception d'un léger fredonnement qu'ils reprirent tous les deux en chœur.


Comme prévu, les températures étaient douces, bien qu'une légère brise fraîche venant de la mer les accueillit.

La crique sélectionnée par Ralph était reculée et sans âme qui vive, leur assurant une intimité et une tranquillité appréciables.

Retirant ses bottes, Link enfouit les orteils dans le sable tiède, les yeux perdus dans les vagues.

Dans son dos, Ralph étala la couverture bariolée servant de nappe et vida le contenu de son panier dessus, organisant leur pique-nique avec attention.

Il alluma la mèche d'une bougie à la citronnelle – les moustiques étaient précoces, cette année – et accueillit le retour timide de Link d'un sourire.

— Assis-toi donc.

Leur conversation était pleine de silence mais aucun ne s'en plaignit, savourant le ressac et l'air iodé au même titre que les plats et le vin pétillant. Mais plus encore, c'était la présence de l'autre.

Ils échangèrent des sourires timides au début mais au fur et à mesure que les heures passèrent, ils devinrent plus prononcés, plus audacieux… Avec plus de promesses contenues dans les commissures.

Dans la soirée, Ralph avait fini par s'allonger, la tête sur les cuisses de Link, tâtonnant vers la corbeilles de fruits pour en déguster lentement.

Link, lui, sirotait le dernier verre de vin, observant la surface de la mer, pensif, une main égarée dans les mèches épaisses qui s'étalait sur ses jambes.

— À quoi tu penses ? Lui demanda Ralph.

— À Hyrule.

Nouveau silence.

— Tu as l'intention d'y retourner ?

— Plus rien ne m'y attends.

— Ce n'est ni un oui, ni un non.

Leurs yeux se rencontrèrent, ceux de Link montrant son hésitation, ceux de Ralph n'en affichant aucune alors qu'il gobait des grains de raisins, les joues légèrement gonflées.

— C'est ma terre d'origine, reconnaît l'hylien. Mais c'est surtout mon passé. Tout ce qu'il me reste, c'est des pierres tombales et une maison froide.

— Et Cité Lyanna ? Demanda-t-il sans trop y croire.

Link prit une autre gorgée, se léchant les lèvres ensuite, pensif, avant de planter à nouveau son regard dans le sien, l'air sérieux.

— Est-ce présomptueux de penser que c'est mon futur ?

Ignorant son cœur battant son plus fort et son visage rougissant de plaisir, Ralph lui adressa un sourire amusé.

— Commençons par le présent. Le futur, on aura tout le temps d'aviser.

Il planta un coude dans le sable et balança l'autre bras pour l'attraper par la nuque, le forçant à se pencher sur lui, et lui vola un baiser.

— Que dirais-tu de fêter cette déclaration par le célèbre bain de minuit ? Murmura-t-il contre ses lèvres.

— Je rétorquerai qu'il n'est que vingt-deux heures.

— Au diable les traditions, dans ce cas ?

Link se recula pour rire, charmé.

— Très bien votre majesté.

Un grain de raisin le percuta mais il en fit fi, essuyant les larmes d'hilarité lui étant montés aux yeux.

— Tu le veux vraiment ?

— C'est plutôt toi qui le veux, je me trompe ? Ou bien tu avais une autre idée en tête pour ce pique-nique impromptu à la plage ?

Le clin d'œil qu'il lui adressa était tellement chaud qu'il aurait pu lui faire bouillir les sangs, le faisant se redresser et arranger sa tenue, mal à l'aise.

— On dirait même qu'il devient urgent pour toi de piquer une tête dans de l'eau bien froide.

Ce scélérat avait profité de son changement de posture pour se pencher à son oreille et y souffler ses mots, amplifiant la rougeur de son petit ami qui resserra aussi sec les genoux, bien que cela fut parfaitement inutile.

Refusant de l'admettre, il se tourna vers le vilain plaisantin, le nez en l'air.

— C'est toi qui aurais besoin de refroidir tes ardeurs.

— Impossible, je suis naturellement chaud.

Le regard séducteur qu'il lui présenta anéantit toute chance d'argumenter, Ralph se concentrant uniquement dessus et se sentant clairement réagir.

Le sale petit…

Mais toute protestation disparut de ses pensées alors que Link lui attrapa le menton pour un baiser si approfondi qu'il se sentit fondre contre lui.

Quand ils se séparèrent, Ralph eut la surprise de se découvrir à califourchon sur ses genoux, les bras entourant ses épaules.

— Ou on saute la partie du bain et on se déshabille directement ? Proposa-t-il, le souffle court.

— Et on se saute directement dessus ?

— Quelque chose à redire ?

— Seulement que j'adore tes idées.

Link ne lui laissa pas le temps de réagir, l'allongeant au sol, sur leur nappe de fortune, pressant leurs corps ensemble.

Chapter 4: Drunk

Notes:

Le saviez-vous ? Cette note correspondait à ce chapitre, pas au précédent ^^'

J'ai galéré à trouver une fête particulière en rapport avec la mer. Par contre, sachez qu'il existe des dizaines et des dizaines en rapport avec les pommes de terre. J'ai vaguement raccroché à la "danse des méduses au clair de lune", de Stardew Valley.

Bonne lecture !

Chapter Text

Que ce soit du point de vue de Labrynna ou celui d'Hyrule, la décision était catégorique : Link comme Ralph étaient mineurs. Et qui disait mineurs… disait restrictions !

Et c'était pour cette raison que nos deux amoureux sirotaient bien sagement leurs limonages perdant qu'ils étaient bousculés.

Mais bon, ça faisait partie du charme des festival, non ?

Ayant décidé de se tenir la main afin de ne pas se perdre au milieu de cette foule compacte – c'était une vraie capitale avec la population qui allait avec, comparé à Hyrule – ils se promenaient sans but, observant les stands autant que les gens ou les décorations.

— Rappelle-moi ce qu'on y fête ? L'interrogea Link.

Il mâchonnait sa paille, les yeux rivés sur un groupe d'enfants qui s'égosillaient plus loin, ravis de veiller tard et de jouer.

Penché sur un stand d'amulettes, Ralph lui jeta à peine un regard, concentré, le bras tendu en arrière.

— Tous les ans, un banc de tortue passe au large des côtes, expliqua le marchand. C'est un signe de bon augure qui annonce souvent une bonne pêche pour l'année à venir !

Ayant fait son choix, Ralph se redressa et le pointa de l'index, échangeant avec le marchand.

Il lâcha brièvement la main de Link pour s'emparer du sachet puis le lui tendre.

— T'as des poches extensibles, expliqua-t-il.

— C'est pas une raison pour me prendre pour ton sac ! Se plaignit son petit ami.

Mais il obtempéra, et bien vite ils purent se reprendre la main et poursuivre leur avancée.

— Mon sac ? Non, tu es ma brouette, répliqua Ralph en taquinerie.

Il lui embrassa la joue pour faire taire sa réplique, ce qui fonctionna très bien.

Vexé, il finit sa boisson d'un trait.

Ils allèrent rendre pailles et verres au stand puis bifurquèrent sur une autre allée avec tout autant de monde et de babioles exposées.

— Des tortues, vraiment ? Reprit Link.

— Les superstitions ont la vie dure, éluda son ami d'un haussement d'épaules. Et plus encore en contact avec la mer. Je t'avais prévenu : avec l'arrivée de l'été, on va passer de célébrations à festivités sans s'arrêter. Certains pays ennemis prétendent que le meilleur moment de nous attaquer, c'est le lendemain du dernier, parce qu'on est occupés à digérer. Mais ceux qui s'y sont tentés se sont autant fait démolir que les autres.

Il caressait la paume caleuse de son pouce durant son explication, sans y prendre garde. Link tint sa langue, ne voulant pas qu'il cesse.

Il raffolait autant qu'il détestait l'admettre : les petites attentions de Ralph le faisaient fondre.

Évidemment, dans l'intimité, rien qu'entre eux, c'était autre chose, il était plus simple pour lui de se laisser faire, de se laisser aller dans l'étreinte affectueuse, de partager leurs chaleurs corporelles ou une myriade de baisers.

Mais là, c'était différent.

Il y avait pratiquement tous les habitants de Cité Lyanna sur la plage, parlant, jouant, s'invectivant, consommant plats ou boissons, marchandant les articles éphémères.

C'était beaucoup. Beaucoup d'âmes et beaucoup d'yeux tournant dans tous les sens, pouvant à tout instant remarquer leurs mains enlacées ou leurs proximités.

Leur relation n'était pas particulièrement un secret ou une tare que Link désirait camoufler à tout prix. L'amour était l'amour !

Mais lorsque Nayru lui avait avoué son ascendance, il avait compris : ils n'étaient pas du même monde.

Leur amourette avait une date limite. À n'importe quel instant, ils pouvaient être séparés . Mariage politique, tradition, ingérences familiales… Il avait pu le voir chez la princesse Zelda, il ne serait pas surpris que Ralph soit dans la même situation.

Alors, il chérissait tous ces petits moments, gardant à l'esprit qu'ils étaient fugaces et non voués à la répétition.

Mais, surtout, il ne voulait pas porter préjudice à l'ancienne famille royale et à sa prestance.

Bien qu'elle ait renoncé au trône bien des décennies plus tôt, leurs membres étaient traités avec la même déférence qu'autrefois. Et tout aussi épiés…

Une fois qu'ils eurent fait le tour de tous les étalages, Ralph les mena à un coin plus reculé de la plage. Ce n'était pas la crique dont ils avaient partagé le secret ce printemps, mais c'était juste assez loin pour qu'ils puissent s'entendre sans tarder.

Autour d'eux, d'autres familles et groupes d'amis semblaient avoir eu la même idée, se réunissant sur des nappes et autres couvertures colorées pour les protéger du sable.

Ils s'échangeaient des victuailles et des boissons, riant. Certains avaient même apporté des instruments de musique, d'autres avaient improvisé une piste de danse, envoyant du sable au moyen de leurs pas.

La bonne humeur était contagieuse, et ni Link ni Ralph n'y dérogeaient, arborant un sourire depuis qu'ils avaient suivi les lampions menant au festival.

En guise de couverture, Ralph avait sacrifié sa cape signature, l'étalant sur le sable avant de s'y asseoir et d'inviter l'aventurier à l'imiter.

Finalement, il jeta ses jambes bottés par-dessus ses genoux, leurs mains de nouveaux tenues, sa tête posée sur son épaule, les yeux fermés.

La semi obscurité et toute cette agitation lui avaient donné envie de tenter sa chance.

Et, au pire, Ralph n'aura qu'à repousser ou modifier leurs positions !

Mais loin de le faire, il l'embrassa plutôt sur le front avant d'accoler leurs têtes, closant les paupières à son tour.

Malgré le brouhaha, il était possible d'entendre le ressac de la mer. Certes, ça restait léger, mais c'était là !

C'était hypnotisant et le couple aurait bien pu s'endormir, bercé par le son, mais ils furent interpellés par leurs voisins qui avaient fini par reconnaître le prince sans trône.

Discrets comme ils le furent, bien vite tout le monde sut pour lui et des invitations à partager les provisions fusèrent de toute part, tant et si bien que les deux amoureux s'échangèrent un regard, l'un contrit, l'autre amusé, avant d'accepter.

Refuser devant autant d'insistance aurait été incroyablement malpoli.

Bientôt, ils formèrent un groupuscule disparate et chamarré, chacun ayant rapproché sa natte pour pouvoir partager sa cuisine.

Ça faisait bien vingt minutes que Link avait assimilé qu'il était inutile d'en savoir plus sur ce qui remplissait son assiette ou son verre. Soit on se contentait de lui tapoter le crâne en souriant, soit on n'avait même pas entendu sa question.

Et, évidemment, ce qui devait arriver arriva.

L'ivresse gagnait du terrain parmi leur entourage, il ne fut donc pas très surprenant que les verres de Ralph et Link furent remplis d'alcool, eux aussi.

Quand ils s'en rendirent compte, il était déjà trop tard. Ils s'échangèrent un regard avant de hausser les épaules et de laisser aller. Après tout, qui les montrera du doigt quand la majorité des témoins étaient ronds comme des queues de pelle ?

Et puis, ça pourrait leur faire de chouettes souvenirs.

Ce n'était pas leur première expérience avec l'alcool, mais il restait jeunes et peu habitués, l'effet fut donc immédiat.

Le monde tournait un peu alors Ralph décida de fermer les yeux, savourant cette étrange sensation, comme si la boisson parcourait son corps, réchauffant chaque extrémité.

Il s'affola un peu plus contre Link, souriant.

Au travers des réceptions données par sa famille, il avait plus d'une fois grappillé des fonds de verre ou des bouteilles, mais rien à voir avec un verre complet. Ou deux.

De son côté, le sauveur d'Hyrule était habitué au cidre que son oncle réalisait à l'aide des pommes de son verger. Servi chaud, c'était une bonne boisson pour traverser la froideur de l'hiver. Mais sa teneur en alcool était largement dépassé par le liquide dans son verre.

Sagement, il le reposa loin de lui et se contenta d'observer les fêtards autour de lui.

Il pouvait sentir contre lui Ralph se détendre et cette réalisation le fit sourire alors qu'il l'embrassait sur le front, déclenchant des vivats saouls.

Était-ce vraiment pour les tortues que tous ces gens se réunissaient ?


Ralph rouvrit les yeux sur le plafond familier de sa chambre. De leur chambre.

Sa tête lui lançait et il avait soif, mais rien de si horrible que ce à quoi il s'était attendu.

Il se leva pour rejoindre la cuisine afin de s'y abreuver et eut la surprise d'être accueilli par son compagnon, mais surtout par la nourriture qui ornait la table.

Il le fixa une poignée de secondes, cillant, avant de grogner et de se servir un verre qu'il but longuement avant de le claquer sur le comptoir.

— Par pitié, ne me dis pas que tu as cuisiné…

— Bonjour à toi aussi, mon rayon de soleil. J'ai bien dormi, merci de t'en inquiéter.

Sa taquinerie n'obtint qu'un nouveau grognement.

— Non, soupira enfin Link. Je suis allé acheter de quoi manger. Et j'étais loin d'être le seul.

Tout en grâce, Ralph s'écroula sur sa chaise, tendant le bras pour attraper une viennoiserie.

— Comment on est rentré ?

— Tu te souviens de quoi ?

— Des bribes. Des flash. Tu as vraiment vraiment sur la plage.

— On a vraiment dansé. Et c'est même toi qui m'y as entraîné. Sinon, pour te répondre, je t'ai porté sur mon dos.

— C'était vraiment nécessaire ? Geint-il.

— J'ai bien tenté de juste te guider, mais tu as commencé à me tripoter et à nous déshabiller. Alors j'ai opté pour une mesure… radicale.

— Radicale ? Comment m'as-tu porté ?

Il s'étouffa sur sa bouchée et toussa longuement, des larmes coulant sur son visage alors qu'il faisait passer ça avec un verre de jus de fruit tendu par une main secourable.

— Au travers des épaules. Comme les pompiers.

Un gémissement de fin du monde fut poussé et il n'y eut plus que des cheveux roux à voir.

— La honte…

— Oh, crois-moi, je doute que qui que ce soit s'en souvienne. Il y a eu beaucoup d'alcools. Et tu étais loin d'être le seul à devoir être traîné quelque part.

Link retourna à sa lecture du journal, y cachant son sourire amusé pendant que son vis-à-vis continuait de gémir sur sa réputation ruinée – bien qu'il n'y ait pas un témoin pour s'en remémorer.

Juste lui.

Il n'y avait que lui pour se rappeler le large sourire réjoui qu'avait arboré Ralph alors qu'il l'entraînait près des musiciens, un dont il n'avait pas le souvenir d'avoir vu un jour.

Il était le seul à se souvenir des mots doux et des déclarations murmurées à son oreille alors que les mains maladroites s'agrippaient à ses vêtements.

Juste lui.

Chapter 5: Healing

Notes:

Légère référence à Sicktember 2022, ch. 29 & 30, mais c'est vraiment une phrase, et surtout une private joke, vous fatiguez pas xD

Bonne lecture !

Chapter Text

En tant que descendant d'aristocrate, Ralph avait grandi avec l'idée que la beauté résidait dans la peau diaphane et sans la moindre imperfection.

Les chevaliers avaient une dérogation, les éventuelles cicatrices étant en rapport avec leurs faits-d'armes, mais c'était à l'appréciation de chacun.

Il avait été témoin de ses sœurs et sa mère fuyant les rayons du soleil pour des ombrelles, se couvrant de multiples de couches de produit blanchissant en geignant au moindre bronzage.

Il avait subi ce traitement, étouffant sous les habits longs et épais, ses seuls saluts étant les escapades à la mer ou ses retrouvailles avec Nayru, dans la forêt fraîche.

Contrairement à d'autres nobles, il ne méprisait pas les individus n'arborant pas cette peau claire et sans défaut, trouvant le concept bien lourd, sans pour autant y voir une esthétique agréable à l'œil.

Nayru était la plus belle hylienne qui soit, et son apparence correspondait aux canons de la mode, c'était tout ce qui comptait !

Du moins le pensait-il jusqu'à ce que son chemin croise celui de Link.

Évidemment, ça n'avait pas été un coup de foudre comme dans les romans ou les chansons. Les sentiments s'étaient construits petit à petit alors qu'ils s'associaient pour libérer l'Oracle de l'emprise de Véran.

Tout son égo n'avait pas suffi à l'aveugler quand, à ses côtés, il avait pu assister à ses combats, à chaque coup porté, déchirant la peau déjà abîmée. Les longues heures de quêtes passées à interroger les civils ou rendre service, juste pour rendre le sourire à une enfant, le tout sous l'implacable soleil.

Petit à petit, ses pensées allaient à contre-courant des principes esthétiques qu'on lui avait inculqué et il se retrouva à apprécier cette peau bronzée car elle témoignait de son dévouement auprès des gens. Chaque cicatrice, éclat blanchi par le temps, démontrant à quel point le chemin d'un aventurier était ardu mais aussi qu'il fallait plus que ça pour l'en détourner.

Malgré sa basse naissance, Link incarnait mieux la chevalerie que nombre de chevaliers.

Et Ralph en avait côtoyé un bon nombre.

De fier et reconnaissant, il s'était petit à petit rendu compte que ses pensées prenaient un tout autre chemin que ce à quoi il s'attendait. Et plus encore lorsqu'il se retrouva à rêver d'embrasser Link au lieu de Nayru, comme il en avait l'habitude !

Mortifié, il avait tenté de mettre un peu de distance entre eux, mais l'heureux idiot ne comprenait pas pourquoi ce soudain changement de comportement et le collait naïvement.

Ou il savait parfaitement ce qu'il faisait, et c'était un génie du mal.

De toute façon, chasser le naturel, il revenait au galop, et plus d'une fois Ralph se rendit-il compte qu'il reprenait ses habitudes et leurs proximités, dès qu'il n'y faisait plus attention.

À quoi bon lutter, finalement ?


— Dis, est-ce que tu me détestes ?

La nuit était tombée depuis deux bonnes heures et ils avaient pu se réfugier dans une grotte juste à temps.

Trempés suite à leur plongeon, ce n'était pas le faible feu qu'avait péniblement allumé Link un peu plus tôt qui allait parvenir à les réchauffer correctement.

Mais pour l'instant, il y avait plus urgent.

Ayant dû retirer autant d'habits que possible sous les conseils du héros qui n'en était pas à sa première baignade impromptue, lui-même en sous-vêtements, Ralph avait dû faire un choix entre l'hypothermie et sa pudeur.

Vêtu uniquement de son pantalon humide et frissonnant, il marchait en rond, tentant de se frictionner pour chasser la chair de poule recouvrant son corps. Ses cheveux collaient à son visage et ses épaules en de larges mèches tristes, lui mangeant plus de vision que le faisait son habituelle mèche rebelle.

Peut-être était-ce la proximité forcée, peut-être était-ce la question qui avait finie par résonner entre les parois rocheuses, toujours est-il qu'il se figea un moment avant de se retourner pour faire face à Link. Il n'était pas sûr su ses frissons étaient toujours dus au froid ou à la nervosité qu'il sentit peser dans son estomac.

— Pourquoi ça ? T'as bu la tasse de trop, ton cerveau a pris l'eau ? Répliqua-t-il d'un ton narquois.

— Tu agis bizarrement avec moi, expliqua-t-il en haussant les épaules. Et t'es toujours énerver, comme là.

Malgré lui, Ralph décroisa les bras, ses poings se fermant, alors qu'il se grandissait, soudainement furieux.

— MAIS BIEN SÛR QUE JE SUIS TOUJOURS ÉNERVÉ À TON CONTACT !

Son mouvement d'humeur les força à se boucher les oreilles alors que des échos brouillons les assourdissaient.

— Désolé, marmonna-t-il quand ils purent s'entendre à nouveau.

Mais au lieu de prendre la mouche et de répondre sur le même ton… Link rit.

Il rit si fort que des larmes coulèrent de ses yeux et qu'il se tint le ventre, se plaignant entre deux éclats.

Un peu vexé mais malgré lui amusé, Ralph se rapprocha, s'asseyant à côté de lui, patientant.

Il avait l'intention d'attendre la fin de son fou rire mais la soudaine apparition de sang changea ses plans et, avec une force qu'il ignorait posséder jusque-là, il le repoussa en arrière, scrutant la peau humide à la recherche de la plaie coupable.

Il finit par la repérer, une simple entaille cachée par les jambes du caleçon, mais elle restait profonde.

— Tu devrais prendre une potion, finit-il par déclarer.

— Je n'en ai plus, avoua piteusement l'aventurier.

Partagé entre l'envie de le cogner et celle de se prendre le visage dans les mains, Ralph choisit la seconde option, réfléchissant.

— Et des bandages ? Un mouchoir, peu importe !

Soit il n'en était rien, soit Link était trop sonné pour répondre, dans un cas comme un autre, il n'eut aucune réponse et dut improviser un pansement avec les moyens du bord.

Délesté à son tour de son pantalon – une fois sèche, sa tunique sera assez longue pour le couvrir, et plus encore sa cape – il entreprit d'en déchirer des bandes qu'il enroula autour de la cuisse de Link, après avoir retroussé l'habit.

Le silence était étrange, leur éloignement de l'entrée de la grotte paraissait leur couper du monde. Les seuls bruits provenaient du minuscule foyer, de leurs respirations et des éventuels mouvements qu'ils réalisaient.

Les yeux rivés sur le pansement de fortune, Ralph se concentrait sur ce qu'il réalisait, mais bizarrement, il avait l'impression que les battements de son cœur résonnaient, au même titre que ses cris de tantôt.

— Tout va bien ? Tu es tout rouge !

— La ferme, marmonna-t-il.

Il avait pratiquement fini. Malgré la position ambigu, leur proximité nécessaire, cette étrange chaleur couvrant aussi bien son visage que celle sous ses doigts, il s'était appliqué, refusant de subir l'humiliation d'un bandage brouillon ou d'avoir à le refaire.

Et plus encore d'avoir à expliquer pourquoi, malgré son assurance, il n'était pas parvenu à protéger efficacement la plaie.

— J'ai fini. Ça devrait faire l'affaire pour le moment, mais notre priorité demain sera de trouver des soins convenables, compris ?

— À vos ordres ! Le taquina Link.

Ils finirent par s'endormir, adossé à une paroi différente, se faisant pratiquement face. Ou, plutôt, Link ronflota doucement peu de temps après, pendant que Ralph, lui tournant le dos, pliait et dépliait ses doigts, les fixant d'un air confus.

Pourquoi, encore maintenant, avait-il l'impression d'être encore penché sur l'aventurier, à panser sa plaie ?

Lorsque le sommeil le faucha finalement, ce fut pour un repos agité.

Chapter 6: Hand holding

Notes:

Voracity en découvrant le concept d'OTPtober : Oh, c'est trop mignon ! J'ai envie d'écrire du fluff pour Link

Voracity écrivant dessus : Bon, Link, porte le fardeau de la dépression et de la détestation de soi. Bisous.

Je précise que je n'ai même pas fait exprès…

Bonne lecture !

Chapter Text

Link trouvait ses mains hideuses.

Quand il était plus jeune, elles étaient semblables à celles de n'importe quel enfant de son âge. Quelques blessures mineures, de la terre sous des ongles coupés courts, des cales naissantes dus au travail de la ferme et du verger. Des petites mains aux longs doigts qu'il adorait enfouir dans toutes sortes de matière, pour le simple plaisir d'expérimenter diverses textures.

Il n'y avait jamais vraiment prêté attention, auparavant. Après tout, il n'avait que neuf ans, la seule chose qui avait de l'importance au travers de sa routine, c'était le repas suivant !

Puis il avait attrapé l'anneau de la lourde antenne de son oncle pour la lui apporter, une nuit d'orage, car il l'avait oublié dans son empressement à voler au secours de la princesse. Puis il les avait couverte du sang de son oncle, celui-ci agonisant dans ses bras. Puis il attrapa son bouclier et son épée, les brandissant maladroitement, trop lourds pour lui. Ces même mains qui avaient brandi d'autres armes, bandé des arcs, lancé des boomerangs, des bombes, feuilleté le livre de Mudora, manipulé de la poudre magique, des cannes ou les médaillons.

Il s'était brisé les os, subi brûlures et gelures, avait serré des bandages de fortunes sur des plaies sanglantes…

Mais il grandissait aussi, en parallèle.

Il avait pleinement pris conscience de leur état lorsqu'il avait eu à glisser son premier anneau magique et qu'il avait dû lutter contre ses articulations noueuses et ses os légèrement tordus.

Les nombreuses autres bagues tout du long de son aventure à Holodrum n'avaient fait qu'empirer le phénomène, allant parfois jusqu'à gonfler ses doigts alors qu'il luttait pour arracher l'anneau pour le remplacer par un autre, plus pertinent, dans un moment critique.

À cela s'était ajouté les premiers épisodes d'arthrites et il avait observé avec horreur la déformation de ses articulations, son corps peinant à lui répondre, son épée devenant subitement le même fardeau que quelques années auparavant, lui tombant des mains malgré ses meilleurs efforts.

Mais il avait persisté. Il avait serré les dents, carré les épaules et avait poussé son corps à plus, toujours plus.

Il était un aventurier, un héros ! Il n'avait pas le temps pour des états d'âme, pas le temps pour pleurnicher parce qu'il avait du mal à lacer ses bottes ou à tenir sa lanterne droite alors qu'il déchiffrait avec difficulté une langue dont il ignorait jusqu'à l'existence il y avait encore cinq mois !

Il était voué à une existence solitaire.

Peut-être ses faits d'armes marqueront la mémoire des gens et peut-être l'Histoire le marquera auprès d'autres noms illustres, mais il y avait une vérité plus insidieuse qui l'attendait : un héros ne vieillissait pas.

Il mourrait au combat ou il disparaissait. Certains réalisaient des mariages prestigieux, obtenant titres et terres, s'assurant une retraite loin du besoin.

Mais un vrai héros décédait tragiquement après un échange d'armes épiques, emportant avec lui son ennemi, remportant une victoire écrasante qu'il savoure le temps de quelques respirations avant de fermer les yeux une ultime fois, dans les bras de la princesse qu'il avait libéré, celle-ci pleurant à chaudes larmes et bénissant son chevalier d'une voix chargée d'émotions.

Bref, c'était une carrière plus réduite que le passage d'une étoile filante et avec son lot de mauvaises surprises.

Jusqu'il y a peu, cette finalité n'avait pas effleuré l'esprit de Link.

Peut-être quand il avait sept ans et qu'il jouait aux chevaliers avec les enfants de Cocorico, armés de bâtons ramassés dans la forêt.

Mais là, alors que s'amorçait la quatrième (troisième ?) aventure et que son corps lui paraissait être un plus grand ennemi encore que Veran ou Ganon lui-même, il se surprit à y repenser.

Si, et seulement si, les déesses cessaient de jouer avec destin et le laissait tranquille après cette nouvelle quête – et qu'il en ressortait victorieux, bien sûr – peut-être pourrait-il ranger les armes, poser le bouclier une dernière fois, dorloter ce qu'il lui restait de membres…

Avoir une vie heureuse ? Il y avait cru, une fois, il n'y a pas si longtemps… avant d'être rappelé à l'ordre…

Pouvait-il y croire de nouveau ?

La question revint à de nombreuses reprises le hanter, à chaque crampe, chaque réveil endolori, chaque engourdissement…

Puis il y eut le final. Quand il réclama des réponses à Nayru, à Impa, à Ralph.

Quand il tendit le bras en direction de ce dernier, le cœur battant si fort qu'il s'attendait à ce qu'il lâche à tout instant.

Leurs vies si différentes se sentaient au simple contact de leurs paumes et malgré l'émotion de se réunir avec son âme-sœur et alors que Link portait cette main si soignée et parfumée à son visage pour en frôler le dos de ses lèvres, il pouvait sentir le désespoir l'étreindre à la vision de leurs mains enlacées.

La sienne ne ressemblait déjà plus à rien, comment osait-il saisir un descendant de lignée royale avec ?

Mais l'heure n'était pas aux plaintes et il se força à avaler sa souffrance, taquinant Ralph au sujet de son empourprement, lui répondant avec des cris, s'emportant.

Mais il ne lui lâcha pas la main pour autant.


Ralph avait été trop de fois spectateur de mauvais jours de son petit ami, ceux où son humeur sombrait, ceux où son corps ne lui répondait pas plus ou pas comme il le devrait.

Ils auraient dû apprendre à composer avec, trouver des solutions, des arrangements, du compromis.

Le plus difficile, à son sens, fut quand il découvrit que malgré les apparences et l'impression qu'il donnait, Link refusait de se livrer, restant très secret. Trop.

Il était du genre à lécher ses plaies en secret, quitte à les laisser s'infecter, plutôt que de percer l'abcès. Figurativement.

Lui-même s'était découvert des trésors de patience à son contact, apprenant à le ménager ou à lui rentrer dedans selon les situations.

Et parfois, la solution était la plus simple.

Sans un mot, Ralph observa la silhouette solitaire au bout de la jetée, les pieds dans l'eau et les épaules basses.

Se déchaussant à son tour, il alla s'asseoir à ses côtés, détachant sa cape en chemin, la drapant autour d'eux deux.

Il dévora silencieusement son beignet, attendant que les yeux pensifs se concentrent sur ce plan de l'existence. Quand cela arriva, un soupir de soulagement passa ses lèvres mais il ne l'interpella pour autant.

À la place, il attrapa prudemment la main baguée de la sienne et la pressa doucement, caressant du pouce les bijoux et les cicatrices, continuant de surveiller les vagues alors qu'il finissait sa gourmandise de celle encore libre.

Il léchait les dépôts de confiture lorsque le poids d'une tête élu domicile contre son épaule gauche et que la main dans la sienne se fit plus souple, plus lâche.

Il tourna légèrement la tête, juste de quoi presser ses lèvres contre la frange épaisse puis retourna à sa contemplation.

Un sanglot troubla la paix relative et les anneaux s'enfoncèrent dans sa chair alors que sa main s'agrippait convulsivement à la sienne.

— Reste avec moi… supplia le héros.

— Aussi longtemps que tu me tiendras la main, promit-il.

Chapter 7: Regret

Notes:

On s'y remet lentement, on va y arriver...

Bonne lecture !

Chapter Text

— Je suis désolé, avait déclaré Link, un jour.

Juste avant, Nayru avait entreprit d'entonner un des chants de son répertoire. Les animaux s'étaient amassés autour de la clairière, charmés par les notes et apaisés.

L'intervention du héros brisa cette atmosphère. Non par son niveau sonore mais par sa négativité.

Impa, Nayru, Ralph… tous les trois se tournèrent vers lui, chacun affichant un degré différent d'inquiétude mêlée de surprise. De quoi pouvait bien s'excuser le jeune hylien ?

Au centre de l'attention, celui-ci ne leur rendait pas leur regard, les yeux fixés sur l'herbe verdoyante sous lui.

— De quoi es-tu désolé ? Intervint l'oracle.

Elle grattait les cordes de sa harpe du bout des ongles, un son à peine perceptible, mécaniquement, pensivement.

— De… tout, j'imagine ? Si je n'étais pas venu, Veran n'aurait pas pris possession d'Impa, de Nayru, de Ralph… Si je m'étais correctement assuré d'avoir triomphé contre les Twinrova…

Une note dissonante retentit alors que l'oracle repoussait son instrument après avoir malencontreusement accrochée une corde.

— Ce n'est pas de ta faute ! Oh, Link, tu n'es en rien coupable de ces méfaits ! C'est plutôt à moi de te présenter mes excuses pour t'avoir forcé dans une aventure alors que tu guérissais à peine d'une autre !

Elle se précipita à côté de lui, l'entourant de ses bras afin de le pencher contre elle, tentant de le consoler.

Mais malgré toute son affection, le jeune hylien resta raide et inconfortable contre elle, finissant par quitter son étreinte avec un sourire contrit.

— Mais si je n'étais pas venu, si je n'avais pas été aussi faible…

Nayru avait gardé ses mains dans la sienne, frustrée.

— Avec des « si », on pourrait faire tellement de choses…


Le retour à leur logement partagé se fit dans un silence tendu.

Ralph observait par en-dessous Link, inquiet.

Ça faisait quelques jours qu'il avait remarqué l'humeur sombre de l'aventurier sans pouvoir mettre le doigt dessus, craignant à tout instant qu'il ne s'emporte ou ne se brise.

Link portait son cœur en bandoulière, ne cherchant jamais à cacher ses expressions, hormis lorsqu'il affrontait Veran, c'est ce qui, c'est ce qui avait troublé Ralph, habitué aux visages lisses de toute expression, aux masques hypocrites de l'aristocratie, où on vous souriait en face tout en vous poignardant dans le dos.

C'était donc un exercice nouveau pour lui, mais surtout une épreuve pour leur couple.

Il n'était pas difficile de s'en rendre compte : le moindre pas de travers et le noble pourrait tout perdre. Pas seulement leur couple ou l'amour de Link, mais bien ce dernier.

Dans ces yeux si vifs, l'étincelle de vie n'avait pas brillé depuis un moment…

Tout entier à ses réflexions, il ne se rendit compte qu'ils étaient arrivés que lorsque son compagnon l'attrapa par le col et lui demanda de retirer ses chaussures.

Il le retrouva dans la cuisine, préparant le thé avec application mais sans siffloter comme il en avait pris l'habitude. En y repensant, ça faisait un certain temps qu'il ne l'avait pas entendu faire…

Quittant sa position d'observateur, il vint déposer ses mains sur les hanches étroites, déposant un baiser dans sa nuque avant d'y appuyer son visage.

Aucun d'eux ne dit mot jusqu'à ce que la bouilloire ne siffle et que Link ne s'en saisisse, remplissant la théière.

— Je suis désolé, déclara-t-il au milieu de cette scène purement domestique.

— Désolée de quoi ?

Un nouveau baiser fut appuyé sur la crête d'une cicatrice.

— De tout. Tu mérites un meilleur compagnon qu'un aventurier brisé qui te réveille à cause de ses cauchemars, qui a peur des feux d'artifice et qui peut t'attaquer n'importe quand.

Un petit silence s'installa durant lequel aucun des deux ne bougea, le thé infusant.

Puis Ralph embrassa de nouveau la cicatrice de foudre pendant que ses pouces faisaient des petits cercles, appuyant sur les muscles noués.

— Je n'ai pas pu sauver mon oncle, craqua-t-il. Il est mort dans mes bras. Il est revenu grâce à la Triforce, c'est vrai, mais ce n'était plus lui, ce n'était plus pareil…

Tout son corps se tendait, se crispait, dans son étreinte, mais ce fut son seul mouvement, restant en place.

— Je n'ai pas pu sauver Din et ma bêtise a manqué de nous faire perdre Nayru…

— Impa a avoué qu'elle a été possédé de son propre fait. Ne te rend pas coupable des erreurs des autres.

Link se tut, n'ajoutant rien mais n'en pensant pas moins.

Personne au monde ne serait capable de le faire changer d'avis.

Il était un héros, et un mauvais. Sinon, pourquoi les déesses continuaient, encore et encore, à le mettre à l'épreuve ? Il avait dû les décevoir par sa faiblesse et sa naïveté, par sa lenteur et par ses échecs…

Bien sûr, il n'était pas le héros déchu, il était parvenu à la fin de ses quatre quêtes, après tout !

Malgré lui, les souvenirs de ses errements lui revinrent en mémoire et les larmes s'amassèrent au bord de ses yeux. Bien vite, il s'échappa de l'étreinte aimante, mais uniquement pour s'y enfouir de lui-même, la gorge nouée, s'agrippant à la tunique comme à une bouée, comme il s'était agrippé aux rares débris de son embarcation suite à son naufrage en haute mer.

Les sanglots brouillèrent ses mots mais Ralph parvenait à les décrypter. Ou, du moins, ce n'était pas la première fois qu'il en était témoin.

Derrière les paupières closes, il savait qu'il y avait une image rémanente. Une silhouette aussi rousse que lui, avec un sourire aussi lumineux que le soleil, à l'odeur d'hibiscus et à la voix mélodieuse.

Un premier amour arraché avec toute la violence des catastrophes naturelles qui n'avait pu être pleuré et dont la plaie restait encore ouverte.

Ralph n'en était même pas jaloux. Il était triste pour Link, triste pour cette Marine disparue, pour leur amour balbutiant, pour ce futur avorté.

Ses larmes se mêlèrent à celles du héros.

Chapter 8: Close

Notes:

Il y a un gouffre de presque un an en plein milieu de ce texte. Et je crains que ça ne se sente…

Si le "Linkalph" (sans blague, c'est le nom officiel de ce ship) vous intéresse, n'hésitez pas à jeter un œil au Sicktember 2024 qui les réunit, avec Lavio et Marine aussi ! Plus d'info là-bas ;)

Bonne lecture !

Chapter Text

Ralph connaissait Nayru depuis toujours.

Ils avaient grandi ensemble, littéralement, se retrouvant dans des cachettes pour raconter des bêtises sur les adultes et glousser, se faufilant dans le centre-ville pour rejoindre les festivals ou se goinfrer de friandises.

En tant que membre de l'ex-famille royale, Ralph avait toujours sur le rôle tenu par sa meilleure amie et il la respectait pour ça. Il avait tenté d'apprendre la musique, lui aussi, pour l'accompagner, puis le chant, mais le résultat était loin d'être élégant, les convainquant d'arrêter le massacre au plus vite.

Bien sûr, jamais son amie n'avait prononcé le moindre commentaire négatif en son encontre, l'encourageant, mais elle finit par être l'unique témoin de ses tentatives musicales.

Et maintenant, il y avait Link.

Link qui n'hésitait pas à donner de la voix ou à jouer quelques notes sur les instruments qu'il voyait.

Il était très rarement dans le rythme et ses chansons avaient un côté nasillard ou il prenait une voix de fausset subitement, souvent à cause de la mue, mais il fallait plus que ça pour l'arrêter.

Par contre, il avait clairement le rythme dans la peau quand il était question de danser et il ne se privait pas de rejoindre le mouvement dès que les premières notes se faisaient entendre, se mêlant à la foule ou lançant le mouvement en improvisant les pas que la musique les inspirait.

Un jour où il le lui avait demandé, il avait marmonné au sujet d'une certaine Din, ce que Nayru avait confirmé plus tard. Si elle occupait une sorte de patronat de la musique, l'autre oracle avait opté pour la danse. Et il semblait avoir bénéficié de ses enseignements.

Tant pis si Ralph ne pourra jamais faire danser Link sur ses accords maladroits, il pourra au moins l'accompagner dans ses pas, lui tenir la main ou la taille et rire avec lui lorsqu'ils sont à contre-sens.

Lorsqu'il s'en était ouvert à sa seule amie, celle-ci avait eu un sourire attendri et lui avait promis qu'elle jouerait pour eux autant de fois qu'ils en émettraient le vœu, même si elle devait le faire les doigts en sang.

Ces mots le ravirent autant qu'ils l'effrayèrent alors qu'il avait pu sentir le frisson qui accompagnait inévitablement chaque sort qu'elle réalisait.

Il en avait été peu témoin, mais les rares occurrences avaient été suffisantes pour les graver dans sa mémoire.

C'était comme une caresse froide provenant de l'intérieur de lui-même, du plus profond… de son âme, peut-être ? puis qu'elle gagnait lentement l'extérieur avant de s'évaporer par les pores de sa peau.

Une fois, il l'avait mentionnée à Nayru et elle en avait été si attristée qu'il avait aussitôt prétendu que ça ne le dérangeait pas et qu'elle pouvait recommencer quand elle le voulait !

Mais bien sûr, elle n'en avait pas été dupe et Ralph fut témoin de bien moins de ses sorts.

Y repenser tordit son sourire en grimace coupable, mais il était trop tard pour changer quoi que ce soit… Même lui emprunter sa harpe n'y changerait rien. En tant qu'oracle du temps, elle était bien la seule dont la mémoire n'était pas altérée lorsque les événements étaient modifiés.

De par son éducation, il savait qu'il lui fallait prêter attention à ses propos et à leur porté, que les conséquences pouvaient être un tribut lourd à porter. Mais ce fut la première fois que c'était aussi significatif.

Il en avait parlé à Link, ensuite.

Lui non plus n'avait aucune solution pour rattraper cette confidence malheureuse. Alors, à la place, il l'avait attrapé par le bras et l'avait emmené jusqu'auprès de Nayru, l'air bien trop fier de lui pour les rassurer tous les deux.

Il avait clairement une idée derrière la tête, et ils n'étaient pas sûr qu'elle allait leur plaire…

— Tu peux jouer pour nous ? Demanda l'aventurier.

Nayru et Ralph s'entregardèrent avant qu'elle n'obéisse, grattant les cordes de sa harpe, jouant une de ses chansons préférées, dont les paroles quittèrent doucement ses lèvres.

Ralph ignorait combien de fois il l'avait entendu, mais il n'en avait jamais assez, souriant alors que Link le manipulait pour qu'il lui fasse face, se tenant la main et la taille.

Quand il comprit qu'ils allaient danser, une fois de plus, il ne put s'empêcher de froncer les sourcils.

En quoi est-ce que ça allait résoudre quoi que ce soit ?

Mais aucune mot ne quitta ses lèvres alors qu'il accompagnait ses pas, s'appuyant contre contre lui et s'en écartant, au rythme des notes.

Link passait clairement un bon moment et il décida de ne pas le lui gâcher en réclamant des explications.

Peut-être avaient-ils tout faux, que l'hylien n'avait aucun plan derrière la tête, qu'il voulait juste danser avec lui, avec eux…?

Lorsque la chanson prit fin, Ralph s'attendait à beaucoup de choses, mais certainement pas à ce que Link ne recule, n'attrape Nayru à son tour et ne la colle dans ses bras, s'asseyant à sa place pour jouer d'un instrument qu'il avait arraché de son sac sans fond.

Ralph n'arrivait pas à le reconnaître, faisant face à Nayru comme il ne l'avait pas fait depuis des années, rigide.

— Hé ! Si vous ne bougez pas, je vais me vexer ! Les prévint l'aventurier.

Ce fut l'impulsion nécessaire.

Nayru mena les pas, plus familières de cette mélopée inconnue, souriant doucement alors qu'ils prenaient de la vitesse, reprenant leurs marques vis-à-vis de l'autre.

Rapidement, ils riaient, simplement amusés, suivant le rythme imposé par Link, tournoyant dans la clairière.

Et, lorsque la dernière note s'évapora dans les airs, ils s'arrêtèrent, reprenant difficilement leurs souffles, riant toujours et s'appuyant l'un sur l'autre.

— Cette chanson, commença l'oracle, c'est celle de Din ?

— Tout à fait ! J'ai pensé qu'elle ne serait pas trop éloignée de celles de Labrynnia.

— Ça fait des décennies que je ne l'avais pas entendue…

La mélancolie qu'elle affichait lui donna l'impression que son cœur était pressé.

D'aussi loin qu'il se souvienne, jamais son amie n'avait mentionné les deux autres oracles, et encore moins si elles lui manquaient. Mais il était évident que leur lien surpassait tout autre.

Quelques années auparavant, sans doute aurait-il ressenti de la jalousie à cette révélation, mais maintenant, il avait Link, ce n'était plus pareil…

Il l'étreignit doucement, partageant sa peine.

Face à eux, Link perdit lentement son sourire, finissant par fixer ses bottes, les oreilles basses.

— Ce… ce n'était pas ce que je cherchais à faire, avoua-t-il.

Très digne, Nayru s'écarta de son ami, essuyant les larmes de ses joues de ses doigts, avant d'enlacer Link à son tour.

— J'ai compris quel était ton but, et je t'en remercie, tu as bien choisi.

— Mais tu pleures…

— Mes sœurs me manquent, mais j'ai des amis, ici, qui me permettent de ne pas me sentir seule.

Ralph les rejoignit à son tour, décidant d'interroger son petit ami plus tard. Ce n'était clairement pas le bon moment.


Le bon moment prit son temps pour venir, au point que Ralph se redressa brusquement, quelques secondes avant de sombrer dans le sommeil, dérangeant Link qui grogna alors qu'il tombait sur le matelas.

— Qu'est-ce que tu fous ? Marmonna-t-il.

— Pourquoi la danse ?

— Ça peut attendre demain ? Je suis crevé…

— La réponse ne peut pas être si longue… ni si compliquée !

Comprenant qu'il n'y avait aucun échappatoire – ou alors, il lui faudrait dormir dehors – Link se redressa, la tête entre les mains et baillant à profusion.

— Tu as avoué à Nayru ton inconfort quand elle utilise la magie – ferme-la, je parle – et elle s'est sentie blessée que tu ne lui ais jamais dit auparavant, tout en ne comprenant pas comment faire pour que tu n'aie pas à revivre ça.

Vexé d'avoir été invité à se taire, Ralph croisa les bras et prit son mal en patience.

— Sauf que Nayru est l'oracle des Âges. La magie coule dans ses veines comme le sang dans les tiennes. Elle ne peut pas la restreindre. Tu aurais plus vite fait de lui demander de s'amputer des deux bras…

Au fond de lui, Ralph le savait. Mais entendre Link le verbaliser lui fit prendre réellement conscience de la portée de ce qu'il croyait n'être qu'une innocente confession. Horrifié, il plaqua les mains contre sa bouche, le souffle coupé.

— Et, plus que tout, Nayru use de magie quand elle joue de sa harpe. Alors j'ai pensé que lui montrer que tu étais quand même capable de danser sur sa musique ou à son contact, lui permettait de passer au-dessus de tout ça. La preuve par l'exemple ?

Décidant qu'il en avait assez dit, Link roula dans les draps en un cocon, la tête sous l'oreiller.

Il s'endormit bien vite, pour une fois, laissant son petit ami fixer les draps, sans les voir, remettant en cause tout ce qu'il avait pu croire et dire.

Le sommeil sera long à lui venir, cette fois…

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